1.000 nouveaux lits et pas de personnel en plus !

La Communauté Autonome de Madrid ouvre un hôpital dédié à la Covid... sans embaucher de personnel supplémentaire.

Valdebebas, le quartier madrilène en construction depuis une dizaine d'année, où fut érigé en trois mois l'hôpital Isabel Zendal. Foto: Ricardo Ricote Rodriguez / Wikimedia Commons / CC-BY 2.0

(Jean-Marc Claus) – La formule n’est pas nouvelle et en France, Nicolas Sarkozy l’avait utilisée lors de sa réforme hospitalière : l’hôpital public ne manque pas de moyens ; il est juste mal organisé. Une dizaine d’années plus tard en Espagne, la présidente de la Communauté Autonome de Madrid, Isabel Natividad Díaz Ayuso (PP) dont le « talent » n’est plus à démontrer, annonce fièrement l’ouverture d’un tout nouvel hôpital fort de 1.000 lits, établissement d’une importance cruciale en pleine seconde vague de pandémie de Covid-19. Mais les 6.000 professionnels nécessaires pour en assurer le fonctionnement, seront prélevés dans les autres hôpitaux de la capitale.

Non, ce n’est pas une blague, et la situation prend un caractère tellement ubuesque qu’il devient difficile de garder son sérieux. 51 millions d’Euros sont investis dans la construction de la structure mais, comme le dit benoîtement Enrique Ruiz Escudero (PP), actuel Ministre de la Santé de la Communauté Autonome : «Le personnel viendra des hôpitaux de Madrid et le plan des ressources humaines est en cours de finalisation». Or, si Isabel Natividad Díaz Ayuso (PP) ne cesse de parader en affirmant que ce nouvel hôpital à « vocation pandémique » construit en trois mois ne manquera d’aucun moyen matériel, la question des moyens humains demeure un grand mystère pour les syndicats. Ce que les Chinois ont fait en dix jours à Wuhan, la conquistadora madrilène le réalise en trois mois. Mais il lui manque bien plus que les quatre-vingt jours nécessaires à réaliser un tour du monde à la fin du 19eme siècle !

Au 21eme siècle, le gouvernement Partido Popular (PP) de la Communauté Autonome, revient aux vielles lunes de la fin du 20eme siècle, estimant que la masse salariale d’un hôpital constitue une dépense et non un investissement. Cet hôpital, comme d’autres réalisations dans le domaine de la santé à Madrid, est à la fois un cadeau aux grandes sociétés du bâtiment, et la vitrine publicitaire parfaite mais vide de contenu d’Isabel Natividad Díaz Ayuso, selon le syndicat Union Générale des Travailleurs (UGT) qui n’est pas le seul opposant à cette construction. Mais elle est bel et bien sortie de terre à Valdebebas au Nord-Est de Madrid, et sa spécificité Covid va provoquer, par la ponction de personnels effectuée dans les autres hôpitaux madrilènes, de multiples crises dans ces derniers.

Seul aspect positif, mais bien insignifiant en regard de l’actuelle crise sanitaire, cet hôpital porte le nom d’Isabel Zendal. Connue également sous différentes variantes de son patronyme, Isabel Zendal Gómez, issue d’une modeste famille galicienne, a travaillé très tôt dans un orphelinat de La Coruña. Elle a accompagné, en 1803, vingt-deux enfants immunisés contre la variole et donc porteurs d’anticorps propres à la fabrication de vaccins, lors du voyage humanitaire du docteur Francisco Javier Balmes – médecin de Carlos IV – et du chirurgien Josep Salvany se rendant aux Philippines ainsi qu’en Amérique Latine. Cette campagne de vaccination qui a permis de toucher 250.000 personnes, lança les bases de la lutte contre la variole éradiquée seulement en 1970. Un film coproduit par la RTVE et intitulé «22 ángeles » en relate l’histoire. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) considère Isabel Zendal Gómez comme la première infirmière partie en mission internationale.

Contrairement à l’expédition Balmes du 19eme siècle, l’équipée Díaz Ayuso du 21eme siècle néglige les moyens humains et se fie au seul bâtiment qui risque fort de faire eau de toutes parts. Or, quand une structure de soin dysfonctionne, ce sont les patients qui en font les frais. Une vitrine très chère payée par tout un chacun, pour assurer la promotion d’une politicienne hors-sol n’arrivant pas à la cheville  d’Isabel Zendal Gómez, dont elle a l’audace d’instrumentaliser la notoriété, alors qu’elle n’a de commun avec elle que le prénom.

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