(12) Frantisek Zvardon meets… Marc Chaudeur
Pendant tout le mois de janvier, des personnalités commentent les photos sensationnelles du photographe Frantisek Zvardon – den ganzen Monat Januar über werden Prominente die sensationellen Fotos des Fotografen Frantisek Zvardon kommentieren.
Aujourd’hui / heute : Marc Chaudeur
L’image de František est magnifique, et très forte. Violente, même.
Il y a d’abord le rappel d’un émerveillement enfantin, celui qui envahit tout l’être quand on rencontre la Provence à 6 ou 8 ans. Le mystère incroyable de cette senteur de lavande, d’une rare puissance, tellurique et cérébrale à la fois. Et puis juste après, un ordre brutal, artificiel heurte la vue : celui des rangées trop rectilignes, disciplinaires…
La vue, ce n’est pas la vie. Les cinq sens, Platon les hiérarchise : le plus bas, l’odorat, nous lie (selon lui, nous enchaîne) à la terre, et souvent à la boue. Il est d’ailleurs très développé chez les verrats et les truies. A la vie, aussi, par conséquent. A l’autre extrémité, par delà le toucher, le goût et l’ouïe : la vue, sens de l’aigle et du philosophe, nous distancie, nous élève ; elle nous permet de construire notre réel, comme le sait la neurophysiologie depuis très longtemps.
Mais cette image là heurte,choque immédiatement notre œil : elle oppose à la construction mentale et visuelle un ordre tout extérieur, étranger, violent : quelque chose de glacé. Et de morbide. En rangs par onze ! On s’attend à voir la lavande marcher au pas…
Notre être s’en offusque. Il plonge dans la lumière et surtout, dans l’odeur, si fortement suggérée dans cette image, Il plonge dans cette odeur qui nous pénètre, qui nous déborde de tous côtés et nous baigne. A partir de cette image, le parfum de la lavande nous immerge dans un bain de vie.
Das Foto von Frantisek ist großartig und sehr stark. Gewalttätig sogar.
Da ist zuerst die kindliche Bezauberung, die jeden erfasst, der mit 6 oder 8 Jahren die Provence entdeckt. Das unglaubliche Mysterium dieses Lavendeldufts, selten stark, geerdet und gleichzeitig den Geist umfangend. Und dann gleich eine brutale, künstliche Ordnung, die den Blick stört: gerade, disziplinierte Reihen…
Die fünf Sinne, wie Plato sie hierarchisiert: ganz unten, der Geruchssinn, der uns an die Erde bindet (laut Plato „ankettet“) und häufig auch an den Schlamm. Dieser Sinn ist übrigens bei Ebern und Säuen ganz besonders stark entwickelt. Und er bindet uns folglich auch ans Leben. Am anderen Ende der Skala, nach Tastsinn, Geschmackssinn und Gehör: Der Sehsinn, die Stärke der Adler und Philosophen, die uns unterscheidet, uns erhebt; er erlaubt uns, unsere Realität zu erschaffen, so, wie es die Neurophysiologie seit langem kann.
Aber dieses Foto stört den Sehsinn, schockiert auf Anhieb unser Auge: Es stellt dem geistigen und visuellen Erschaffen eine ganz fremde, unbekannte und brutale Ordnung entgegen, etwas Eisiges. Morbides. In Elferreihe! Man wartet nur darauf, dass der Lavendel im Gleichschritt losmarschiert…
Unser Sein sträubt sich dagegen. Es taucht in das Licht ein und vor allem in diesen Duft, an den dieses Foto so sehr denken lässt. Unser Sein geht in diesem Duft auf, der uns durchdringt, zum Überlaufen bringt und umfasst. Durch dieses Foto, den Duft des Lavendels, der uns umhüllt, nehmen wir ein Bad im Lebensbrunnen.
Marc Chaudeur, philosophe et auteur, journaliste, Eurojournaliste
Mark Chaudeur, Philosoph und Schriftsteller, Journalist, Eurojournalist
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