A Haguenau, il n’y a pas de démobilisation !

A moins qu’Haguenau, quatrième ville d’Alsace, soit une sorte de village celte étanche à toute influence extérieure, il n’y a pas été constaté, un mois après son premier samedi de manifestation, de démobilisation dans la contestation de la réforme des retraites portée par la troïka Macron-Borne-Dussopt.

La manifestation de samedi sur le pont enjambant la Moder. Foto: JM Claus / CC-BY 2.0

(Jean-Marc Claus) – A en croire certains médias, les mêmes qui en 2018-2019 prétendaient la France entière à feu et à sang lors des manifestations des Gilets Jaunes, la mobilisation contre la réforme des retraites voulue par les puissances d’argent et portée par la troïka Macron-Borne-Dussopt, connaîtrait un net reflux. Mais c’est plutôt d’un reflux gastro-oesophagien qu’il faudrait parler, tant les propos de certains commentateurs de chaînes autoproclamées d’information continue sont à vomir.

A moins qu’Haguenau, quatrième ville d’Alsace, soit une sorte de village celte étanche à toute influence extérieure, il n’y a pas été constaté samedi 11 mars de démobilisation du mouvement de protestation contre ce projet qui veut, comme le disait Clémentine Autain, « transformer nos deux meilleures années de retraite en deux pires années de travail ». Ce à quoi ajoutait un manifestant fort à propos, « …pour celles et ceux qui auront à ce moment-là encore la chance d’avoir un travail ! ».

Avoir encore un travail jusqu’à 64 ans, une vue de l’esprit lorsqu’à partir de 50, dans le secteur privé, les salariés sont souvent sur des sièges éjectables ! Donc, il ne s’agit pas tant des pires années de travail, que des pires années de carrière. Une carrière qui se termine à la casse, osons le mot car lorsque prévalent les logiques comptables, l’humain n’a pas plus de valeur qu’un break familial diesel Crit’Air 5 en Zone à Faibles Émissions. La croyance absolue de ceux d’en-haut, au dogme artificiel de la concurrence prétendue libre et non faussée, l’emporte sur le doute suscité naturellement par la réalité de la souffrance vécue quotidiennement par ceux d’en-bas.

Foto: JM Claus / CC-BY 2.0

Foto: JM Claus / CC-BY 2.0

Une souffrance clairement exprimée, lors de divers échanges avec les manifestants, mais aussi au moment des prises de parole à la Porte de Wissembourg, autre lieu emblématique de la ville de Haguenau qui, comme le 11 février devant la Halle aux Houblons, fut le point d’orgue de la manifestation, car rassemblant le plus grand nombre de personnes. Partir à la retraite en bonne santé, tel était l’un des deux leitmotivs, faisant écho à la banderole vue le même jour à Strasbourg et affirmant « On crèvera pas au boulot ». Autre leitmotiv entendu depuis le début du mouvement, « Macron démission ! » s’est vu localement complété d’un « Thiébaut démission ! », adressé au député macroniste de la circonscription qui en parfaite communauté de vue avec son président, a selon les représentants des organisations syndicales, refusé de les recevoir.

Les femmes, grandes perdantes de cette réforme qui se prétendait faussement juste pour devenir très rapidement toujours aussi faussement nécessaire, étaient fortement représentées dans cette manifestation se voulant aussi familiale. Familiale, car cette attaque contre notre régime de retraite par répartition, instrument de justice sociale hérité du Conseil National de la Résistance, est aussi une menace pour l’équilibre des familles. Il est beaucoup fait mention des salariés retraitables, dont le recul de l’âge de départ va d’autant repousser la possibilité d’assurer la garde de leurs petits enfants, mais quid des familles en général où les jeunes ne trouveront pas de travail, car les postes seront deux ans de plus occupés par des seniors, quid des dits seniors qui n’auront pas la chance de conserver un emploi jusqu’à 64 ans et donc vont socialement déchoir, quid de la classe d’âge intermédiaire qui fera le grand écart et au sein de laquelle se concentreront toutes les angoisses et les privations à un moment de la vie censé être celui de l’épanouissement ?

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