A Moscou : un œil noir…

La Russie, un labo pour la nouvelle dictature technocratique mondiale ?

Moscou Foto: Press slujba Pres Rossii/Wikimédia Commons/CC-BY-SA/3.0Unp

(Marc Chaudeur) – Ces dernières semaines, le gouvernement russe a mis en place un dispositif de surveillance plus draconien encore que précédemment. Prépare-t-on, comme la plupart des organisations de défense des droits de l’Homme encore existantes tendent à le suggérer, un plan pour une nouvelle dictature à base de surveillance électronique ?

Les Moscovites, depuis quelques jours, ne peuvent se rendre sur leur lieu de travail qu’en franchissant des bornes de contrôle électroniques, en y présentant une application où sont enregistrés leur numéro d’identité, etc. Par ailleurs, les techniciens ont installé 170 000 nouvelles caméras à Moscou (presque 13 millions d’ habitants intra muros, 20 millions avec l’oblast). Ces caméras scannent le numéro minéralogique des voitures et pratiquent d’ores et déjà la reconnaissance faciale, tant décriée dans la plupart des pays d’Europe occidentale.

Rien n’exclut bien évidemment qu’on assiste ce printemps  au premier galop d’essai d’une dictature de type relativement nouveau. La Russie a de sérieuses dispositions à cela, après 70 ans de despotisme lénino-stalinien et de mithridatisation poutinienne depuis un peu moins de décennies. Comme un poison toujours plus corrosif : un petit peu de dictature d’abord, encore un petit plus, et on finit par accoutumer la population à toujours moins de droits. Et par exemple, on assimile les organismes de défense des droits de l’Homme à des « associations étrangères », autrement dit, à des services d’espionnage (la confusion volontaire et très lourde de conséquences entre « association étrangère » et service d’espionnage est elle-même très significative !). Et sous le prétexte de la pandémie, sans cesse un petit peu plus de contrôle de surveillance des citoyens, une prolongation de plus en plus indéfinie du pouvoir personnel : la Russie a quelques pas d’avance sur l’Occident, dont on peut parier que les dirigeants observent l’évolution de la Russie avec beaucoup d’attention et pour certains, avec une admiration à peine dissimulée.

En Russie, le virus continue ses ravages, de manière qu’il est relativement difficile de chiffrer de manière plus exacte qu’à l’aide des chiffres officiels.  Ceux-ci,en tout cas, annonçaient hier 870 morts pour l’ensemble du pays, et 93 500 cas d’infection ; pour la journée de mardi, on comptabilisait officiellement 6411 nouvelles contaminations au COVID-19. La Russie est ainsi devenue le 8e pays du monde pour le nombre d’infections ; elle devance donc cette semaine la Chine et l’Iran. Pire : selon des sources indépendantes, le nombre de victimes est de très loin supérieur aux chiffres officiels.Quelques sites officieux essaient tant bien que mal de diffuser des chiffres plus proches de la réalité. Ainsi, le site Neotlojneié Sostoïaniia dresse la liste des médecins morts à la tâche (sur le site connexe : SPISOK PAMIATI). Il comprend aujourd’hui 74 noms. Chapeau bas devant ces personnes courageuses et dévouées – et oubliées, non pas par les malades qu’ils ont guéris ni par leurs proches, mais par le pouvoir politique.

Un fait divers fait beaucoup jaser dans le pays : un moine du monastère Saint Serge de Sergiev Posad (dans l‘oblast de Moscou) qui avait été diagnostiqué positif au virus, est mort dimanche dernier des suites de ses brûlures ; il était parti de son couvent vendredi et avait tenté de s’immoler par le feu. Il avait été brûlé à 90 pour cent. Un dégât collatéral de plus…

Hier, discours de Poutine, qu’on présente comme devant être important. Nous le commenterons d’ici demain, si tout va bien. Le dirigeant semble manifester une certaine hésitation sur la nature des mesures à prendre. Lundi, il a notamment chargé une association de défense des consommateurs de préparer un plan pour le déconfinement. Nous sommes pourtant très loin d’une amélioration de la situation. Et la population montre à l’évidence une grande inquiétude.

A Moscou donc, autoritarisme, hésitation sur les mesures à prendre et surveillance de plus en plus étroite : tout cela produit une ambiance anxiogène qu’on espère voir s’alléger un peu ces prochains mois…

 

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