A quand, les sanctions contre la Grande Bretagne ?

L'Union Européenne réagit fort contre le détournement du vol Athènes – Vilnius et l'arrestation de l'opposant Roman Protassevitch par la Biélorussie. En ce qui concerne Julian Assange, silence radio.

Le silence des institutions européennes concernant le cas Julian Assange est insupportable. Foto: New Media Days / Peter Erichsen / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 2.0

(KL) – Depuis environ 10 ans, la Grande Bretagne détient un prisonnier politique de marque – Julian Assange, lanceur d’alerte hautement distingué par une série de prix internationaux, arrêté sous des allégations suédoises qui se sont avérées fausses, enlevé de force de l’ambassade de l’Equateur à Londres, incarcéré dans une prison de haute sécurité près de Londres, objet d’un procès aussi politique que les récents procès russes contre des opposants comme Alexeï Navalny. Concernant l’opposant biélorusse, les institutions européennes ont décidé d’appliquer des sanctions, en demandant la libération immédiate du journaliste-bloggeur. Peut-on maintenant s’attendre à ce que Bruxelles décide des mêmes sanctions contre la Grande Bretagne ?

Deux poids, deux mesures. Est-ce que les violations des Droits de l’Homme deviennent excusables dès lors qu’elles sont commises par le monde occidental, par « nous » ? Il faut croire que oui, car en 10 ans, les institutions européennes n’ont pas levé la voix pour demander la libération du plus célèbre des lanceurs d’alerte qui subit en Grande Bretagne ce que l’ONU considère être de la torture. La Grande Bretagne agit sous les ordres de Washington, tout comme la Biélorussie agit sous les ordres de la Russie – il serait donc normal que l’Union Européenne réagisse dans les deux cas de la même façon. Mais elle ne le fait pas.

Depuis la semaine dernière, l’espace aérien européen est fermé aux avions de la compagnie aérienne biélorusse Belavia et les avions venant des pays européens, contournent désormais l’espace aérien biélorusse. Peut-on s’attendre à ce que désormais, les avions de la British Airways ne peuvent plus voler au-dessus de l’Europe ? Est-ce que les vols au-dessus de la Grande Bretagne seront désormais déviés par d’autres routes ? On connaît la réponse et du coup, les appels à la libération de Roman Protassevitch, les sanctions prononcées, prennent un goût amer. Il ne s’agit pas d’un engagement humanitaire de la part des institutions européennes, mais d’une hypocrisie institutionnalisée, d’une occasion de faire du « Poutine bashing », pendant que le cas Assange, au minima aussi scandaleux que celui de Roman Protassevitch, ne semble pas inquiéter la politique européenne.

Il faut quoi à Bruxelles pour réagir ? La mise à mort d’Assange dans sa cellule à la prison de Belmarsh ? Pour ensuite sortir un communiqué indiquant « l’indignation » des responsables européens ? Le silence des institutions européennes, de peur de froisser les Etats-Unis et leurs agents britanniques, transforme l’Union Européenne en complice. Complice de violation des Droits de l’Homme, complice de la torture, complice de l’incarcération d’un journaliste pour des raisons politiques.

On ne peut pas considérer le cas Roman Protassevitch sans le comparer au cas Assange. Est-ce qu’à Bruxelles, on se rend compte que ce silence coupable dans le dossier Assange mine la confiance des citoyens et citoyennes européens en leurs institutions ? Est-ce que l’on comprend à Bruxelles que les Européens aimeraient bien que l’UE ne soit plus que le teckel des Etats-Unis qui met sagement en œuvre ce que demande Washington ?

Comment peut-on se moquer de la Biélorussie, fidèle vassale de la Russie, tout en fermant les yeux devant les comportements criminels de la Grande Bretagne, fidèle vassale des Etats-Unis ? Il ne suffit pas de passer des lois qui, soi-disant, devraient protéger les lanceurs d’alerte, tout en acceptant qu’un pays européen torture un lanceur d’alerte qui lui, dérange le « grand frère » américain.

La Grande Bretagne se comporte dans le cas Assange exactement de la même façon que la Biélorussie dans le cas Roman Protassevitch. Logiquement, les réactions de l’Union Européenne devraient être les mêmes. Alors, les aéroports européens seront fermés quand pour la British Airways ?

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