A Strasbourg, le Conseil Rhénan cherche à simplifier le transfrontalier

Conseil Rhénan, Conférence du Rhin Supérieur, services municipaux de la coopération transfrontalière, Eurodistricts, Région Métropolitaine Trinationale du Rhin Supérieur….

Le "millefeuille transfrontalier" veut simplifier ses structures. Ce ne serait pas trop tôt... Foto: Crédits à Habib M'henni / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0

(Par Alain Howiller) – Il y avait beaucoup d’absents, à Strasbourg, au siège de la Région Alsace, à la dernière réunion du Conseil Rhénan : signe d’un désintérêt pour les questions transfrontalières ? Lassitude de participants -souvent les mêmes !- trop souvent sollicités dans trop d’instances s’occupant des mêmes problèmes ? Prise de conscience que les décisions concernant le transfrontalier se prennent ailleurs : à la «Conférence du Rhin Supérieur» voire au niveau des états concernés ?(1)

On trouvait sans doute un peu de tout cela à la réunion de Strasbourg : à preuve l’exposé et les propositions présentés par la présidente en exercice de la «Conférence du Rhin Supérieur» : Nicolette Kressl, Regierungspräsidentin («préfet») à Karlsruhe. Son exposé, au point quatre de l’ordre du jour de la réunion du «Conseil Rhénan», portait sur la «Coopération avec la Conférence du Rhin Supérieur, stratégie de communication, coopération entre groupes de travail de la Conférence et Commissions du Conseil Rhénan». On était loin des propos du Président Philippe Richert, alors Ministre chargé des Collectivités Territoriales et Président du Conseil Rhénan en sa qualité de Président du Conseil Régional d’Alsace, qui déclarait en Novembre 2011 : «Il faut avancer dans la simplification de nos structures, porter ensemble ce projet (de rapprochement des structures) et nous réunir sur de mêmes orientations».

Laisser du temps au temps !… – On était plus loin encore des préconisations de cette étude de «l’Institut Franco-Allemand» de Ludwigsburg (Deutsch-Französisches Institut – DFI») qui, en 2005, constatait : «Malgré le foisonnement (à la limite de la confusion et souvent décrit comme une croissance sauvage) des institutions, des formes prises par la coopération transfrontalière et malgré le socle juridique remarquable donné par exemple à la coopération communale entre la France et l’Allemagne, il est indéniable que la coopération transfrontalière régionale représente ce qu’on pourrait appeler, si on exagérait un tant soit peu, une dimension aléatoire, une inefficacité et un caractère provincial !…» Et de préconiser une simplification des structures. Il est vrai que sur ce point, le Président Richert avait prévenu, il y a quatre ans : «Il faut trouver des solutions pour nous regrouper. On mettra du temps pour trouver des solutions, mais on les trouvera !…»

Le même Philippe Richert, à nouveau président pour cette année du «Conseil Rhénan» a certes rappelé que le but à atteindre en matière de coopération transfrontalière était toujours une simplification des structures, mais que la tâche n’était pas simple et qu’elle demandait «qu’on laisse du temps au temps !…» Cela est particulièrement vrai (séparation des pouvoirs oblige) lorsqu’il s’agit de coopération entre la «Conférence du Rhin Supérieur», à dominante de représentants des états et le «Conseil Rhénan», expression des élus. Et d’annoncer que le «Conseil» allait définir et concrétiser le «profil» d’un poste de secrétariat général susceptible de prendre langue avec le secrétariat général de la «Conférence» pour rapprocher les deux institutions.

De timides solutions de coopération ! – La présidente Kressl s’en félicitera tout en annonçant quelques (timides) tentatives, dans le… respect de leur autonomie respective (!), de rapprochement entre «Conférence» et «Conseil». Les représentants des groupes de travail et des commissions des deux institutions vont se retrouver à l’automne pour définir des agendas compatibles de réunions, des thèmes communs, une intensification des contacts, une approche commune dans la politique de communication face aux médias.

Des réunions communes sur l’un ou l’autre sujet pourront être organisées. Un «logo» commun pourrait être défini de même qu’un site internet commun regroupé ou permettant, à partir d’un même «accueil», un accès aux informations des deux institutions. Il s’agira à travers ces (timides !) petits pas de montrer à l’opinion et au citoyen, parfois déboussolé par la multiplicité des approches, que la coopération transfrontalière constitue un tout cohérent !

Pas de sel lorrain dans le… Rhin ! – Au cours de sa réunion, le «Conseil Rhénan», sur recommandation de ses commissions spécialisées, a adopté à l’intention des gouvernements, un certain nombre de résolutions réclamant une intégration dans l’enseignement d’une éducation à l’environnement, rappelant ses réserves face au projet (peut-être abandonné) de «calcoduc» (conduite pour… acheminer les rejets salins depuis la Lorraine jusqu’au Rhin !), attirant l’attention des pouvoirs publics (financièrement sollicités) sur l’importance des «INFOBEST», dans la mise en oeuvre d’un marché du travail transfrontalier… Une résolution particulièrement élaborée insiste sur la nécessité de promouvoir le bilinguisme «français-allemand» : il met en garde le gouvernement français contre une réforme du collège qui mettrait en danger les sites «bi-langues» en classe de 6ème. L’enseignement de l’allemand en «formule bi-langue» aurait été interrompu en 6ème pour être reprise en classe de 5ème provoquant ainsi une rupture entre le «cycle primaire» (jusqu’en classe de 7ème) et le «collège» (à partir de la classe de 6ème). Devant les protestations, le gouvernement a finalement décidé de ne pas appliquer cette mesure dans les régions frontalières qui, comme l’Alsace, prenant en compte les exigences du marché du travail transfrontalier, mènent une politique d’enseignement des langues sur l’ensemble des cycles !

Si avant de se séparer, les membres du «Conseil» se sont encore penchés sur la «plateforme interactive au service des arts vivants de la région métropolitaine du Rhin Supérieur» (webzine bilingue «szenik»), ils ont fixé la prochaine réunion au 6 Novembre sans étudier (n’est ce pas étonnant ?) les répercussions éventuelles de la réforme territoriale française qui intègrera l’Alsace dans une «méga-région de l’Est – Alsace / Lorraine / Champagne-Ardenne». Ils n’ont pas davantage approché la réforme de l’enseignement en Bade Wurtemberg (sous l’angle de l’enseignement des langues) ni les effets sur les frontaliers des mesures anti-immigration prises par le partenaire suisse après une «votation populaire». Vous avez dit «proximité avec les citoyens» ?…

(1) La «Conférence du Rhin Supérieur» : trouve son origine dans l’accord intergouvernemental de Bonn du 22 Octobre 1975. Elle a été finalisée par l’accord de Bâle du 21 septembre 2000 et porte sur la coopération transfrontalière entre l’Alsace, le Nord-Ouest de la Suisse, le Sud de la Rhénanie-Palatinat et l’Ouest du Bade Wurtemberg. Y siègent les représentants des trois états dont relèvent les régions concernées. Elle est présidée, à tour de rôle, par le Préfet de la Région Alsace, le Préfet du Bas-Rhin, les Regierungspräsidenten (ou Präsidentinnen) de Karlsruhe ou de Fribourg, un conseiller d’Etat des cantons de Bâle-Ville ou de Bâle Campagne.

Le «Conseil Rhénan» a succédé en 1997 (convention de Baden-Baden) au «Groupe de Concertation franco-allemande des élus» qui accompagnait les travaux de la Conférence du Rhin Supérieur : il s’est ouvert aux régions suisses et veut renforcer les échanges d’information, le dialogue, la coopération entre élus des régions concernées : il est, en quelque sorte, face à la «Conférence du Rhin Supérieur» (ex «Commission franco-germano-suisse») qui représente l’exécutif des états, le «contre-poids politique» (le «législatif») créé par les élus. Les deux instances coopèrent.

Il y a une troisième pilier de cette coopération franco-germano-suisse : c’est la «Région métropolitaine trinationale du Rhin Supérieur», créée en Décembre 2010, une sorte de «mini- synthèse» entre les deux premières institutions qui a pour ambition de fédérer société civile, fonctionnaires, élus et experts (dont notamment des scientifiques, des chercheurs).

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