A Stuttgart, pose de la première pierre de la gare « S21 »

L’opposition contre le projet ne désarme toujours pas !

Le coût des travaux de la gare souterraine S21 à Stuttgart pourrait atteindre les 10 milliards d'euros... Foto: Mussklprozz / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Par Alain Howiller) – On dit que François Hollande s’est inspiré du referendum sur le projet « S 21 », le projet de gare souterraine de Stuttgart ; pour essayer de contourner l’opposition qui se manifestait (se manifeste toujours !) contre la construction de l’aéroport de Notre Dame des Landes près de Nantes. 58,9% des électeurs du Bade-Wurtemberg avaient approuvé « S 21 » en Novembre 2011. 55% des électeurs ont approuvé le projet d’aéroport en Juillet dernier. Il reste à espérer, pour les promoteurs du projet français, que le parallélisme s’arrêtera là et que le vieil adage qui veut que « comparaison ne vaut pas raison » se démontre une fois encore !… Ils ne sont pas rares ceux qui en doutent, au vu du laborieux chemin emprunté par S 21 que chacun était persuadé être engagé sur la… bonne voie après l’issue favorable du référendum de 2011.

Ce n’est sans doute pas un hasard si, l’autre jour, lors de la cérémonie de pose de la première pierre de la gare souterraine, ni le maire de Stuttgart, ni le Ministre-Président du Bade-Wurtemberg n’étaient présents à la manifestation laissant le soin de présider au secrétariat d’Etat aux transports et au Président de la Deutsche Bahn venus exprès de Berlin pour rencontrer 300 invités dont la ministre régionale de l’économie, appartenant à la CDU, des conseillers municipaux chrétiens-démocrates et SPD…. On a connu plus prestigieux pour la consécration d’un chantier démarré il y a six ans et qui devrait durer, au minimum, jusqu’à la fin 2020, pour un coût (très) approximatif se situant entre 8 et 10 milliards !

Micros contre cornes de brumes ! – Au micro, Rüdiger Grube, patron des chemins de fer allemands, eut beau s’écrier : « La pose de cette première pierre (en fait une dalle de béton !) est la preuve que ce projet est désormais incontournable… (grâce à sa réalisation) des millions de passagers bénéficieront de trajets plus courts, de liaisons directes plus nombreuses et d’offres élargies, sans compter que la ville profitera de 100 hectares de terrains libérés au centre… Les utilisateurs seront ravis lorsque le projet aura abouti : ce sera un énorme cadeau à la ville !… »

Quelque 300 à 400 manifestants séparés des invités par un cordon de policiers, ne l’entendent toujours pas de cette oreille : généralement, ils manifestent tous les lundis soirs, en ce vendredi d’inauguration, ils tempêtent, crient, meuglent avec de bruyantes cornes de brume, sifflent contre un projet « pharaonique, trop dispendieux » qu’ils n’ont toujours pas digérés. Depuis des années, ils multiplient les recours dans l’espoir d’arrêter des travaux en faveur desquels plaide l’architecte dusseldorfois Christoph Ingenhoven avec conviction !

Un énorme cadeau à la ville ! – Tout d’abord, les travaux de S 21, qui ne portent pas seulement sur l’aménagement d’une gare souterraine mais aussi sur un nœud ferroviaire adapté dont fera partie un embranchement vers l’aéroport et vers Ulm/Munich, offrira une alternative à la voiture dans une ville menacée par la pollution. Ils offriront, au lieu d’une gare en cul de sac, une gare de transit qui accèlèrera, grâce aux « Lignes à Grande Vitesse – LGV » les liaisons avec les grandes villes européennes (dont -note de la rédaction- Paris et Strasbourg dans le cadre de la LGV-Paris-Bratislava). Compétitivité et attractivité seront au rendez-vous, estime l’architecte, sans compter les aménagements urbains que le projet permettra avec les 100 hectares dégagés en surface ; « Le Maire a déjà pris conscience de cet atout qui permettra l’aménagement d’une station de délestage pour le tram, la construction de logements à proximité d’un parc !… Finalement S 21 ne se présente pas si mal que cela », commente de son côté Martin Körner, président du groupe municipale du SPD (ce parti n’a jamais été hostile à S 21).

Pour les opposants qui continuent de manifester tout en protestant contre les travaux réalisés depuis 2010 (notamment sur le parc proche, sur les bâtiments de la gare elle-même notamment), c’est tout particulièrement le coût et la durée des travaux qui nourrissent leur action. Dans les estimations initiales le coût du projet était de l’ordre de 6,5 milliards d’euros : le président des chemins de fer continue de soutenir que cette enveloppe sera tenue. Ce que contestent nombre d’observateurs qui mettent en cause la rentabilité du projet.

Quand la « Cour Fédérale a des Comptes » a des doutes. – La Cour Fédérale des Comptes (Bonn) estimerait, d’après une note non encore rendue publique qu’en intégrant tous les coûts (y compris la charge de tunnels et les taux des intérêts et des emprunts contractés), la facture finale pourrait porter sur 8 voire plutôt 10 milliards d’Euros ! En outre, si l’architecte avoue un retard de deux ans qu’il pense pouvoir rattraper, la « Cour », elle, estime dans sa note que la mise en service technique se ferait, au mieux en… 2023 voire en 2027, sur le plan commercial !

De quoi doucher l’enthousiasme et de rappeler certains autres grands projets qui ont, eux aussi, souffert de dysfonctionnements et de retards. A Hambourg, la « Elbphilharmonie » et ses salles de concert vont enfin pouvoir ouvrir, en Janvier : la première pierre avait été posée en avril 2007 et son coût a passé de 77 à 790 millions d’Euros. Quant au nouvel aéroport « Willy Brandt » de Berlin, dont la première pierre a été posée il y a dix ans et qui devait déjà être inauguré en… octobre 2011, tout porte à croire que l’inauguration une nouvelle fois annoncée pour 2017 sera repoussée à… Mars 2018 : les nouvelles installations devraient accueillir 27 millions de passagers par an pour un coût qui a passé de 1 à… 6 milliards d’euros ! Pas sûr dans ces conditions que les promoteurs du nouvel aéroport de Nantes aient été bien inspirés de chercher un symbole de réussite… Outre-Rhin !

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