Ah, ces écologistes citadins !

Certains commencent à me les briser menu…

« On dirait qu’ ça t’gêne d’marcher dans la boue... » Foto: Koreller / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – Il est parfaitement compréhensible que le fait de vivre en ville, génère de légitimes envies de nature et de grands espaces. Tout aussi légitime est la volonté, pour certains citadins et espérons-le de la majorité d’entre eux, de ne plus subir diverses pollutions, dont celle de l’air ambiant. De plus, les trésors d’ingéniosité et les efforts déployés par certains, pour réduire leur empreinte carbone, forcent le respect et doivent pour le moins donner à réfléchir.

Tout cela est bel et bon, mais les écologistes citadins ont parfois la fâcheuse tendance d’oublier qu’à la campagne, les enjeux et les moyens sont souvent bien différents. Mieux que cela, à les entendre, certains écologistes citadins semblent s’imaginer qu’ils sont les seuls à se préoccuper de la préservation de l’environnement. Comme si, à la campagne, il n’y avait que pollueurs menfoutistes, exploiteurs acharnés de sols dévitalisés et vénaux éleveurs sanguinaires.

Que celles et ceux souhaitant pousser des cris d’orfraie ou de vierges effarouchées, aillent faire leur cinéma ailleurs, car l’auteur de ces lignes, alors qu’il était collégien dans les années 1970, avait su mobiliser les enfants d’une classe de primaire, pour une opération de dépollution des abords d’un chemin vicinal. Or, depuis, il n’a pas connu l’effrayante métamorphose d’un Daniel Cohn-Bendit.

Se déplacer au maximum avec les transports en commun, renoncer à la voiture personnelle au profit de l’auto-partage, n’est possible que dans un environnement au réseau dense. Tant pour les lignes de bus ou de trains, à condition qu’elles soient bien cadencées, que pour les services d’autopartage, à condition que le nombre de véhicules soit suffisant et ces derniers adaptés aux besoins des potentiels usagers. Ce qui, pour l’heure, n’est pas encore le cas.

Lorsqu’on vit à la campagne, dans une petite localité sans gare SNCF, traversée par deux routes départementales, mais dont une seule est dotée d’une ligne de bus, on ne se déplace que sur cet axe-là ? Si on veut recourir à l’auto-partage, on prend le bus pour se rendre au chef lieu de canton ou d’arrondissement, pour y récupérer une voiture qu’on a réservé, on l’emprunte ou précisément la loue pour faire ses courses hebdomadaires, qu’on ramène à son domicile avec la dite voiture auto-partagée, puis on la redépose sur son parking dédié et on reprend le bus pour rentrer ensuite chez soi ? Ma-gni-fi-que !

Les écologistes citadins ont certainement une solution, puisque ce sont souvent eux qui disent à tout-un-chacun comment s’y prendre pour préserver l’environnement et le climat. Ce sont très souvent certains d’entre eux qui, partant de leurs situations et pratiques personnelles, les généralisent pour donner des leçons à l’ensemble de leurs concitoyens. Il y a tout un monde entre vivre à la campagne et sortir de son appartement pour se promener dans un jardin public arboré, au cœur d’une grande ville au réseau de transports en communs très développé.

Les pistes cyclables, il en faut évidemment encore et toujours plus, mais qu’en est-il effectivement à la campagne ? Que celles et ceux souhaitant pousser des cris d’orfraie ou de vierges effarouchées, aillent faire leur cinéma ailleurs, car l’auteur de ces lignes se déplace depuis toujours le plus possible à vélo, façon monsieur Hulot mais surtout pas Nicolas. Cependant, rouler à bicyclette sur une simple bande cyclable peut déjà s’avérer dangereux à la campagne, alors quand il n’y en a pas, quel est le bénéfice-risque ? Le faible bilan carbone, diront les écologistes citadins, sauf s’il y a crémation… Ma-gni-fi-que !

La voiture électrique serait, selon certains écologistes citadins, l’une des solutions pour l’avenir. A ceci près qu’à la campagne, la voiture électrique, quand on doit faire des kilomètres notamment par mauvais temps, ça consomme beaucoup d’énergie produite actuellement par des centrales nucléaires ou thermiques. De plus, une voiture électrique batterie à plat, ça ne se recharge pas comme un véhicule thermique en panne sèche. Autant ce moyen de déplacement est-il adapté aux zones urbanisées, autant reste-t-il très peu sûr à la campagne.

Par ailleurs, lorsqu’on vit dans le monde rural, sur le lopin de terre qu’on a la chance de posséder et le devoir d’entretenir, si l’on veut participer au maintien de la biodiversité, année après année, tailles et élagages gèrent des déchets verts à évacuer régulièrement vers les déchetteries ou les plates-formes de compostage pour les valoriser. Alors là, comment fait-on : autopartage de véhicules utilitaires ? Ma-gni-fi-que !

Tout cela n’est que propos réactionnaires de beauf probablement chasseur, et qui plus est, roulant effrontément carrosse motorisé diesel, diront certains écologistes citadins en poussant des cris d’orfraie ou de vierges effarouchées. Alors n’ayant pas forcément la même perception du monde qu’eux, l’écologiste campagnard leur chantera comme Michel Delpech : « Tu vis sans jamais voir un cheval, un hibou. Tu ne viens plus, même pour pêcher un poisson. On dirait qu’ça t’gêne d’marcher dans la boue. On dirait qu’ça t’gêne d’dîner avec nous. »…

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