Allemagne : le charbon, c’est encore bon
Les faux-semblants du Kohlexit
(Marc Chaudeur) – La sortie du charbon en Allemagne d’ici 2038 ? Les assurances données récemment à la Commission Européenne et au Parlement Européen, mais aussi par le gouvernement fédéral, semblent peu enthousiastes et surtout verbales… Elles sont mises à mal notamment par les événements tout récents qui concernent la Forêt de Hambach.
Tragiquement cocasse, une fois de plus : après les réticences de plus en plus explicites quant au « pas sur la Lune » que promettait voici quelques jours Ursula von der Leyen à la tête de la Commission Européenne, à savoir l’ entrechat sidéral vers une Europe dont la couleur verte ne tiendrait plus ni de la peur, ni de la rage, mais de sa tonalité dominante dans le concert des continents, on en apprend de belles, grâce à un responsable écologiste allemand… L’un des grands symboles du combat écolo allemand, la Forêt de Hambach, entre Cologne et Aix-la-Chapelle, semblait sauvée par des accords « au sommet », après de longs mois d’affrontements (un mort), de manifestations, et d’occupation de ce bois qui est un véritable poumon non loin d’importantes industries.
Cette Forêt, certes, s”est réduite comme peau de chagrin depuis deux siècles : au début du 19eme siècle, elle couvrait 12 000 hectares ; dans les années, 1970, pfuitt, plus que 4200 – et aujourd’hui, elle ne s’étend plus que sur 226 hectares ! Mais elle n’en est que plus précieuse, avec ses diverses variétés de chêne et sa situation à proximité d’importants centres industriels.
Le problème, à Hambach, c’est surtout le lignite. Comme on sait, une source d‘énergie peu efficiente, peu rentable, et très polluante – c’est la forme de charbon la plus sale pour nos poumons. Les mines de lignite devaient manger la Forêt, dont il ne devait rester que bernique. Ce que les écolos ont longtemps réussi à empêcher en jouant aux marsupilamis entre les troncs et sur la canopée. Combat gagné, semblait-il.
Las : vendredi dernier, le vice président de la fraction des Verts, dans un twit, a reproduit un plan tout récent – sans doute extrait de la Aachener Zeitung – où la Forêt de Hambach ressemble beaucoup à la Forêt de Sherwood, ou au fameux village peuplé d’irréductibles Germains (ou de Gaulois, je ne sais plus). Sur ce plan, on voit ce fameux bois entouré de deux villages voués à la démolition… En effet, selon ce plan, la RWE, l’entreprise qui exploite le lignite sur place, projette de raser Morschenich et Manheim, les communes qui jouxtent la Forêt, pour y installer d’immenses trous béants destinés à déblayer les restes du lignite… Ne restera alors plus qu’un mince passage côté sud-ouest vers les zones non exploitées ; les villages en question se situent à l’Est et au Sud. Vendredi dernier encore, le ministère fédéral de l’Economie avait pourtant twitté « qu’aucun village ne serait détruit » !
La décision de la RWE, encore confidentielle, est redoutable pour la survie de la Forêt : en effet, les experts s’accordent depuis plusieurs années maintenant sur le fait que le rapprochement des excavations priverait cette Forêt d’eau – elle en mourrait inéluctablement, bien que peut-être lentement.
Comme l‘écrit le vice-président Oliver Krischer dans son twit, seules des personnes profondément engluées dans la « logique du charbon » peuvent concevoir de telles idées…
Plus largement, on ne peut que se montrer inquiet, car de telles pratiques sont tout sauf rassurantes : la sortie du charbon prévue pour 2038, et qu’Ursula von der Leyen et le gouvernement allemand clament sur les toits – dont le projet pourtant paraît si lent et hésitant aux Verts – semble aujourd’ hui moins que probable.
Que faire, dans ce cas, pour obliger la Commission Européenne et le gouvernement allemand à respecter leurs engagements explicites et renouvelés ? Il faut bien évidemment maintenir la pression, de toutes les manières possibles, et favoriser le développement l’utilisation d’autres sources d’énergie.
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