Allemagne : menaces contre des femmes politiques

Les adresses et data proviennent de la police !

Janine Wissler, l'une des destinataires des menaces de mort Foto :Superbass/Wikimédia Commons/CC-BY-SA/4.0Int

(Marc Chaudeur) – Très inquiétante, cette affaire. Ses implications ne sont pas que ponctuelles ; elles posent un problème général, celui de la protection et de l’étanchéité des informations confidentielles. Et si par exemple, en France, un jour, le RN s’installait au pouvoir ?

Incroyable et inadmissible. Ces jours ci encore, ces femmes talentueuses et brillantes ont reçu des menaces de mort sur leurs ordinateurs ; ces menaces sont signées « NSU 2.0 » : un sigle qui reprend l’appellation du micro-groupe de psychopathes nazillons qui ont commis plusieurs attentats et fait plusieurs morts parmi des personnes d’origine étrangères. C’est devenu presque banal, hélas ; nous mêmes et un certain nombre de collègues ont reçu de tels messages de la caillera nazie. Mais ce qui est vraiment inquiétant, c’est que les messages reçus par ces personnalités de la politique et de la culture allemandes proviennent indubitablement des fichiers de la police…

La très talentueuse Idil Baydar, humoriste et cabarettiste qui apparaît sur les chaînes allemandes de TV, et avec elles les brillantes jeunes politiciennes de gauche Janine Wissler, Anne Helm et Martina Renner, ont ainsi appris que des citoyens allemands souhaitaient leur mort. Ah bon… Avant elle, il y a deux ans déjà, c’est à l’avocate francfortoise Seda Basay-Yildiz que de courageux quidams – les mêmes ? – avaient envoyé des insultes et des menaces. Une femme, une personne d’origine étrangère, une avocate qui a fait son travail  en représentant les familles de victimes des crimes du NSU. Des initiales qui signifient : Underground national-socialiste, un lumpenpack qui a à son passif 10 victimes.

Les données utilisées par ces ” NSU 2.0 ” proviendraient, selon les enquêteurs, d’informations contenus dans les fichiers informatiques de la police du Land de Hesse, dans ces villes principales du Land que sont Wiesbaden et Francfort. En 2017 déjà, un rapport a fait état d’une pêche illégale de données par deux fonctionnaires de police, qui se trouvaient être proches de certains milieux d’extrême-droite. Policiers ripoux, donc, et pourtant…

Et pourtant, aucune enquête sérieuse et dépassant le stade superficiel de soupçons, étayée donc sur des éléments vraiment solides, n’avaient été entreprise. Les deux fonctionnaires avaient écopé, l’un d’une amende, l’autre, d’une diminution de son salaire. C’est tout. Et à cause de la légèreté de ces investigations, on ne sait toujours pas s’il y a un rapport entre ces agissements, les données mêmes prélevées par ces ripoux nazillons et les messages envoyés aux jeunes femmes !

Mardi dernier, en tout cas, le ministre de l’Intérieur de Hesse a expédié le président de la police du Land, Udo Münch, vers une retraite mal méritée. Ce dernier paie pour le caractère très tardif des informations qu’il a fait parvenir aux autorités sur les données personnelles et confidentielles concernant Janine Wissler, à nouveau touchée par les mêmes menaces ces derniers jours – après avoir reçu des menaces voici plusieurs semaines…

Mais au sein même de la CDU de Hesse, dont Peter Beuth est membre, on murmure que le chef de la police n’est qu’un bouc émissaire. Et que l’affaire est grave. Vraiment grave.

Aucun esprit démocratique n’en doutera. Et n’atténuera sa gravité. A commencer par les avocats des concernées. Les Allemands disent depuis plusieurs décennies : « L’œil gauche de la police est ouvert, le droit est fermé… ». Il faut absolument que cela change dès maintenant.

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