Allemagne : un meurtre politique
L'enquête sur le meurtre du Regierungspräsident de Kassel, Walter Lübcke, mène droit dans le marais des groupes néonazis.
(KL) – Dans la nuit du 2 juin, le Regierungspräsident (une sorte de préfet) de Kassel (Hesse), Walter Lübcke (CDU), a été assassiné sur la terrasse de sa maison à Wolfhagen-Istha près de Kassel. Lübcke avait, à plusieurs reprises, défendu l’accueil de réfugiés et faisait l’objet d’insultes et de menaces d’identitaires d’extrême-droite. Les détails que relève la police concernant le suspect arrêté, Stephan E., indiquent que ce meurtre, une véritable exécution, ait un fond néonazi. Le suspect était proche d’un groupe de néonazis militants, « Combat 18 » (les chiffres 1+8 symbolisant chez les néonazis les initiales d’Adolf Hitler, AH, la première et la huitième lettre de l’alphabet).
L’hebdomadaire DIE ZEIT a relevé que Stephan E. a déjà été condamné pour une attaque à l’explosif sur un centre d’accueil de réfugiés et qu’il était au moins proche de réseaux qui avaient soutenu le NSU, le groupe terroriste ayant assassiné 10 personnes dans une série meurtrière. Le nom de Stephan E. avait été cité dans le cadre du procès contre le NSU.
Le néonazi avait également été arrêté lors d’une attaque sur une manifestation syndicale – sa peine de 7 mois de prison avait alors été assortie d’un sursis. Depuis, l’homme s’est fait remarquer comme activiste proche du NPD en Hesse. Donc, une « carrière » de néonazi de plus de 25 ans.
Une trace d’ADN trouvée sur le lieu du crime avait conduit à Stephan E. qui ne s’est pas encore prononcé sur les faits qui lui sont reprochés. Le parquet général fédéral s’est saisi de l’enquête, ce qui ne se produit que rarement et seulement dans des cas qui représentent une menace pour la République Fédérale, donc, des cas de terrorisme.
Un meurtre politique commis par des néonazis en Allemagne, cela rappelle les meurtres de Matthias Erzberger, de Karl Liebknecht, Rosa Luxemburg, et de quasiment toute l’opposition allemande au moment de la prise du pouvoir par les nazis. Si l’enquête devait confirmer ce qu’indiquent actuellement tous les indices, la radicalisation de l’extrême-droite aura atteint une nouvelle dimension. Malgré les déclarations officielles, il existe une étroite proximité entre certains membres de l’AfD qui devient de plus en plus le bras parlementaire de ces groupes d’extrémistes qui gravitent autour de ce parti, autour de la « Pegida » et d’autres organisations ultra-droites. Un meurtre politique commis par un néonazi, cela doit susciter des réactions fortes en Allemagne.
La plupart des groupes et groupuscules néonazis sont connus par les services de la police – il convient maintenant de ne plus les laisser faire, comme c’est souvent le cas, surtout dans les Länder de l’Est de l’Allemagne où la police fait souvent preuve d’un laxisme incroyable lorsqu’il s’agit de crimes commis sur fond de cet extrémisme identitaire.
Cette année, il y aura encore trois élections régionales en Allemagne et ce, dans des Länder de l’Est. Dans les trois Länder, il est possible que l’AfD remporte les élections et puisse ainsi prendre les commandes du gouvernement régional. L’Allemagne, comme d’autres pays européens, se dirige une nouvelle fois vers une catastrophe. Avec ce meurtre politique, cette catastrophe s’est encore rapprochée un peu plus. Et elle se trouve maintenant juste devant nous. Est-ce que cette fois, on réussira à l’arrêter, ou l’Europe se plonge-t-elle dans son prochain grand conflit ?
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