Allemagne : une pandémie sur fond de crise politique

Alain Howiller sur une Allemagne en pleine crise pandémique et qui cherche sa future voie politique. Actuellement, tout semble compliqué de l’autre côté du Rhin…

Avant de prendre sa retraite, Angela Merkel a réitéré son appel à se faire vacciner... Foto: Armin Linnartz / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(Alain Howiller) – Triste et terrible constat, en cet automne de rebond spectaculaire de la crise sanitaire en Allemagne où le nombre de morts victimes de la Covid-19 tourne autour des 100.000. Singulière situation quand même que celle qui s’est installée Outre-Rhin, dans un pays où les dernières élections législatives ont été à l’origine d’une sorte de tsunami politique(1). Le résultat électoral a obligé les partis à se restructurer, soit parce que des élus désavoués ont disparu de la scène politique, soit parce que certains, poussés par le suffrage universel, s’apprêtent à quitter leur responsabilité au sein de leur structure pour devenir… ministres !

Le résultat a surtout conduit la « Groko » à se préparer à céder le pouvoir à une nouvelle coalition : du coup, l’Allemagne se trouve avec un gouvernement sortant qui exerce ses fonctions temporairement de manière commissaire, face à un rebond de virus dont le pic de progression pourrait se situer, selon les spécialistes, autour de Noël pour s’effondrer en… février 2022 !

Quand Merkel joue les prolongations ! – Et voilà Angela Merkel obligée de jouer les prolongations, en attendant la mise en place d’un nouveau gouvernement dont les futurs protagonistes se déchirent encore : les Verts veulent plus de mesures en faveur de l’écologie et de la protection du climat et le FDP bataille pour essayer de mettre la main sur le Ministère des Finances qu’occupe encore Olaf Scholz !

Les négociations entre coalisés sont dures, mais qui croit Robert Habeck, le co-dirigeant des Verts, quand il menace de tout arrêter si son parti n’obtient pas satisfaction ? En attendant, selon un sondage ARD de ce mois de Novembre, 46% des Allemands pensent que les mesures prises pour lutter contre la Covid sont adaptées à la situation, 23% des sondés pensent qu’elles vont trop loin(!), mais 29% (+16% par rapport à Octobre) estiment qu’elles ne donnent pas satisfaction.

Tous unis pour un « jeudi noir »… positif ! – La progression de la pandémie qui laissait entrevoir chez les Allemands une évolution rapide vers une approche négative, les constats faits sur le terrain, l’apparente inaction du gouvernement encore en place, alors qu’Angela Merkel -dans l’attente de sa retraite politique- employait une partie de son temps à faire des visites d’adieu, a provoqué, enfin, une réaction officielle.

Alors que virologues et épidémiologistes, s’appuyant sur le fait que seuls environ 65% des Allemands étaient vaccinés, avaient mis en garde, il y a plusieurs semaines, contre les risques d’une dégradation rapide de la situation sanitaire, le tandem Merkel/Scholz est à l’origine d’une ultime réunion de la Conférence des Ministres-Présidents des Länder et du vote au Bundestag et au Bundesrat (les 18 et 19 Novembre) d’un projet de loi déposé par le SPD, les Verts et le FDP. Il s’agit –tardivement, mais tout de même sous la forme d’une sorte de « black Thursday »!- de mettre en relief, sur fond de crise sanitaire, une prise de conscience et une volonté de nécessaire convergence entre l’Etat, les Länder et les élus des institutions parlementaires. En France, on aurait appelé cette démarche : un cas d’union nationale.

Vaccinez-vous, vaccinez-vous : la mobilisation. – Jusqu’ici, cela n’a pas toujours été le cas : taraudé par des approches contradictoires de fausse proximité, souvent liées à des considérations électorales, les Länder ont affronté la pandémie en ordre dispersé, fédéralisme oblige ! La chancelière -ce qui était assez inhabituel chez elle- avait plus d’une fois pris la parole à la télévision pour inciter ses compatriotes à lutter contre la Covid-19 : elle vient -sans doute une dernière fois- alors qu’elle annonçait la réunion des Ministres-Présidents, d’en appeler à la vaccination. Une intervention symbole d’une véritable mobilisation : du Président Steinmeier à Winfried Kretschmann, de Markus Söder (qui a parlé « d’obligation morale » à Olaf Scholz qui, dans un discours assez terne devant le Bundestag, a affirmé : « Nous devons mettre notre pays à l’abri de l’hiver ! »

Il n’y a guère que les propos de Wolfgang Kubicki, vice-président du FDP, qui ont quelque peu fait tâche, lorsqu’il a lancé : « Nous ne devons pas stigmatiser les non-vaccinés ! » De masques en utilisation de pass sanitaire, de respect des gestes « barrières » en fermetures ou d’accès encadré de lieux de rassemblements (certains marchés de Noël, les manifestations carnavalesques), l’Allemagne se mobilise et les citoyens semblent adhérer, y compris dans les entreprises appelées à développer le télé-travail. « Pourtant beaucoup, vraiment beaucoup de ceux qui ne se sont pas faits vacciner, vont être malades », a souligné le futur chancelier Scholz.

1) Voir eurojournalist.eu du 04.11.2021.

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