Angela Merkel : le prix du pardon !

Alain Howiller revient sur le « mea culpa » de la chancelière allemande. Il est vrai que nous n’avons pas l’habitude de voir des responsables politique s’excuser pour les erreurs qu’ils commettent…

Côté "mea culpa", ces Merkel et Macron ont des approches très différentes... Foto: Kremlin.ru / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Alain Howiller) – Sa repentance a fait la « une » de tous les journaux : Angela Merkel s’est publiquement excusée d’avoir proposé un confinement de l’Allemagne pendant 5 jours lors du week-end de Pâques. A la télévision, elle est même allée jusqu’à demander « pardon à ses concitoyens et concitoyennes » pour une proposition dont elle assume, seule, la responsabilité : « Une faute doit être reconnue comme telle et surtout doit être, avant tout, être corrigée », a-t-elle déclarée à la télévision !

Singulier « mea culpa » et surtout démarche rare et courageuse que celle de la chancelière qui aurait pu s’abriter derrière une décision prise (après minuit !) avec les Ministres-Présidents des 16 Länder. Elle a tenu, simplement, à souligner que si la décision a été prise par la conférence des Ministres-Présidents, c’est à elle seule -qui en a eu l’idée- d’en porter la responsabilité « ès qualité de chancelière » ! Un aveu qui, évidemment, change de l’attitude habituelle des « politiques » de vouloir trouver un… bouc émissaire !

Vent debout contre les « restrictions pascales ». – Finalement, Angela Merkel explique qu’elle renonce à sa proposition, car elle n’était pas réaliste : elle générait une angoisse supplémentaire face à une situation déjà tendue à cause des progrès du virus, les délais de mise en place de la mesure étaient trop courts, les conditions de compensation (salaires, chiffre d’affaires des commerces) n’avaient pas été définies, les autorités religieuses étaient vent debout contre l’encadrement de la fréquentation des lieux de culte.

Cela étant, le recul de la chancelière s’inscrit aussi face à la montée des critiques contre les ratées de la politique anti-pandémie et certains scandales (notamment celui des hommes politiques touchant des commissions sur la vente de masques ou en contrepartie d’actions de lobbying). Le parti chrétien-démocrate est particulièrement touché !

Du coup, certains députés d’opposition (le parti libéral, l’extrême-droite) ont demandé que la chancelière (qui refusera) se soumette à un vote et pose une question de confiance devant le Bundestag. Angela Merkel profitera du débat au Bundestag pour souligner que « la décision proposée partait des meilleures intentions du monde, mais qu’elle ne pouvait pas être bien appliquée ». Elle en profitera pour porter un jugement mitigé sur la conférence des Ministres-Présidents « où nous devrions améliorer notre façon de travailler ».

Le fédéralisme sous le feu des critiques. – N’était-ce pas un appel discret à un examen de conscience sur la manière dont le fédéralisme a suscité quelques affrontements entre le pouvoir central et les Länder, voire les Länder entre eux, lorsqu’il s’est agi de définir une politique coordonnée dans la lutte contre la pandémie ? Une plaie s’est peut-être ouverte au moment où s’engage la campagne électorale pour le renouvellement du Bundestag !

Le « mea culpa » d’Angela Merkel a peut-être permis à la CDU/CSU de regagner, à 28% d’intentions de vote, trois points alors que d’après les sondages, elle en avait perdu 8 précédemment ! L’occasion de rappeler que les chrétiens-démocrates avaient déjà atteint 40% d’intentions de vote et qu’ils avaient ramassé 32,9% des suffrages lors des élections de 2017 !

La « GroKo » sans majorité ? – Les cafouillages de la politique anti-Covid coûtent cher à la « GroKo » au pouvoir, puisque le SPD plafonne à 15/16% : si bien que la coalition actuelle ne retrouverait plus sa majorité, alors que les Verts déroulent à 23%, que l’AFD tourne autour de 10/12%, que le FDP se stabilise à 9% et que Die Linke stagne à 7%. Du coup, une coalition « SPD/Verts/FDP » semblant, en l’état, hors de portée, les Verts et la CDU/CSU ne peuvent plus exclure une coalition avec ce cauchemar pour les seconds : que les écologistes puissent revendiquer le… poste de chancelier(e) ! Le « mea culpa » a un prix, mais 16 ans de chancellerie ont un coût !

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