Spécial Cannes : Armageddon Time de James Gray, entre amertume et espoir

Esther Heboyan a vu pour vous le film de James Gray « Armageddon Time ». En bas de l'article, vous trouverez également son dialogue avec James Gray lors de la conférence de presse.

Anthony Hopkins dans le film de James Gray, Armageddon Time. Foto: © Festival de Cannes

EJ CANNES 2022 klein (Cannes, Esther Heboyan) – Depuis le remarquable Little Odessa (1994) sur la mafia juive ukrainienne de Brooklyn, James Gray s’est essayé à plusieurs registres. Avec Armageddon Time, il décrit l’enfance de Paul Graff (Banks Repeta), un garçon sensible, subtil, observateur et volontiers provocateur. L’action se déroule dans l’Amérique des années 1980 avec ses clivages sociaux, ses discriminations raciales et la montée du conservatisme. Mais l’essentiel se passe au sein d’une famille juive new-yorkaise où Paul fait figure de rebelle, sauf en présence de son grand-père (Anthony Hopkins) qui lui conseille de ne jamais oublier le passé et d’agir en homme juste et digne, en Mensch.

L’école, qu’elle soit publique ou privée (inspirée de la Kew-Forest School dans le Queens), reste le lieu des contraintes et des confrontations. Seul Johnny (Jaylin Webb), un garçon noir livré à lui-même et souvent injustement traité, va procurer à Paul une plaisante complicité et une piste pour une émancipation qui n’aura pas lieu. Anne Hathaway et Jeremy Strong sont des parents tantôt tendres et affectueux tantôt cruels et tyranniques. James Gray a su s’entourer d’une belle équipe d’acteurs.

Inspiré de la jeunesse du cinéaste, le film commence par la rentrée de Paul en classe de sixième. Pour avoir commis un dessin satirique, l’élève est vite repéré et méprisé. En fait, le garçon rêve de devenir artiste et sera ému par un tableau de Kandinsky au musée Guggenheim. À la conférence de presse, Gray dira que pour lui la révélation se produisit grâce à un tableau de Hopper. Lors des escapades qui ne sont pas sans rappeler Les Quatre Cents Coups de Truffaut dont Gray se réclame, New York est filmé avec une minutie documentaire non dénuée de subjectivité. Central Park, Flushing Meadow, l’angle de la 44ème rue, une arcade de jeux vidéos, un cinéma, des rames de métro sont des pèlerinages sur les lieux de l’enfance. Gray ne donne pas vraiment dans la nostalgie, mais crée des séquences émouvantes. Un rythme enlevé porte pleinement l’action pendant 114 minutes. L’attention du spectateur ne flanche jamais.

Selon l’angle où l’on se place, le titre Armageddon Time annonce la fin d’un monde. Paul et Johnny doivent faire le deuil de leur enfance et doivent vivre sans la bienveillance des grands-parents. Un monde nouveau va peut-être s’ouvrir à Paul, mais Gray privilégie l’ambiguïté comme dénouement. La mère, elle, craint que la présidence de Reagan mène à la guerre nucléaire. Le père est dépassé par les agissements de son fils qu’il parvient tout de même à sauver de la débâcle. L’Amérique est peut-être aussi au bord de l’implosion : le pays des rêves qui a accueilli les ancêtres ayant fui les Cosaques, selon les récits du grand-père, peut-il tenir ses promesses ?

Dans cette 75ème édition du Festival de Cannes Armageddon Time, comme d’autres films en compétition dont Les Huit Montagnes, nous offre une réflexion sur l’enfance et comment trouver sa place dans le monde.

Voici le lien vers la conférence de presse avec l’équipe d’Armageddon Time. A 11:08, le dialogue entre Esther Heboyan et James Gray.

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