Au nom de toutes les femmes

La possible inclusion des femmes transgenres dans les lois de protection des femmes, provoque des réactions en Catalogne, et plus largement en Espagne.

Unis dans une même lutte, les drapeaux LGBT et transgenre flottent côte à côte. Foto: Silar / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – La question de l’autodétermination du genre, et donc de se déterminer pour un sexe indépendamment des assignations biologiques, fait débat en Catalogne, à l’occasion de propositions de réformes législatives. Ce qui a récemment conduit Laia Serra, avocate pénaliste experte ès égalité des sexes, droits humains et discriminations, à se fendre d’une intéressante tribune dans « El Diario ».

En avance sur beaucoup de pays européens, l’Espagne et notamment la Catalogne, sont exemplaires en matière de protection des personnes LGBT. Exemplaires, mais forcément imparfaites. L’arsenal législatif peut et doit être revu, comme le souligne Laia Serra. Mais au-delà des textes de loi, ce sont certains esprits réactionnaires qui, opposant une résistance en livrant des batailles d’arrière-garde, empoisonnent le débat. Leur hostilité envers la possible extension aux femmes transgenre, des lois assurant la protections des femmes, le démontre de manière flagrante.

S’accrochant désespérément à la conception aujourd’hui dépassée de l’absolu du sexe biologique, ils qualifient l’identité de genre de simple sentiment. Une toquade ou une lubie, pourrait-on dire en quelque sorte. Mais un prétendu caprice pouvant coûter très cher à la personne qu’il stigmatise. Tellement cher qu’il faut vraiment beaucoup de motivation pour persister dans cette voie.

Ne reculant devant aucun argument retors, ils vont même jusqu’à affirmer que, si la dénomination de femme venait à s’appliquer à des individus non pourvus nécessairement d’organes sexuels féminins à la naissance, certains auteurs de crimes et d’agressions qualifiés de machistes, pourraient instrumentaliser la loi. S’autoproclamant transgenre pour la circonstance, la qualification de leurs crimes et délits ne pourrait ainsi plus avoir un caractère sexiste.

Des arguments absurdes, compte tenu de la violence et du rejet auxquels sont souvent confrontés celles et ceux défiant l’assignation à une identité sexuelle dès la naissance. Absurdes et aberrants, tant la masculinité exacerbée des auteurs de crimes et délits sexistes, ne pourrait un seul instant supporter de se dissimuler derrière une fausse identité transgenre.

Or, depuis 2008, la loi catalane reconnaît que les femmes transgenre doivent être protégées, et le système de protection des femmes n’en a pas été pour autant impacté négativement. Les tenants du système patriarcal, historiquement à l’origine d’un pouvoir masculin hégémonique, se sentent mis en danger par les femmes non seulement cisgenres, mais aussi transgenres, ainsi que par les personnes non-binaires.

Élargir le spectre des femmes protégées les inquiète, au point de dissimuler leur nature profondément machiste pour chercher à instrumentaliser les femmes qu’ils qualifient de « vraies » (c.a.d. déterminées par leur sexe de naissance). Les instrumentaliser en  affirmant qu’elles seules détiennent le monopole de l’identité féminine. Tout cela se résumant à un petit monde bien structuré, bien pyramidal, dans lequel notamment les hommes cisgenres ont l’ascendant sur les femmes cisgenres et les femmes cisgenres l’ascendant sur les femmes transgenres !

Les notions bien réelles d’égalité et de diversité, viennent alors terriblement complexifier le problème de l’identité sexuelle. Ainsi, les représentations simplistes font évidemment plus recette, car elles confinent les individus en déficit d’humanité et/ou d’intelligence, dans un univers rassurant bien que complètement irréel, pour ne pas dire surréaliste. Et cela n’est pas valable que pour l’Espagne, loin s’en faut. Chaque pays européen gagnerait à balayer devant sa porte, sans compter tous les autres…

Les réductions budgétaires des politiques de promotion de l’égalité des sexes, sont plus à l’origine de la persistance de discriminations envers les femmes cisgenres que l’éventuelle inclusion des femmes transgenres dans leurs domaines de compétences. Les multiples attaques de l’extrême-droite contre ces politiques s’ajoutant à leur infléchissement, constituent avec les habituelles phobies et marottes des fascisants, un cocktail détonnant pouvant produire de surcroît, des réactions en chaîne.

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