Aujourd’hui, c’est la « Journée mondiale des parents »

A cette occasion, 3 questions à… Samuel Comblez, Directeur des opérations de l'Association « e-Enfance »

Il est important d'accompagner la "vie numérique" des enfants. Foto: Øyvind Holmstad / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0

(ESET) – A l’occasion de la Journée mondiale des parents, Eset a demandé à Samuel Comblez, Directeur des opérations au sein de l’association « e-Enfance », de commenter le rôle des parents face au risque de cyber-harcèlement sur leurs enfants.

Dans quelle mesure les réseaux sociaux isolent-ils les jeunes et radicalisent-ils leurs relations adolescentes ?

Samuel Comblez : Les jeunes peuvent se sentir seuls, alors qu’ils sont entourés par leurs amis, des camarades de classe ou des parents bienveillants. Cette sensation est d’autant plus foret en période de confinement. Leur sentiment de solitude est bien souvent le résultat d’une difficulté à se lier aux autres et non le fait d’un réel isolement physique. Quand les jeunes utilisent les réseaux sociaux avec leurs amis dans le prolongement de leur vie réelle, leur impression de solitude aura tendance à diminuer. A l’inverse, ce sentiment s’exacerbe si la sphère numérique remplace des interactions sociales inexistantes par ailleurs. Quand les jeunes se sentent seuls, ils cherchent à éviter le rejet de leurs pairs. Ils sont aussi plus sensibles aux comportements négatifs. « Protégés » derrière leur écran et galvanisés par le groupe, ils ont parfois une attitude en ligne qui peut devenir violente. C’est une façon d’exister. La colère provoque une surdité affective dont le jeune peine souvent à se défaire.

Internet devient alors une bulle dans laquelle le jeune en souffrance cherche à se réfugier en réponse à une insécurité ressentie, une faible estime de soi et une incapacité à aller vers l’autre. Les réseaux sociaux peuvent donner l’illusion d’aller mieux par l’interaction qu’ils procurent, mais en réalité, ils augmentent le mal-être en ostracisant celui ou celle qui aurait besoin d’aller vers l’autre au lieu de s’isoler. Développer le lien social, apprendre à lutter contre l’ennui, réinstaurer les conditions du vivre ensemble, inculquer les valeurs de la République, sont autant d’atouts pour une vie numérique épanouie.

Quelles seraient les 2 ou 3 recommandations que vous feriez aux parents qui souhaitent agir sur leurs enfants ?

SC : Les enfants sont de plus en plus jeunes à utiliser les outils numériques. L’entrée au collège est souvent le moment choisi par les familles pour offrir le premier téléphone portable à son enfant. Bien souvent, ce « cadeau » n’est pas accompagné de consignes, de règles de bonne conduite et de prudence qui s’appliquent aussi en ligne. Gérer ses relations sur internet est parfois complexe et mérite un apprentissage. Même sans être expert du numérique, tout parent peut expliquer à son enfant de quelle manière il doit s’exprimer sur les réseaux sociaux, quelles données personnelles il peut transmettre, quelle attitude il doit adopter en cas de mauvaise rencontre. Le parent a aussi beaucoup à apprendre de la pratique de son enfant. Découvrir ses codes et ses usages sera l’occasion d’échanger avec lui pour lui montrer que l’espace numérique n’est pas un monde clos et hermétique qui lui est réservé. C’est au contraire un univers partagé où le parent a aussi sa place. S’intéresser régulièrement à la vie numérique de son enfant et se positionner en tant qu’adulte, permet de rappeler aux jeunes les règles de bon sens, les principes de précaution, de respect de soi et des autres ; autant de règles qui permettent in fine à l’enfant de ne pas être auteur de cyber-harcèlement.

La prévention ne suffit pas toujours et les pièges peuvent être difficiles à identifier. Quand la situation dérape, il est important que les jeunes sachent comment réagir. Là encore, un apprentissage s’impose. Quand on se sent harcelé, la victime cherche souvent à se défendre et à faire entendre raison au harceleur, alors que le premier réflexe doit être de cesser tout contact pour éviter que l’anxiété de la victime attise l’envie du harceleur de poursuivre ses méfaits. Il est aussi important de réunir des preuves pour défendre ses droits, avec des captures d’écrans des messages reçus. Il faut déposer plainte et faire un signalement auprès du réseau social ou du site internet concerné. Enfin, bloquer l’auteur et l’empêcher de nuire, permettra au jeune de retrouver la sérénité dont il a besoin pour continuer à se construire.

Pour terminer, il est essentiel de rappeler aux enfants que le cyber-harcèlement est un délit puni par la loi. Le fait de ne pas signaler une situation dont on serait témoin, peut représenter une forme de complicité, à minima, c’est un cas de non-assistance à personne en danger. Briser la loi du silence et mettre des mots sur les situations de cyber-harcèlement pour alerter les adultes de confiance, sont des réflexes nécessaires à une vie numérique protégée.

Où les parents peuvent-ils trouver de l’aide en cas de risque de cyber-harcèlement ?

SC : Les usages numériques des jeunes évoluent vite et au rythme des nouveaux dangers. Il est parfois difficile de savoir comment agir en tant que parents et où trouver l’aide dont on a besoin. Un numéro national, le 3018, existe pour accompagner les parents dans leur rôle d’éducation sur tous les sujets liés aux usages numériques des jeunes et les dangers potentiels : le cyber-harcèlement, le « revenge porn », le chantage à la webcam, la surexposition aux écrans, les jeux vidéo, l’exposition à des contenus violents et pornographiques, le contrôle parental, le paramétrage de compte sur les réseaux sociaux, le piratage de compte ou encore l’usurpation d’identité

Partenaire officiel du ministère de l’Education nationale dans la lutte contre le cyber-harcèlement entre élèves depuis 2011, l’équipe du 3018 est composée de psychologues, juristes et spécialistes des outils numériques, formés à la protection des mineurs sur Internet.

Le 3018 est à même de prendre en charge les jeunes victimes de violences numériques et leurs parents. Tiers de confiance auprès des réseaux sociaux, il agit immédiatement pour signaler et faire supprimer des contenus illégaux en quelques heures. Le 3018 peut aussi accompagner la victime dans ses démarches auprès des autorités compétentes et l’orienter vers les services spécialisés. Outre ses signalements prioritaires auprès des services de Police et de Gendarmerie spécialisés de la plateforme Pharos, le 3018 est conventionné avec le « 119-Enfance en danger » pour un transfert direct prioritaire des appels. En cas de dépôt de plainte, le 3018 met à disposition de la victime et sa famille, les informations et documents nécessaires pour faciliter la démarche en gendarmerie ou commissariat. Gratuit, anonyme et confidentiel, le 3018 est accessible par téléphone 6 jours sur 7 de 9 heures à 20 heures sur 3018.fr par Tchat en direct, via Messenger et WhatsApp.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste