Autriche : la Cacanie de Kurz

Le nouvel Empereur Sébastien 1er

Le prédécesseur de Sebastian KURZ : l'Empereur Franz Josef Foto: Robert Heilinger / Wikimédia Commons / CC-BY-SA 3.0Unp

(MC) – A l’occasion d’une rencontre avec les pays des Balkans occidentaux qui s’est tenue à Vienne lundi dernier le 19 novembre, on a pu s’apercevoir plus clairement que jamais que l’Autriche, sous la direction de Sebastian Kurz, le jeune dirigeant populiste très ami avec Viktor Orbán, comptait gagner de plus en plus d’importance dans les Balkans et principalement dans les six pays des Balkans occidentaux. Atavisme habsbourgeois ? En tous cas, les liens de l’Autriche avec la Croatie, la Bosnie-Herzégovine, la Serbie, le Monténégro, l’Albanie et le Kosovo sont appelés à se resserrer considérablement.

L’Autriche, et Vienne en particulier, sont la tête de ce vieil Empire qui comprenait pour membres la plupart des pays de l’ex-Yougoslavie, avant que cette dernière ne se formât. L’Autriche considère, pour cette raison, qu’elle conserve en une certaine mesure une responsabilité à l’égard de ces pays : la même au fond qu’à l’époque de Franz Josef, de Robert Musil (l’inventeur du mot Cacanie) et de Ludwig Wittgenstein. Ce passé impérial est, pour des raisons idéologiques, bien plus important aux yeux du Chancelier Sebastian Kurz et de son parti, l’ÖVP, qu’il ne l’était aux yeux du vénérable et chenu pouvoir social- démocrate qui l’a précédé.

Et pourtant, et de plus, il reste dans l’Autriche actuelle un trait essentiel de ce qui motivait le pays de Bruno Kreisky : ce sont ces colonnes de la neutralité autrichienne qu’on a empilées dans l’immédiat après guerre, lorsque grâce à cette neutralité, le pays de Mozart et de la tarte chère à Sacher Masoch assurait une fonction médiatrice très active, vibrionnante et puissamment utile – Vienne était alors pour cette raison même le paradis des espions qui venaient du chaud et surtout du froid…

L’Empereur Sebastian se trouve être, de plus, à la proue du pays qui exerce la présidence tournante du Conseil de l’Europe. Cela renforce son souci de la stabilité des Etats balkaniques, celle de ceux qui participent à l’Union Européenne et de ceux qui n’y participent pas encore. Lundi dernier à Vienne, il s’est une fois de plus engagé aux côtés de Belgrade et en faveur de l’entrée de la Serbie dans l’Union Européenne.

Un point à marquer pour le Chancelier face à la puissante Allemagne : il se montre favorable à une redéfinition des frontières entre Serbie et Albanie qui pourrait régler le problème du Kosovo, et ainsi accélérer furieusement la candidature à l’entrée de la Serbie, pour laquelle la non- reconnaissance du Kosovo est le principal obstacle. D’une pierre, deux coups : Kurz pourrait ainsi se démarquer avantageusement (à ses yeux) de la dangereuse gauchiste Angela Merkel, qui n’y est pas favorable.

Lundi à Vienne, Kurz a répété sa détermination à cet égard, qu’il avait déjà fortement exprimée lors d’une visite toute récente au Kosovo et en Serbie. « Tournons nous vers un avenir prospère ! »  a-t-il clamé. Aleksander Vučić, le président serbe, avait dit en octobre dernier que la Serbie entretenait d’excellentes relations avec l’Autriche, qui la soutient dans ses démarches d’adhésion à l’Union Européenne.

Sebastian Kurz poursuit aussi, bien sûr, des préoccupations empiriques : on connaît son obsession pour les flux migratoires, qu’il espère bien contrôler – et surtout ceux en provenance de l’Est profond, de l’Orient, qui ont déjà à affronter comme on sait les croche-pieds des journalistes hongroises. Et il espère aussi refroidir la criminalité qui prospère au Kosovo : les activités mafieuses, le blanchiment d’argent, la prostitution… Une clarification de la situation dans ce petit pays étrangement rendu indépendant par les institutions internationales, après les crimes de Milošević et des ultras serbes, serait d’un grand secours pour l’Europe tout entière, estime-t-il.

Mais sans doute, comme tout monarque qui se respecte, Sebastian 1er espère-t-il ardemment laisser des traces de son passage ici bas, dans ce pays-charnière entre Allemagne et pays du Groupe de Visegrád.

Rester dans l’Histoire comme l’Empereur qui a changé, et peut-être amélioré, une fois n’est pas coutume, la vie des gens des Balkans.

 

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