Autriche, la maison natale de Hitler ne sera pas démolie !

Ne pas démolir la maison natale d'Adolf Hitler, c'est permettre la poursuite du culte de la personne du führer par des néonazis. Foto: Anton-kurt / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0at

(Par Alain Howiller) – On aurait pu s’attendre à (voire espérer !) un autre dénouement, mais le gouvernement autrichien a finalement tranché, après des années de procédures et d’incessantes volte-face : la maison natale d’Adolf Hitler ne sera pas démolie, elle sera profondément transformée afin qu’elle ne puisse plus servir de lieu de ralliement pour les néo-nazis venant célébrer la date de naissance du führer. C’est un court communiqué du Ministère autrichien de l’Intérieur qui nous en informe : la maison natale d’Adolf Hitler ne sera finalement pas rasée.

Située sur la route principale de Braunau-am-Inn (Haute Autriche), à la frontière austro-allemande, face à la Bavière, la maison (800 mètres carrés) était devenue pour les uns un lieu de pèlerinage pour nostalgiques du troisième Reich, pour d’autres, un objet de curiosité appartenant à l’histoire. Propriété familiale pendant un siècle que les propriétaires s’étaient efforcés, apparemment en vain, de rendre aussi anonyme que possible une maison dont le caractère sulfureux restait, au fil du temps, indéniable !

Du granit pour les victimes de Mauthausen. – Il est vrai que le fait d’avoir placé devant la bâtisse, dans un souci louable de « réparation mémorielle », un bloc de granit portant une inscription à la mémoire des victimes du camp de Mauthausen géographiquement proche de la ville, désignait paradoxalement le… lieu de naissance du dictateur nazi ! Dans un souci de « non-identification », on avait déjà supprimé les pompes d’une station service qui avaient été alignées sur le trottoir devant la maison. Celle-ci avait été maison d’habitation, école, bibliothèque, centre pour handicapés avant d’être fermée administrativement pour défaut de sécurité et pour manque d’adaptation à sa destination.

Une commission de 13 experts avait été nommée par les pouvoirs publics pour étudier l’avenir d’un site inoccupé depuis 2011 ! On avait envisagé d’en faire un musée, un centre de pédagogie informant sur les crimes nazis, des ateliers pour artistes, un nouveau centre pour handicapés. Finalement, la commission prônera une profonde transformation du bâtiment pour lui enlever toute possible référence quant aux racines du lieu. Le gouvernement de Vienne se prononcera dans un premier temps pour une démolition pure et simple.

Ambition estimable, mais fortement perturbée par le fait que le bâtiment se trouvait dans un quartier… classé par les Monuments Historiques ! Certains reprochaient aux partisans de la démolition de vouloir, en fait, cacher quelque chose qui relevait de l’histoire et de la responsabilité de l’Autriche… Les propriétaires, de plus, ont engagé un long combat devant les tribunaux pour empêcher toute solution et, surtout, pour bénéficier d’une indemnisation maximum de l’Etat.

Braunau / Munich – la police emménage ! – Pourtant en 2017, les propriétaires seront expropriés sur décision du Parlement : mais ce n’est que cet été, après une ultime procédure devant le « Obersten Gerichtshof » (Cour Suprême de Justice) qui décide de faire verser 812.000 euros d’indemnisation aux propriétaires (au lieu de 1,5 million demandé !), que les pouvoirs publics arriveront à prendre réellement possession de la propriété ! Et le Ministère autrichien de l’Intérieur a fait connaître ces jours-ci la destination de la maison : un appel d’offres va être lancé au niveau européen pour désigner le (ou les) architecte(s) qui transformeront le bâtiment afin de lui enlever toute possible identification avec son passé douteux.

Le résultat du concours d’architecte sera connu dans les premiers mois de 2020. Le Ministère de l’Intérieur a, d’ores et déjà, annoncé que la maison deviendra commissariat de police et abritera les autorités policières du secteur. Les promoteurs du projet espèrent, a souligné Wolfgang Peschorn, le Ministre de l’Intérieur, ainsi enlever au bâtiment toute possibilité d’être un lieu de commémoration du nazisme. Peut-être faut-il rappeler à ce propos qu’à Munich, la maison où avait habité Hitler a, elle aussi, été transformée en… commissariat de police !

Qu’il me soit permis de conseiller à ceux qui regrettent que la démolition de la maison natale du führer n’ait pu aboutir de faire une trentaine de kilomètres de plus, après avoir traversé l’Inn-frontière, pour rendre visite, en Bavière, à une autre maison natale au destin bien plus sympathique : celle où est né à Marktl-am-Inn l’ex Pape Benoît XVI !