Belarus : le mouvement se poursuit

En l’absence de l'opposante candidate, que va-t-il arriver ?

Hier à Minsk Foto: NEXTA/CC-BY-SA/4.0Int

(Marc Chaudeur) – Grande nouvelle aujourd’hui à Minsk : le départ de Sviatlana Tsikhanouskaia vers l’étranger. Sans elle, le mouvement se poursuivra-t-il ? Autre grande nouvelle : quelques entreprises importantes se sont mises en grève, essayant par là de suivre la consigne de grève générale illimitée jusqu’au départ du dictateur.

Nous donnons aujourd’hui, dans ce qui suit, une traduction de l’excellente synthèse que quelqu’un nous a transmise. Cette synthèse a été concoctée par un blog indépendant de Minsk, NEXTA, sur le canal Telegramm. L’une des seules sources d’information restantes, puisqu’on a coupé le sifflet à Internet dès le 9 août. Voici la traduction :

Sviatlana Tsikhanouskaia est partie pour la Lituanie le 10 août (où se trouvaient déjà, en lieu sûr, ses 2 enfants, objets de menaces à peine voilées de la part des nervis de Loukachenka, NT). Avant que la candidate quitte la pays, les autorités biélorusses lui ont fait lire un discours où on la force à presser ses concitoyens d’ arrêter le mouvement. Dans la vidéo, on peut entendre donner l’ordre de lire à haute voix un texte préparé. Le mari de Sviatlana, Sergeï, alors candidat aux Présidentielles, a été mis en détention en mai 2020.

La police de Loukachenka, l’OMON (à peu près : Détachement Mobile à Vocation Spéciale, NT) occupe tout le pays. Elle ne se saisit pas seulement des manifestants pacifiques, mais aussi des simples passants. Les OMON usent d’une violence brutale et excessive, et causent très souvent de graves blessures à leurs victimes. Et les ambulances ne peuvent suffire pour emmener les trop nombreux blessés. Les malades de la COVID-19 sont purement et simplement abandonnés à leur sort, meurent à l’hôpital ou sont dans un état critique.Beaucoup de personnes saignent abondamment, et sur bien des photos, on les voit complètement recouvertes de bandages. Les médecins disent souvent qu’ils n’ont jamais eu affaire à es blessures du type de elles dont sont infligés les protestataires. Et les OMON ont commencé à mener des charges dans les ambulances mêmes…

Plus de 3 000 Biélorusses sont détenus. Ils sont emmenés dans les voitures des OMON et emmenés vers les locaux de la police, transformés en des espèces de camps de concentration. Sur une vidéo, on peut voir des dizaines de prisonniers face contre terre ; les policiers se tiennent à côté d’eux avec leurs matraques, comme des fascistes. Les auteurs qui ont filmé ces images disent que les OMON battent et torturent les personnes allongées ainsi à terre.

Les OMON n’épargnent ni femmes, ni enfants. Des témoins ont vu de tels policiers traîner une femme à terre par les cheveux. Sur certaines images, on peut voir des visages d’enfants dans les camionnettes de prisonniers. On a aussi vu un adolescent de 15 ans se faire rudement tabasser.

Un manifestant pacifique est mort la nuit du 10 août, victime de la violence disproportionnée déployée à Minsk. Hier, le 11, des gens ont apporté des bouquets de fleurs à l’endroit où il est mort. Ces gens ont été rapidement dispersés par les OMON.

Beaucoup d’usines nationales sont en grève ; elles pressent les autres de suivre leur exemple.

On a vu des véhicules militaires se rendre à Minsk dans la journée du 10 août, et ensuite, des images de ces mêmes véhicules stationnés au centre de la capitale.

Les OMON brisent les portes des domiciles pour poursuivre les manifestants qui s’y cachent ou y sont abrités par les habitants. Il est impossible de former des groupes de quelque importance, parce que les policiers attrapent les gens un par un pour les emmener dans leurs vans. Par ailleurs, la police utilise des grenades lacrymo contre les manifestants. Il est arrivé que l’une d’entre elles passe une fenêtre et atterrisse dans une chambre d’enfants, immédiatement remplie de fumée. L’ambulance est arrivée rapidement.

Les prêtres fournissent une aide précieuse aux manifestants. Ils abritent les gens dans leurs églises. Des prêtres catholiques sont dans la rue, pour soutenir les manifestants. Les OMON leur demandent de se retirer.

Sur un clip tourné à Kyiv (capitale de l’Ukraine), on peut voir voler dans le ciel un drone portant un drapeau blanc-rouge-blanc (le « vrai » drapeau du Belarus qui est devenu celui des protestataires, remplacé par un autre quand Loukachenka a pris le pouvoir. En Ukraine, un mouvement de solidarité assez puissant s’est mis en place, NT).

En conclusion de cette synthèse NEXTA, Eurojournalist se demande bien évidemment comment la situation évoluera, en l’absence de la candidate qui servait de moteur et de motivation pour ce mouvement. Sviatlana Tsikhanouskaia avait créé un superbe tourbillon, une occasion extraordinaire, gâchée par son retrait à l’étranger ; il faut espérer que la population, un peu découragée, pourra continuer sur cette lancée.

 

 

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