Bibliothèques Idéales : le brise-glace de la littérature

D’un coup de lame, le sens se libère

Alain MABANCKOU Foto: Okki/Wikimédia Commons/CC-BY-SA/3.0Unp

(Marc Chaudeur) – Et revoilou ces Bibliothèques Idéales qui illuminent chaque année notre mois de septembre. Pour la 13ème fois déjà, en cette étrange millésime covidien. Du gesticulatoire et de l’ excellent, du blockbuster emphatique et de l’excellence pointue : un panorama assez complet, du moins significatif, du marché littéraire français.

Cette année, le motto est une citation de Franz Kafka : « Un livre doit être la hache qui brise la mer gelée en nous. Voilà ce que je crois. » Une obligation donc, un impératif ? On espère l’impossible : que chacun des livres qu’on nous présentera lors de cette treizième mouture des Bibliothèques Idéales donnera ce coup de lame dans la banquise de notre léthargie et de nos conformismes engourdissants.

Au vu du programme, il y a assez peu de chances que ce soit le cas à chaque fois… Redoutable ambivalence de l’autre métaphore que contient ce texte de Kafka, un peu plus haut : il évoque un « poing sur le crâne ». Si chaque livre est cela, gare : l’ensemble assommera bien plus qu’il ne réveillera… Et c’est parfois le cas, reconnaissons le.

Mais ce véritable Festival que sont les Bibliothèques Idéales strasbourgeoises nous offre une palette chamarrée d’une incroyable diversité jusqu’au 13 septembre, qui va des Zazous à Walter Benjamin (dont on espère qu’il pourra passer le cap et franchir le gap de la lecture publique), d’Olivia Ruiz au cher Jean-Luc Nancy – que nous connaissons depuis 40 ans maintenant ! Merveilleux, cet éventail.

L’entrée s’est faite la semaine dernière dernier en grande pompe et péremptoires moulinets enthovéniens, d’un intérêt… inégal, assurément. Mais il était captivant par moments d’entendre réfléchir, notamment Dorian Astor et Adèle van Reeth, sur les incidences du confinement de ce printemps : qu’était-ce donc que lire au coeur moelleux de cette sorte de semi-incarcération ? Parvenait-on à y rompre la glace susdite ? Affaire de personne, d’engagement de chacun dans le vif de la culture et de bien autres motivations.

Le festival n’a encore fait que commencer, et nous avons pu entendre Alain Mabanckou distribuer les bons et les mauvais points à propos de l’Afrique, et aussi analyser le rapport des Américains (Mabanckou enseigne à l’UCLA) et des Européens au continent de couleur sombre. Et rappeler la genèse des mouvements culturels n…, n…, enfin, de couleur ombrée dans l’histoire culturelle des continents bl…blancs (Rumeurs d’Amérique, Plon). Puis le fondateur de l’ethnopsychiatrie, Tobie Nathan, a régalé l’auditoire de ses dons de conteur oriental : son dernier roman, comme les précédents très autobiographique, retrace l’histoire des juifs égyptiens comme lui-même depuis les années 1930. Magnifique ; surtout l’évocation du monstrueux roi Farouk (La Société des Belles Personnes, Stock).

Eh bien, comme on peut le constater, nous sommes gâtés, à Strasbourg, contrairement à ce que suggèrent les geignements des scrogneugneux. Et cela ne fait que commencer ! Et cela va durer jusqu’au 13 septembre !

Pour le programme précis et complet : http://bibliotheques-ideales.strasbourg.eu/agenda

 

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