Big Brother dans les starting-blocks

Le gouvernement allemand prévoit la mise en œuvre d'une surveillance vidéo totale – malgré des premiers tests peu concluants. L'étau se resserre...

L'époque des libertés individuelles touche à sa fin... Foto: Association for Progressive Communications (APC) / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – Horst Seehofer, ministre de l’Intérieur et de la Protection de la Patrie (ils trouvent de ces noms…) veut combattre l’immigration clandestine et la criminalité avec un système de type chinois – par une surveillance totale partout. L’opposition est choquée, mais saura-t-on encore arrêter « Big Brother » ?

La solution à tous les maux de la société réside pour Horst Seehofer dans la surveillance vidéo de l’espace public, surtout par le biais de la reconnaissance faciale. Si un premier test dans une gare berlinoise a donné des résultats douteux (le système s’est très souvent trompé en identifiant les mauvaises personnes), Horst Seehofer veut désormais équiper les gares et les aéroports de ces systèmes de reconnaissance faciale. Faire quelques pas dans l’anonymat de la foule ? Terminé, tout ça… Les citoyens et citoyennes deviennent totalement transparents et si on ajoute à ce projet celui d’abolir l’argent en numéraire pour obliger tout le monde à payer par des moyens électroniques, nous y sommes alors – l’anonymat n’existera plus.

L’argument avancé par les adeptes de la « surveillance 100% » est toujours le même : « ceux qui n’ont rien à se reprocher, n’ont rien à craindre de cette transparence ». Comprendre : ceux qui aiment l’anonymat, se trouvent déjà sous la suspicion de planifier des actes criminels.

Si on comprend le désir de l’Etat de rendre la vie plus sûre et ce, à un moment où le monde souffre du terrorisme et des attentats commis par des fanatiques, l’abolition des droits individuels ne peut pas constituer la solution. Pour ce genre de mesure, il convient de se poser la question de l’effet de ces instruments lorsqu’ils se trouvent entre de mauvaises mains. Il suffit d’imaginer une seconde le mal qu’aurait pu faire une telle surveillance 100% entre les mains d’un dictateur qui souhaiterait supprimer toute critique à son régime. Avec de tels systèmes, il n’aurait pas été possible, pendant la IIe Guerre Mondiale, pour 7000 Juifs de survivre à Berlin, cachés par des gens compatissants qui leur ont sauvé la vie. Avec la reconnaissance faciale, aucun de ces 7000 n’aurait survécu.

Le danger que représente l’abolition des droits individuels, c’est qu’on ne les retrouve plus après. Les Etats ont tout intérêt à créer ce « citoyen transparent », de préférence avec une micro-puce implantée sous la peau qui permet de surveiller chaque pas, chaque geste, chaque achat, chaque rencontre – mais c’est là que nous aurons perdu l’âme de l’être humain.

Un Etat qui se méfie à ce point de ses citoyens et citoyennes, doit se poser de sérieuses questions. Le meilleur moyen pour pacifier une société ne consiste pas en une surveillance 100%, mais dans une politique qui sert la population et non seulement les « marchés financiers ».

La surveillance 100% peut procurer à court terme le (faux) sentiment d’une sécurité accrue, mais à moyen terme déjà, l’Etat perdra toute crédibilité et suscitera des réactions de résistance. Nos pays se trouvent à un carrefour dangereux : soit on prend la voie de la fin des libertés individuelles, soit on se décide à mener une autre politique, qui reflèterait les intérêts de la population. Dans les deux cas, la « sécurité 100% » n’existera pas. Mais il serait préférable,; à ce moment, de garder au moins les quelques libertés qui nous restent.

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