Brésil : Bolsonaro va dégager ? Pas sûr du tout…

Une règle valable pour tous : agir, et non rêvasser

A Rio Foto: Carnaval.com Studios/Wikimédia Commons/CC-BY-SA/2.0Gen

(Marc Chaudeur) – Les débuts de la Grande Contamination en France et en Allemagne nous ont confrontés à un phénomène parfaitement prévisible : celui de la rêverie utopiste, cette caverne d’Ali Baba emplie des merveilles fantasmatiques du « Touout sera différeeeent ». Différent oui, certes, mais dans quel sens ? – Ce syndrome peut prendre l’aspect de ce que nous décrivions en mars, celui de la Der des Ders : « Promis craché, ce sera la dernière fois que…». Mais les combattants de 14-18, eux, étaient prêts ensuite à… se battre, cette fois dans les domaines civique et politique. Les dirigeants populistes, pas plus que les dirigeants libéraux dont la politique ressemble tant à la leur, ne disparaîtront d’un coup de baguette magique.Une illustration des mauvais espoirs du quiétisme politique dans un pays très loin et pourtant très proche, en un sens : le Brésil.

Des journalistes très optimistes ont affirmé récemment : Bolsonaro est fou, trop fou ; il va dégager. Mais est-ce bien sûr ? D’abord, la folie est-elle un facteur d’échec politique ? Certes non. Ensuite, Bolsonaro est-il vraiment fou ? Peut-être pas… Quelques arguments factuels livrés par nos amis brésiliens nous donnent à réfléchir.

Bolsonaro, comme maintenant aucun autre dirigeant, pas même Donald Trump, se fait le champion du laisser aller les choses en matière de contamination. Le président brésilien a jugé que le COVID-19 n’était qu’une « petite grippe », et s’est répandu en plaisanteries sur les gens qui éternuaient un petit peu. Le président populiste (membre d’une Eglise évangélique)  voit l’impossibilité  foncière de faire respecter vraiment un quelconque  confinement, et engage au moins implicitement les quelques 200 millions de Brésiliens à vaquer à leurs occupations habituelles. Gravissime, non ? Voici quelques jours, il a limogé son ministre de la Santé, Mandetta, qui lui, était un partisan des mesures de confinement à l’européenne ou à l’asiatique.

Et c’est ce qui a déclenché une tempête de protestations dans la population. Non pas dans les classes populaires misérables des favellas, mais dans ces classes moyennes à supérieures qui, de leurs appartements en général confortables ou luxueux, frappent sur leurs casseroles chaque soir pour manifester de manière assourdissante leur refus de la présidence Bolsonaro.

Et Bolsonaro s’en fiche ? Pas tant que cela ; il y a du calcul dans son attitude apparemment aberrante. D’abord, il est évident que dans des milieux comme les favellas de Roi et es autres grandes ou moyennes villes, le confinement est radicalement impossible. Il est possible seulement dans les milieux bourgeois, seuls endroits où quelques rares personnes portent des masques. Et où la femme de ménage (de couleur) ne vient plus faire le ménage et ne gagne plus un sou. Bolsonaro sait aussi qu’il n’y a à peu près aucun lit d’hôpital disponible (10, au maximum!)Alors, pourquoi prendre des mesures impopulaires, qui retireraient des milieux défavorisés toue possibilité de subsistance, même au jour le jour ? Bolsonaro mise sur… la chance : peut-être le COVID-19 s’éteindra-t-il dans ce climat tropical ? Peut-être que les soins à la chloroquine permettront-il de sauver de nombreuses vies humaines ? Peut-être, espérons que…

Et puis, les prochaines élections importantes, c’est dans deux ans et demi. Et l’électorat de Bolsonaro, outre le micro-milieu hyper select autour de lui, qui d’ailleurs est celui, globalisé et nomade, qui a introduit le virus au Brésil,e sont principalement les classes moyennes. Dans ces classes, d’ici deux ans, on peut espérer (c’est ce que fait Bolsonaro) que le problème COVID-19 sera réglé. Alors, où est le problème ?

Ne nous leurrons donc pas, ne rêvassons pas dans de roses nuages utopistes. « Rien ne sera comme avant » ? Certes ; mais si on veut que les choses changent dans le bon sens, il faut les y aider. A cela, seule l’action politique et civique concrète et efficace peut contribuer. Au Brésil, mais aussi sur les autres continents, notamment en Europe !

 

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