Turquie – UE : c’est quoi, un «pays d’origine sûr»?

Une expression se trouve au centre des discussions autour d’un accord entre l’Union Européenne et la Turquie. Le terme «pays d’origine sûr». La Turquie fait partie de ces pays. Vraiment ?

Sur la place Taksim à Instanbul, on se souvient très bien à quel point la Turquie respecte les Droits de l'Homme. Foto: VikiPicture / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(KL) – Dans la quête d’une solution de la question des réfugiés, l’Union Européenne est en train d’interpréter les Droits de l’Homme de manière assez surprenante. Ainsi, le deal prévu avec Ankara, à savoir le renvoi des réfugiés syriens arrivés de manière illégale dans l’Union Européenne (on fait comment pour arriver légalement en Europe en tant que réfugié ?) en échange de l’accueil d’un réfugié syrien dûment enregistré en Turquie, pose problème. A tout le monde, sauf aux responsables européens. Qui considèrent que la Turquie est un «pays d’origine sûr» vers lequel on peut expulser quasiment tout le monde. En faisant fi des violations des droits de l’homme permanents par le régime d’Erdogan. On ferme les yeux devant tout, dans l’unique espoir que la Turquie puisse résoudre un problème que l’Union est incapable de gérer de manière active et solidaire.

Après les attaques du gouvernement turc sur des médias considérés «de l’opposition», comme le quotidien «Zaman», de nombreux journalistes turcs quittent actuellement le pays où la vie d’un journaliste critique ne vaut pas très chère. Ce qui n’empêche pas l’Union Européenne de déclarer que «la Turquie a fait des progrès en ce qui concerne la liberté de la presse». Pardon ? La prise du contrôle de médias par des militaires en uniforme constitue un progrès de la liberté de la presse ?!

D’autres violations des Droits de l’Homme, comme la répression musclée de l’homosexualité, sont aujourd’hui regardées comme «normales» ou «culturelles», la guerre civile que mène Ankara contre la population kurde n’intéresse pas non plus, tout comme la question de l’occupation du nord de l’île de Chypre depuis 1974 ou encore la position peu claire par rapport au conflit en Syrie.

Le deal entre l’Union Européenne et la Turquie fera des victimes. A savoir tous les réfugiés qui ont le malheur d’avoir fui des pays comme l’Irak, l’Afghanistan ou le Pakistan – car ils ne seront pas pris en compte dans ce «troque de réfugiés» – non seulement qu’ils seront envoyé en Turquie si jamais ils ont réussi à arriver jusqu’à l’Europe, mais de plus, ils ne pourront pas faire partie des «réfugiés enregistrés» qui seront envoyés dans l’Union Européenne qui désormais, tel est le plan, n’acceptera plus que des réfugiés syriens. Cette discrimination entre «bons» et «mauvais» réfugiés est inacceptable car de nombreuses personnes doivent fuir aussi ces pays pour des raisons politiques, religieux et autres – et avec l’accord prévu, ces réfugiés seront définitivement barrés de l’accès à l’UE.

Une autre question n’a pas encore été abordée et ne semble pas vraiment intéresser les Européens. Que deviendra-t-il des réfugiés renvoyés en Turquie ? Seront-ils enfermés dans des camps ? Renvoyés dans les pays qu’ils ont quittés ? Seront-ils laissés à l’abandon ?

Ah oui, la Turquie, «pays d’origine sûr». Hier, le Consulat Allemand à Istanbul a été temporairement fermée et le ministère des affaires étrangères a émis un avertissement : «Evitez le quartier du consulat». On craint des attaques terroristes qui elles aussi, sont devenues régulières en Turquie. Quel «pays d’origine sûr»…

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