« C’est sérieux. Très sérieux. »

Dans une allocution inhabituelle, la chancelière Angela Merkel a mis en garde les Allemands. A-t-elle été entendue ?

Normalement, la chancelière ne s'adresse aux Allemands que pour les voeux le soir de la Saint Sylvestre... Foto: ScS EJ

(KL) – Lorsqu’un chancelier allemand s’adresse aux Allemands, en dehors des vœux de fin d’année le jour de la Saint Sylvestre, on sait que ça ne rigole plus. Willy Brandt l’avait fait après son geste inoubliable à Varsovie, Helmut Schmidt après l’enlèvement de Hanns-Martin Schleyer par la RAF, Helmut Kohl pour expliquer l’union monétaire après la chute du Mur et Gerhard Schröder pour justifier la non-participation de l’Allemagne à la Guerre du Golfe. Et maintenant, Angela Merkel au sujet du coronavirus.

Son discours, à la fois inquiétant et rassurant, était clair et constituait le dernier avertissement aux Allemands de respecter les consignes d’hygiène. Autrement, et même si elle ne l’a pas exprimé aussi clairement, l’Allemagne connaîtra aussi le confinement. « Je lance cet appel : respectez les règles. Il est existentiel de stopper la vie publique. Existentiel. » Pour une chancelière qui par ailleurs, ne connaît aucun pathos, même dans des situations tendues, ce discours était très alarmant. Evidemment – la chancelière est en contact permanent avec les responsables du célèbre Robert-Koch-Institut (RKI) qui lui avaient indiqué juste avant son intervention télévisé que si l’Allemagne n’allait pas immédiatement prendre des mesures draconiennes, le pays risquait de voir jusqu’à 10 millions de personnes infectées. On imagine l’hécatombe.

Mais les Allemands ne semblent pas écouter la chancelière. En cette période printanière, les gens préfèrent se balader, faire des BBQ dans les parcs, se retrouver avec les copains : donc, toutes les activités qui sont, en principe, prohibées. Mais la patience de la chancelière touche à sa fin, comme celle d’autres responsables politiques. Ainsi, hier, Markus Söder, ministre-président de la Bavière fortement touchée par le SARS-CoV-2, a clairement expliqué les deux options : « Soit, la population respecte maintenant à la lettre les consignes, soit je vais confiner toute la Bavière. » Le fédéralisme allemand lui donne parfaitement cette possibilité.

C’était un peu « Wir schaffen das ! », pour citer la célèbre phrase d’Angela Merkel à l’occasion de l’accueil massif de réfugiés en 2015, mais aujourd’hui, il y a un petit sous-entendu « si tout le monde participe à cet effort commun. » Mais rarement on aura vu une Angela Merkel aussi sérieuse. A croire que c’est la première responsable politique en Allemagne qui a vraiment compris ce qui se passe actuellement dans le pays.

Pourtant, il est toujours aussi difficile à comprendre pourquoi Angela Merkel ne cherche pas activement des approches communes au niveau européen – elle a fermé la plupart des frontières allemandes, mais si tardivement que le virus est déjà en train de sévir au pays. Pourtant, les plus de 12000 cas confirmés ne constituent que le début d’une évolution qui poussera aussi l’Allemagne rapidement vers les limites de ses capacités hospitalières.

On aurait envie de dire à Angela Merkel qu’elle peut prononcer le confinement sans plus attendre – les gens ne sont pas assez raisonnables pour respecter les consignes, il faut les imposer comme en France où l’on constate que même après avoir pris ces mesures, il y a toujours des petits malins qui s’en font un plaisir de transgresser ces règles. Compter sur une prise de conscience collective, ce n’est qu’un vœu pieu. Mais Angela Merkel n’a pas laissé de doute lors de son intervention – l’étape suivante sera le confinement. L’Europe a de longues semaines étranges devant elle…

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