Cinéma : Un voyage immersif au cœur des forêts de Sibérie.

Nicolas Colle a rencontré l'équipe de tournage du film « Dans les forêts de Sibirie ». Interview.

La solitude "dans la forêt de Sibirie" a quelque chose de zen... Foto: Paname Distribution

(Par Nicolas Colle) – Adapté du roman homonyme de Sylvain Tesson, « Dans les forêts de Sibérie » nous entraine au plus près des rives du lac Baïkal où le personnage de Teddy (Raphaël Personnaz) choisi de se retirer de la civilisation occidentale pour vivre en communion avec la nature. Voilà un film qui nous fait voyager dans des espaces d’une beauté infinie. Un film qui nous émeut autant par la force de son récit que par son lyrisme puissant. Mais aussi, un film qui nous interroge sur notre monde, sur notre époque et sur le besoin d’évasion et de rêve propre à la nature humaine. Le cinéaste Safy Nebbou et le comédien Raphaël Personnaz ont répondu à nos questions.

Safy, quand je vois la richesse des images et la diversité des paysages que vous avez filmés, je me dis que vous avez dû longuement improviser une fois sur place, car vous avez saisi des éléments, comme des tempêtes de neige, que vous ne pouviez pas vraiment prévoir au moment de la préparation du tournage…

Safy Nebbou : Comme nous souhaitions faire un film sur la liberté et la nature, nous ne devions surtout pas nous enfermer dans une préparation qui soit trop maîtrisée. Il y a donc effectivement eu de l’improvisation sur le tournage mais elle a été rendue possible par la précision du scénario qui nous a permis de ne jamais nous égarer. C’est donc en fonction de la météo, du vent ou de la couleur du ciel que nous adaptions les plans que nous souhaitions filmer. Je tenais aussi à ce que le film baigne dans une ambiance solaire et qu’il ait une approche qui soit plus celle du conte et de la vérité que du réalisme.

Suivre un homme, seul, en pleine nature, pendant une heure et demie, aurait vite pu devenir très ennuyeux…Pas du tout, vraiment. Au contraire, avec son souffle, l’œuvre est passionnante et très émouvante.

SN : En me lançant dans l’écriture, j’ai vraiment hésité à aller vers quelque chose de très radical, en isolant complètement le personnage de Teddy au milieu de cette immensité sauvage. C’était d’ailleurs le cas dans le livre de Sylvain Tesson qui est une sorte de journal de bord d’un homme vivant seul, dans une cabane près du lac Baïkal, pendant six mois. Finalement je n’ai pas pris cette option et j’ai choisi d’y intégrer le personnage du fugitif russe avec lequel Teddy va se lier d’amitié car cette relation apportait davantage d’émotion et de romanesque au récit. D’un autre côté, je ne voulais pas faire un film qui s’adresse uniquement à une niche. Je pense qu’on peut faire des films à la fois populaires et exigeants. J’aime qu’un film d’auteur soit également spectaculaire et qu’il puisse créer de l’aventure avec peu de choses pour le rendre accessible à un large public.

Raphaël, c’est assez jouissif de voir votre personnage renoncer à tout pour se perdre au cœur de cette nature envoutante…

Raphaël Personnaz : C’est un personnage qui veut trouver une liberté et une sérénité qu’il ne trouve pas dans sa vie de tous les jours. Il a besoin d’extérioriser les choses d’une manière presque animale, sensuelle mais aussi de se retrouver ou de se trouver pour mieux retrouver les autres par la suite. Rien ne pouvait me préparer à ce que j’allais découvrir et Safy s’est justement servi de cela. Il m’a mis dans cette position où je découvrais cette nature en même temps que mon personnage afin que je puisse me nourrir, peu à peu, de ces paysages. Et puis, ce n’est pas un film contemplatif. Teddy est en lutte avec la nature et ses éléments parfois contraires mais il n’essaye pas de la dresser, comme on peut le voir dans certains films américains. Au contraire, il accepte de ne pas être maître de tout, il s’abandonne complètement. J’ai d’ailleurs, moi aussi, adopté cette démarche là et ça a été quelque chose de très libérateur.

Quand on voit votre filmographie, on sent que vous aimez vous mettre en danger en vous confrontant à des réalisateurs reconnus comme Bertrand Tavernier dans « La Princesse de Montpensier » et « Quai d’Orsay » ou en interprétant des rôles sombres et exigeants comme votre personnage de flic traquant un tueur en série dans « L’Affaire SK1 » ou en acceptant de vous immerger dans des conditions de tournage aussi extrêmes qu’avec ce film là…

RP : À partir du moment où un projet me fait peur, où je vais devoir m’immerger dans un univers qui m’est inconnu et dans lequel je vais devoir me mettre en danger, ça ne fait que renforcer mon envie de l’accepter. La Sibérie n’est, a priori, pas mon élément naturel mais chaque jour que j’y ai passé m’a rempli plus que je ne l’aurais jamais imaginé. Et quand je vois le film aujourd’hui, j’en suis vraiment très fier car il possède une dimension que je n’avais pas forcément ressentie en lisant le script. C’est une œuvre très organique. Un film bio (rires). Mon personnage retrouve ses instincts et sa part d’enfance en étant confronté à la nature. Malgré qu’il soit un jeune urbain, ses réflexes les plus primaires reviennent vite à la surface. Ce qui prouve que l’être humain peut se réadapter à des choses beaucoup plus simples. Il y a là un phénomène presque générationnel, voire sociétal. Un grand nombre de personnes sont en quête de sens, de simplicité et souhaitent se rapprocher de la nature. Nous avons tous besoin de rêver, de nous évader. Que ce soit en lisant un livre, en voyant un film ou en partant à l’autre bout du monde.

Eh bien, sur ces mots si « incitatifs », nous dirons que vous venez de nous offrir là un film qui fera rêver d’aventure plus d’un spectateur à la veille des vacances qu’un bon nombre d’entre eux passera, peut-être au chaud, en oisiveté reposante.

Lien youtube de la bande annonce.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste