Coalition à l’espagnole

Le Gouvernement Sánchez II, un exemple de coalition qui donne à réfléchir...

Le ciel madrilène embrasé de rouge, défiant ainsi le très franquiste Arco de la Victoria - tout un symbole ! Foto: Brayan Alfonso / Wikimedia Commons / CC-BY 3.0

(Jean-Marc Claus) – Depuis l’avènement de la démocratie à la mort de Franco, selon le journaliste et écrivain Jesus Cintora auteur de « La Conjura », l’Espagne expérimente pour la première fois de son histoire un gouvernement de coalition. Plus précisément, le mot « coalicíon » n’est pas étranger au vocabulaire politique espagnol. Pour mémoire, les Gouvernements Suárez et Calvo-Sotelo procédaient de l’Union de Centro Democratico (UCD), coalition devenue parti politique. Par la suite, les Gouvernements González, Zapatero furent, comme le Gouvernement Sánchez I, des coalitions PSOE-PSC associant les partis socialistes espagnol et catalan. L’originalité du Gouvernement Sánchez II, c’est qu’il rassemble plus largement à gauche.

Le Gouvernement Sánchez I, formé en juin 2018 suite à l’adoption de la motion de censure contre Mariano Rajoy (PP) a apporté un peu d’air frais dans la vie politique espagnole. Bien que bénéficiant d’un soutien dépassant le PSOE et le PSC lors du vote de la motion de censure au Congrès faisant chuter ainsi Mariano Rajoy à qui il a manqué alors 7 voix, Pedro Sánchez a constitué un gouvernement de gauche dans la tradition de précédents, c’est à dire avec l’attelage PSOE-PSC. L’air frais précédemment évoqué est venu notamment du taux de féminisation de ce gouvernement porté à 65% (un record mondial), de l’absence de symboles religieux (bible et crucifix) lors de la prestation de serment et la création d’un ministère de la transition écologique absorbant le ministère de l’énergie.

En février 2019, la dissolution des Cortes Generales (Parlement) n’a pas apporté à Pedro Sánchez la même déconvenue qu’à Jacques Chirac en 1997, mais le paysage politique changeait. La montée de l’extrême-droite (Vox) vers laquelle la droite (PP) n’hésite pas à se rapprocher et l’opportunisme du centre (Ciudadanos) glissant à droite, compliquaient sérieusement l’équation. C’est ainsi que le gouvernement Sánchez II, formé en janvier 2020, a dû plus largement rassembler à gauche, d’où l’alliance avec Unidas-Podemos constituant déjà en soi une coalition (Podemos + Izquerda Unida + Equo). Ce qui a amené aux ministères du Travail et de l’Economie sociale Yolanda Díaz Pérez et au ministère de la consommation Alberto Garzón Espinosa deux communistes issus d’Izquerda Unida (IU).

La coalition était une évidence, car la dispersion de la gauche, aurait dès le départ mis en échec le Gouvernement Sánchez II. Ainsi Pedro Sánchez et Pablo Iglesias ont-ils eu l’intelligence politique de travailler à la convergence, plutôt que d’amplifier les divergences. Bien qu’actuellement attaqué de toutes parts, les opposants profitant odieusement de la pandémie de Covid-19, ce gouvernement strictement paritaire femmes-hommes tient bon, alors que l’Espagne paye un lourd tribu au virus. Faut-il tirer de cette coalition inédite quelques enseignements ?

Transposer la réalité politique d’un pays à un autre n’est jamais une bonne méthode, car trop de variables ne pouvant être prises en compte, comparaison devient déraison. Cependant, ce qui se passe ailleurs donne toujours à réfléchir à propos de ce que l’on vit chez soi. D’où l’intéressante thématique de la coalition, par trop étrangère aux mœurs politiques françaises. Dans l’exemple espagnol, il n’est en rien question d’un « en même temps » fumeux  façon LREM générant des associations dignes du bal des vampires, tel que le duo Fontanel-Vetter aux second tour des présentes municipales strasbourgeoises, pas plus que d’un fameux « mouvement gazeux » à la mode LFI dont les propriétés asphyxiantes ne sont plus à démontrer.

Face à la menace d’un retour en force de la droite, différentes composantes politiques de gauche se sont d’abord associées sur une base programmatique. Ensuite, elles ont discuté de la répartition des postes à responsabilité. Ainsi les négociations Sánchez-Iglesias n’ont-elles pas achoppé sur la question des postes à pourvoir, au point de les faire capoter. Ce qui ici nous donne à réfléchir, tant au niveau local qu’au plan national…

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