Colloque EPSAN – Julie entend des voix…
Le colloque soignant qui se tient à l’Epsan Brumath les 7 et 8 Novembre 2024, dont le thème est « Parcours psy : Explorez les voies multiples ! », a pour fil rouge deux vignettes cliniques rédigées pour la circonstance. Nous les publions, dans l’attente des quatre articles de synthèse, qui y feront suite.
(CROC* / Jean-Marc Claus) – Julie, 24 ans, se rend aux urgences accompagnée de sa mère, avec qui elle vit, et qui s’inquiète pour elle.
En effet, depuis plusieurs mois, Julie refuse de sortir du domicile familial. Informaticienne dans une petite entreprise, elle aurait commencé par quitter son emploi, expliquant à sa mère qu’elle y subissait trop de harcèlement de la part de ses collègues. Puis, elle aurait progressivement arrêté de sortir de l’appartement, persuadée que ses collègues poursuivaient leur harcèlement dans la rue, car elle disait les entendre l’insulter continuellement.
Durant l’entretien psychiatrique, il est mis en évidence un contact étrange avec des attitudes d’écoute. Le discours est incohérent, avec de nombreux barrages. Les propos sont délirants, à thématique de persécution, centrés sur ses collègues de travail. La conscience des troubles est absente, Julie adhère complètement à son vécu délirant. Elle s’oppose à toute proposition de soins. Devant ce tableau évocateur d’un épisode psychotique aigu, une hospitalisation en soins contraints est alors organisée.
Le lendemain de son arrivée à l’hôpital, tenant un sachet de ce qui semble être du cannabis, Julie est surprise par les soignants. Elle assure qu’il s’agit de CBD légal, expliquant avoir demandé à l’une de ses visites, de lui en rapporter. Ceci dans le but de mieux supporter le sevrage en cannabis que lui impose l’hospitalisation, car elle consomme habituellement plusieurs joints par jour.
Intervention lors du colloque d’Hervé Javelot, pharmacie, et Dr Thierry Royer, addictologue : « CBD, on fait quoi ? »
Dans l’unité d’hospitalisation, Julie présente plusieurs états d’agitation, en lien avec des angoisses massives et des injonctions hallucinatoires. L’équipe soignante arrive néanmoins à créer progressivement avec elle, un lien de confiance. Ce lien est notamment possible, grâce à l’accompagnement régulier en chambre d’apaisement, qui permet à Julie, de progressivement mieux contrôler son état émotionnel.
Intervention du groupe de prévention et de gestion de la violence en psychiatrie, équipe pluridisciplinaire EPSAN : « Espaces d’apaisement, un atout pour la désescalade de la crise en psychiatrie ? »
L’hospitalisation conclut à un diagnostic de schizophrénie. Très perturbée par cet épisode, Julie a encore du mal à accepter l’existence de cette maladie. Bien qu’elle se sente soutenue, par ses proches et les soignants qui la prennent en charge, elle a l’impression que ce qu’elle a traversé, reste incompris. Julie a été très ébranlée, par les hallucinations auditives qu’elle a vécu, et a besoin de pouvoir échanger à ce sujet, avec des gens qui la comprendraient, des gens « comme elle ». Elle se met alors à fréquenter, l’association des Entendeurs de Voix.
Intervention de Nicolas Heyd, président de l’association « Au bon entendeur », facilitateur de voix, Richard Cribaillet, vice-président, Lionel Rotolo, secrétaire : « Du patient hospitalisé au citoyen aidant, l’approche des entendeurs de voix »
Julie va mieux. Quelques mois après cette hospitalisation, elle a fait une rechute, dans un contexte d’arrêt brutal de ses traitements, qui ont alors été remis en place. Mais depuis, son état est stable. Si elle avait arrêté ses traitements, c’est précisément, parce qu’elle se sentait bien. Il est difficile de se dire que la maladie reste présente, quand les symptômes disparaissent. Cela fait maintenant trois ans qu’elle n’a plus connu de symptômes hallucinatoires, ni de nouvel épisode de décompensation. Julie se demande si son traitement est toujours adapté, et s’il ne pourrait pas être réajusté. Peut-être le diminuer un peu ? Mais elle a bien compris qu’il ne fallait plus qu’elle prenne cette initiative seule, et décide donc d’en discuter avec son psychiatre traitant.
Intervention du Pr Berna : « Déprescrire, pourquoi cette question est d’actualité ? »
* CROC = Comité de Ressources et d’Organisation de Colloques
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