Coronavirus – pourquoi y a-t-il moins de victimes en Allemagne ?

Depuis le début de la corona-crise, l'Allemagne enregistre de nombreux cas d'infection, mais beaucoup moins de morts dûs au SARS-CoV-2. Pourquoi ?

Si le nombre de victimes du coronavirus est encore relativement faible en Allemagne, ceci pourra rapidement changer. Foto: ScS EJ

(KL) – La mortalité causée par le coronavirus SARS-CoV-2 est élevée et se situe, dans la quasi-totalité des pays concernés, aux alentours de 3,9 à 4,0%. Sauf en Allemagne, où la mortalité reste en-dessous de 1%. Comment cela se fait-il ? Les Allemands seraient-ils plus résistants par rapport à ce virus ? La réponse est « non ».

Les chiffres sautent aux yeux. Depuis des semaines, le nombre d’infections du coronavirus augmente fortement en Italie, en Espagne, en France et en Allemagne (et ailleurs, bien sûr). Si le nombre d’infections est presque identique en France et en Allemagne, le nombre de décès causés par ce virus ne l’est pas. Pendant que l’on dénombre des centaines de victimes en France et en Espagne, voire des milliers en Italie, l’Allemagne fait état de 20 (!) victimes et ce, malgré les environ 8000 cas d’infection cliniquement confirmés. Pourquoi cette différence ?

Plusieurs paramètres expliquent ce phénomène qui, selon les experts du Robert-Koch-Institut (RKI) ne durera pas. D’abord, l’Allemagne n’effectue, à la différence d’autres pays, le dépistage post-mortem que dans des cas exceptionnels. Concrètement, cela veut dire que lorsqu’une personne décède en quarantaine à domicile et non pas à l’hôpital, il y a de fortes chances que son cas n’entre pas dans les statistiques.

La deuxième raison pour cette (encore) faible mortalité en Allemagne est la disponibilité d’un grand nombre de lits en soins intensifs dotés d’équipement respiratoire – le ministre de la santé Jens Spahn a fait état de 28.000 lits ainsi équipés, et ce nombre est actuellement encore augmenté en attendant les prochaines vagues d’infection. La possibilité de soigner efficacement les personnes les plus gravement atteintes contribue à baisser la mortalité. La « médecine à plusieurs vitesses » n’est pas seulement un phénomène que l’on observe à l’intérieur d’un pays, mais également entre les pays.

La troisième raison pour ce faible taux de mortalité en Allemagne, c’est que la maladie s’est d’abord déclarée dans une population relativement jeune et en bonne santé. La propagation du virus en Allemagne a commencé lorsque des gens rentraient des vacances de ski dans des régions à risque – des personnes relativement jeunes, en bonne condition physique et pas affaiblie par des antécédents. Cette population avait plus de chances de pouvoir se défendre contre le virus que la population relativement âgée du Nord de l’Italie lorsque le virus y a fait son apparition, ravageant surtout des personnes âgées et en mauvais état de santé général. Maintenant que ce virus se propage de plus en plus, d’autres franges de la population seront touchées et le nombre de victimes augmentera, hélas !, aussi en Allemagne, comme l’ont déclaré hier Annegret Kramp-Karrenbauer, la cheffe de la CDU et le RKI à Berlin qui lui, a augmenté le niveau de risque pour la santé public de « modéré » à « élevé ».

C’est pour cette raison que l’Allemagne est en train d’augmenter ses capacités hospitalières, sachant que la situation actuelle n’est qu’une prise de vue momentanée.

Si naturellement, on ne peut que se réjouir du faible nombre de victimes en Allemagne, ces chiffres sont à double tranchant. Car ce faible nombre de victimes occasionne aussi une sorte de déni dans la population allemande qui ne respecte pas beaucoup les consignes, considérant que ce fléau du coronavirus ne la concerne pas directement. On le voit ces jours-ci : l’Allemagne est assez lente à adopter des mesures analogues à celles de la France, et souvent, les mesures sont transformées en mesurettes de l’autre côté du Rhin. Ainsi, au lieu de fermer les restaurants, le Land Rhénanie du Nord–Westphalie se félicite d’avoir ordonné aux restaurateurs de fermer leurs restaurants déjà à 15h – pour le reste, les restaurants sont toujours ouverts. Et en Allemagne, nous sommes à des années lumière de stopper toute la vie publique par un confinement généralisé comme en France ou dans d’autres pays.

Sachant que les plus fortes vagues de ce virus sont encore à venir, l’Allemagne risque de payer cher son insouciance. Et une fois de plus, on constate que malgré les beaux discours, l’Europe institutionnelle n’arrive pas à fonctionner. Chaque pays prend ses mesures et s’organise à son niveau, et il est fort regrettable de constater que cette approche nationaliste d’un problème mondial ralentit le combat contre ce virus. La seule mesure européenne sera donc la fermeture des frontières extérieures de l’UE pour 30 jours. Et la solidarité ? Et les aides aux plus touchés par ce virus ? Et la concertation sur les mesures à prendre pour encercler ensemble ce virus ? Le soutien pour l’Italie ou l’Espagne où les structures hospitalières n’arrivent plus à faire face à l’afflux des malades, comme c’est déjà également le cas dans le Haut-Rhin en France ?

Non, il n’y a pas de « recette miracle » en Allemagne, et les Allemands ne sont pas des « Übermenschen » qui disposeraient de forces surhumaines pour combattre le SARS-CoV-2. Comme le craint le RKI à Berlin, l’Allemagne expérimentera ces prochains jours, une très forte augmentation des cas mortels.

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