Covid-19 et protestantisme

Le « cluster mulhousien » ayant essaimé jusqu'en Corse et en Guyane, un inévitable besoin d'identifier des coupables, met en accusation une branche du protestantisme.

Quels regards, les réformateurs Melanchton, Calvin, Luther, Zwingli et Hus, porteraient-ils sur le temps présent ? Foto: Litho Fr Wentzel Wissembourg Ji Elle / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – Identifiée comme un cluster, bien involontaire, de la pandémie de Covid-19, l’assemblée pentecôtiste mulhousienne de la Porte Ouverte Chrétienne, passe actuellement sous les fourches caudines de l’opinion publique. En Corée du Sud, une secte d’inspiration protestante est sur la sellette depuis mi-mars. Alors, besoin de trouver des coupables aidant, n’excluons pas qu’il devienne, en France, mal vu d’être protestant…

Mais, nous n’en sommes heureusement pas encore là ! Par ailleurs, tous les protestants ne sont pas évangéliques, et tous les évangéliques ne sont pas pentecôtistes. Ceci, juste histoire d’imager le côté poupées russes du protestantisme, et non de participer à la stigmatisation d’une chapelle. Regardons plutôt ce que Réforme, l’hebdomadaire protestant généraliste, dit de cette pandémie depuis deux semaines. Fondé à la Libération, avec pour toile de fond la Résistance, cet hebdomadaire indépendant des Églises souhaite porter sur l’actualité un regard non exclusivement confessionnel. Dans ses éditions des 19 et 26 mars 2020, la pandémie de Covid-19 y tient évidemment une place importante.

Dès le 19 mars, la question de l’opportunité de la tenue des élections municipales, dans un tel contexte, y et débattue ( Un exercice de démocratie placé sous le « cygne noir » du coronavirus – L’abstentionnisme, facteur de renouvellement de la classe politique ?). L’éthique et la solidarité donnent lieu à des réflexions intéressantes (Faire face aux problématiques sanitaires et éthiques – Le coronavirus, plaie d’un monde en devoir de réinventer des solidarités ? ). Le survivaliste est traité dans un focus très bien documenté (Se préparer à la fin des temps – La fourmi contre la cigale – Bert la tortue et la peur de la bombe – Les scouts, ces survivalistes ? – Le juteux « prepping »). Pour la partie purement spirituelle, deux pasteurs prennent la parole, mais sans pour autant sombrer dans des délires millénaristes (Le coronavirus révèle nos fragilités – A qui la faute ?).

La semaine suivante, dans l’édition du 26 mars, les questions d’éthique reviennent (Une épidémie qui réveille des questions éthiques) et la fragilité de l’unité nationale soulignée (L’unité nationale pour vaincre le Covid-19 s’effrite rapidement). Toujours très actifs dans le domaine social et médico-social, les protestants entendent ne pas rester inactifs face à la pandémie (Un nouveau défi à relever pour les structures protestantes). Aussi une double page est-elle consacrée aux demandeurs d’asile, aux sans-abri et précaires, aux personnes âgées, aux personnes en situation de handicap. Vient ensuite la partie plus spirituelle où sont abordées les questions de la parole et du lien (Religions : quelle parole apporter par temps de confinement ? – La créativité au pouvoir pour faire vivre le lien – La maison, l’église primordiale – Coronavirus : faire Église autrement). Et puis, même si l’homme ne vit pas de pain seulement (sic), le journal en donne la recette (Une activité à faire en famille : Fabriquer son pain).

Réforme, par son refus de s’affilier à une quelconque obédience, conserve une salutaire indépendance, tant vis-à-vis des assemblées dites revivalistes, parfois histrioniques, que des assemblées dites historiques, parfois obsessionnelles-compulsives.  Issu de la Résistance, comme Témoignage Chrétien du côté catholique, cet hebdomadaire se veut engagé et équilibré. Deux qualités difficiles à faire coexister, mais la rédaction y parvient, un peu à la manière d’Eurojournalist. Lorsqu’en temps de pandémie, nous sommes renvoyés inévitablement à des questions existentielles, il s’avère toujours plus intéressant de se mettre à l’écoute de croyants équilibrés dans leur engagement, plutôt que de se « jeter sur le premier Jésus-Christ qui passe ». Ceci n’autorisant en rien la stigmatisation d’une « chapelle », notamment de l’assemblée pentecôtiste mulhousienne, car les premiers responsables de l’extension rapide de cette pandémie se trouvent actuellement au sommet de l’État.

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Outre-Atlantique, l’arrivé de la pandémie de Covid-19, a complètement tourneboulé certains milieux évangéliques, ce qui fera l’objet d’un prochain article intitulé cette fois-ci « Megachurches et Covid-19 ».

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