Cumbre Vieja : pour combien de temps encore ?
Une question lancinante, et parfaitement compréhensible, hante les esprits des sinistré(e)s, mais aucun(e) volcanologue ne peut y répondre.
(Jean-Marc Claus) – Cela fait aujourd’hui deux mois qu’a débuté l’éruption de la Cumbre Vieja, sur l’île canarienne de La Palma. L’étendue de ses conséquences reste inconnue, tant qu’elle a encore cours. Mais fort heureusement, grâce au travail d’InVolcan, ainsi des efforts conjoints des autorités civiles et des moyens de secours, aucune victime humaine n’est à déplorer.
Un exceptionnel mouvement de solidarité, ne se relâchant pas assure un soutien matériel, mais aussi psychologique, aux populations sinistrées. Reste la question du quand tout cela finira-t’il, à laquelle les experts ne se risquent surtout pas de répondre, en pronostiquant une date d’arrêt de l’éruption. Les volcanologues canariens n’ont pas la prétention de connaître les soubresauts des entrailles de la terre, comme le trafic du métro madrilène.
D’autant plus qu’une des plus longues éruptions volcaniques répertories et décrites dans l’archipel depuis le XVe siècle, a duré 2.056 jours de 1730 à 1736 et impacté près d’un quart de la superficie de l’île de Lanzarote. Les récits de l’époque, dont celui du Padre Don Andrés Lorenzo Curbelo, sont impressionnants. Si aujourd’hui, à La Palma, coexistent plusieurs coulées de lave, à Lanzarote se formèrent à l’époque plusieurs cratères, au nombre de 30, alignés à la fin de l’éruption, sur une faille tectonique de 14 km.
Évidemment, il ne s’agit pas là de minimiser l’importance et les conséquences du phénomène volcanique en cours à La Palma. D’autant plus que celui de Tacande, sur cette même île et dans le secteur où se déroule l’actuelle éruption de la Cumbre Vieja, dura au XVe siècle… 17 années. D’où l’impossibilité de prévoir, ne serait-ce qu’approximativement, la durée des événements géologiques actuels à La Palma.
Contrairement aux précédentes éruptions volcaniques qu’a connu l’archipel, en 2021 les moyens de captation et d’analyses de données, ainsi que du suivi en images, permettent de constituer une banque d’information énorme, que les chercheurs actuels et futurs, ne sont pas près d’épuiser. Qui aurait imaginé, lors de l’éruption du Tenéguia à La Palma il y a cinquante ans, la possibilité de faire survoler par un drone la zone impactée, afin de collecter des données ? Bien que remontant à la première Guerre Mondiale quant à leur concept, ces appareils étaient jusqu’il y a peu, réservés à l’usage militaire.
Il en va de même pour la transmission des informations via internet. Qui, il y a dix ans, lors de l’éruption sous-marine du Tagoro au large d’El Hierro, aurait imaginé l’essor de l’emploi de la fibre optique et ses conséquences sur les capacités des ordinateurs et de la transmission des informations par voie numérique ? Ce qui nous place dans une position inconfortable, entre d’un côté le temps de la géologie, et de l’autre le temps du numérique.
D’où le difficile jeu d’équilibriste que les deux imposent à l’humain. Alors qu’une information sur une éruption volcanique en cours, peut parcourir le monde en une fraction de seconde, le phénomène dont elle témoigne peut durer des jours, des semaines, des mois, des années. Or, le temps de l’humain même s’il a, en Europe, heureusement progressé en terme d’espérance de vie ces dernières décennies, n’a aucune commune mesure avec ceux de la géologie et du numérique…
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