De fissures en béance…

Les personnels du MSC Patrícia mis en examen suite à une « pollution accidentelle » survenue au Portugal en 2016, ont été relaxés, mais des questions demeurent...

Le MSC Patrícia. Foto: Antekbojar Antekbojar / Wikimedia Commons / CC0 1.0

(Jean-Marc Claus) – Fin avril, le Tribunal de Setúbal, près de Lisbonne, acquittait les quatre personnels du MSC Patrícia, mis en examen pour le déversement « accidentel » le 2 octobre 2016, de plus de cinq tonnes de fioul dans le port de Sines, sur les côtes de l’Alentejo. La fuite avait eu lieu lors de l’avitaillement du navire en carburant. Six bateaux anti-pollution avaient alors été dépêchés sur les lieux.

Passible d’une amende de 2,5 millions d’euros, l’armateur avait négocié des indemnisations avec la société piscicole Sea Culture appartenant au groupe Jerónimo Martins, l’Administration du Port de Sines (APS). Sommes déjà versées à l’ouverture du procès, où l’État Portugais demandait une indemnisation de 179.000 euros, et le Parquet pointait que les accusés avaient connaissance depuis plus d’un an, de la nécessité de réparer les réservoirs défectueux du navire.

Ce contre quoi l’avocat des quatre personnels impliqués s’est inscrit en faux, suivi par le Tribunal concluant que les fissures desquelles s’est échappé accidentellement le carburant, ne sont pas celles identifiées et réparées précédemment. Donc, le crime environnemental ne pouvant être prouvé, il n’y avait pas lieu de condamner les mis en examens, et ainsi de donner suite à la demande d’indemnisation de l’État Portugais.

Les mis en examen, dont le commandant qui n’est plus de ce monde, n’ont pas à endosser la responsabilité de ce « regrettable accident ». Mais au-delà de ce procès, et plutôt que de chercher à faire payer des lampistes, fussent-ils commandant de bord et ingénieur en chef, c’est du contrôle technique des navires dont il est question. Comment un bâtiment tel le porte-conteneurs MSC Patricia, peut-il naviguer en pleine mer et mouiller dans des ports en ayant des fissures dans ses réservoirs ? Encore heureux qu’il n’est pas un pétrolier ou un chimiquier !

Quoi que, si tel était le cas, ses armateurs l’auraient fait réparer, car la perte de fret n’est en rien comparable avec la perte de carburant. Nous vivons dans un système tendant de plus en plus à l’inversion des valeurs, la fin prévalant alors sur les moyens. Un navire peut prendre la mer lorsque certains de ses réservoirs de carburant sont fragilisés, mais il ne doit perdre ni du temps, ni une part importante de sa cargaison.

Les assurances peuvent couvrir quelques pertes mineures, mais elles ne sont ni bonnes pommes ni bonnes poires ! Quant aux procès suite à des « accidents » tels que celui du MSC Patrícia dans le port de Sines en 2016, il est tout de même pour le moins regrettable que des personnels d’un navire se retrouvent devant un tribunal, quand la responsabilité de son armateur peut être engagée.

Des fissures, il n’y en pas que dans les réservoirs de carburant du MSC Patrícia. La réglementation incomplète, et la non poursuite systématique des transporteurs n’appliquant pas l’existante, sont une béance énorme. Mais au-delà de ce cas particulier, c’est des effets pervers de la mondialisation dont il est ici question. Car que transportent des porte-conteneurs, tel le MSC Patrícia ? Des biens de consommation que nous ne produisons pas ou plus sur notre territoire.

Et quand un méga porte-conteneur, comme récemment l’Ever Given, bloque un axe de circulation très emprunté, c’est la panique à bord du Vaisseau Terre ! Quoi que, à y regarder de plus près, l’échouage temporaire de l’Ever Given, n’a pas provoqué les mêmes angoisses dans la classe dite développée du Vaisseau Terre, que dans les classes dites en voie de développement et sous-développées…

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