De Hambourg à Stuttgart…

Les grands chantiers peinent à sortir de terre !

Le chantier de "S21" coûtera plus de 11 milliards d'euros au lieu des 3,5 milliards prévus. Si jamais les 11 milliards suffiront... Foto: Jacques Grießmayer / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(Par Alain Howiller) – Puissance économique s’il en est, l’Allemagne semble éprouver quelques difficultés à gérer et à mener à bien ses grands chantiers. Dans un passé récent, des retards importants, accompagnés de dépassements conséquents de crédits, ont pu être relevés sur la menée à bonne fin de réalisations autoroutières ou ferroviaires. Exemples : 2 ans de retards pour la mise en service des 1,8 kilomètres du métro dit «du chancelier» qui relie la gare centrale de Berlin à la Porte de Brandebourg et un coût supplémentaire de 90 millions ; 7 ans de retard à la mise ne service de la gare réaménagée de la capitale avec un surcoût de 900 millions.

Actuellement, trois chantiers s’inscrivent dans le même ordre de dérives : la philharmonie de Hambourg, familièrement baptisée «Elphi», le nouvel aéroport «Willy-Brandt» de Berlin et… l’ensemble du projet «S21» qui accompagne la gare souterraine de Stuttgart !

A Berlin – un aéroport menacé ! – Pour Hambourg, où on espère voir les nouvelles installations inaugurées l’année prochaine, le retard du chantier est de 6 ans au moins et le dépassement du devis initial de l’ordre de 900 millions. Au nouvel aéroport de Berlin, qui devait être inauguré le…. 3 Juin 2012, les malfaçons sont telles que personne, en l’état, ne veut (ne peut ?) avancer une date pour la mise en service que certains se risquent à situer en 2017 ! Si on imagine le retard enregistré (5 ans) pour cette réalisation gigantesque, on a quelque peine à digérer le surcoût entraîné par cette installation : 3 milliards d’Euros !

Lors d’une récente «journée des portes ouvertes» (une première qui ne serait pas renouvelée avant l’année prochaine !), auxquelles plus de 30.000 personnes participèrent, aucun responsable n’a pu certifier que «S 21» respecterait bien la date (2021) initialement prévue pour la mise en place totale des installations complexes.

Un TGV Paris-Strasbourg-Bratislava. – Rappelons que l’ensemble du projet porte sur la transformation de la gare actuelle de Stuttgart (pour partie classée monument historique), véritable terminus en cul de sac sur la «magistrale» Paris-Strasbourg-Stuttgart-Munich-Salzbourg-Vienne-Bratislava, en gare souterraine relais et nœud ferroviaire pour le trafic sur une ligne à grande vitesse. Outre la gare souterraine, le projet prévoit une liaison rapide entre la ville et son aéroport, l’aménagement d’une centaine de kilomètres sur le tracé Ulm-Munich, le creusement de plusieurs tunnels, l’aménagement en surface d’une centaine de hectares qui deviendront centre commercial, «cluster pour des entreprises innovantes de haute technologie», et enfin, logements dans une ville, encaissée, qui en manque cruellement !

D’entrée de jeu, le projet a mobilisé contre lui d’abord les écologistes qui craignaient que les sources souterraines et le sous-sol en gypse soient menacés par les travaux de creusement et que le paysage ne soit défiguré dans les vallées environnantes. Il a mobilisé aussi des adversaires de la «bonne société bourgeoise» qui, tout en intégrant les arguments des «Verts», avançaient les risques d’atteinte aux paysages, la spéculation foncière et immobilière, le grignotage du parc urbain proche et l’abattage de ses arbres. Les uns et les autres, reprenant la tradition des fameuses manifestations du Lundi («Montagsdemo») initiées à Leipzig par les opposants aux autorités de la DDR, se retrouvèrent pendant des mois -voire des… années puisque aujourd’hui encore ces manifestations se poursuivent régulièrement- pour manifester contre les porteurs du projet : le Land, la ville de Stuttgart et, bien sûr, la Deutsche Bahn.

Un referendum, pour rien ?… – Aujourd’hui, malgré les portes ouvertes, malgré de nombreuses décisions de justice qui validèrent le projet, malgré un referendum qui a mis en relief que plus de 60% des votants (y compris une majorité à… Stuttgart même !) approuvaient «S 21», les opposants continuent à défiler pour essayer de peser sur la menée à bonne fin du chantier. Ils continuent à avancer comme arguments le coût de l’opération (dépassement d’au moins 3,5 milliards par rapport aux prévisions), les retards dans les travaux, l’impact sur la santé des chantiers (bruit, travail de nuit qui a déjà conduit à offrir des séjours en hôtel à certains riverains incommodés, forage profonds qui risquent de déstabiliser le terrain voire même de menacer les fondations de maisons proches). Les opposants mettent en cause le fait qu’un nombre croissant de maisons doivent être surélevés par des injections de béton et que le coût des travaux déjà réévalués de 3,5 milliards à 9,8 milliards, pourraient bien atteindre, au final,… 11 milliards !

Quand Cohn-Bendit conseille Hollande ! – Le chantier, engagé comme il l’est, ira certainement au bout de son chemin : mais ceux qui croyaient que les procédures -y compris le referendum qui a approuvé «S 21»- mettrait un terme aux contestations, se sont lourdement trompés. A méditer par ceux -dont apparemment Daniel Cohn-Bendit- qui ont conseillé à François Hollande d’utiliser le referendum (comme à S21) pour essayer de trouver une solution à l’épineux problème que pose le projet de construction de l’aéroport de Notre Dame des Landes. Un nouveau piège pourrait bien s’ouvrir à cette occasion !

De Hambourg à Berlin en passant par Stuttgart, les difficultés posées par les grands chantiers allemands posent le problème de nos démocraties modernes : l’impréparation des élus à prendre, en toute connaissance de cause voire de compétence, des décisions qui, souvent, les dépassent d’un point de vue technique ou financier. Un vrai défi démocratique à la mesure des sociétés d’aujourd’hui.

1 Kommentar zu De Hambourg à Stuttgart…

  1. HEMMERLÉ Pierre // 16. November 2017 um 17:58 // Antworten

    Putain, arrêtez de faire la publicité pour les salopards de 68.
    Pierre HEMMERLÉ

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