De l’arrogance ou de l’incompréhension de la France?

L'exposé sur la France proposé par l'ancien éditeur de la FAZ Günther Nonnenmacher jeudi dernier à l'Université de Freiburg, se voulait intellectuel, académique et amusant. Mission non accomplie.

Le Professeur Nonnenmacher à l'Université de Freiburg, lors de son exposé sur la France. Mouais. Foto: Eurojournalist(e)

(KL) – Quel grand personnage, ce Professeur Docteur Günther Nonnenmacher, LE grand journaliste contemporain de l’Allemagne, dont les éloges présentées par le Professeur Daniel Jacob de l’Université de Freiburg duraient environ un quart d’heure. Que des qualités, en tant que journaliste, éditeur, auteur, grand observateur du monde et bien entendu, d’universitaire – quelle chance d’avoir eu un tel intervenant pour la soirée organisée par l’Association de Soutien du Centre Français de l’Université de Freiburg ! Pourtant…

«Bien entendu», commençait Günther Nonnenmacher son exposé intitulé «Frankreichs Uhren gehen anders» (ce qui donne à peu près : «les horloges en France tournent autrement qu’ailleurs»), «ce que je vous dirai, ne se dirige en aucun cas contre la France» et il fit bien de commencer ainsi. Car ce qui allait suivre, donc son discours, était un mélange d’arrogance intellectuelle, de pronostics politiques hasardeux et de «French Bashing» académique, et ce, dans quasiment tous les domaines.

En vantant les avantages du «dialogue social» en Allemagne, Günther Nonnenmacher estimait que la France n’a jamais eu la chance d’arriver à une telle entente sociale entre employeurs, syndicats et la population active – il a probablement oublié que le «modèle allemand» est secoué depuis longtemps par des grèves, surtout dans le domaine des transports. Cheminots, pilotes, personnel de cabine – en deux ans, ces corps de métier ont réussi à totaliser environ 25 grèves. Sans parler des nombreuses grèves dans d’autres domaines, sans parler du prix de ce «dialogue social» qui laisse, en Allemagne, 15% de la population en rade – ces 15% vivent en dessous du seuil de la pauvreté. Un modèle que la France devait copier pour être heureuse ? Certainement pas, mais Günther Nonnenmacher arrivait toutefois à se moquer des mouvements sociaux en France, qui pour lui, relèvent plutôt du folklorique, comme les manifestations d’agriculteurs ou bien, les Bretons qui barrent des péages d’autoroutes.

Concernant la politique européenne, l’orateur soulignait ensuite que la France continue à refuser de «se laisser dicter sa politique budgétaire» par Bruxelles – comme si l’Allemagne soumettait sa propre politique budgétaire au bon vouloir bruxellois. Mais lorsque l’on regarde un pays voisin comme le petit tourbillon de la classe, certes sympathique, mais difficile à gérer, on préfère logiquement qu’il se soumette à un contrôle, pourquoi pas bruxellois.

Les considérations politiques concernant les élections régionales à venir ainsi que les élections présidentielles en 2017, montraient que l’ancien grand journaliste se voit aujourd’hui dans le rôle d’un «elder statesman», rôle qu’il remplit mal. En citant les sondages concernant les élections régionales en PACA ainsi que dans la région Nord-Picardie, il indiquait la montée du Front National, en expliquant avec grande maîtrise la défaillance des partis traditionnels. D’accord, mais la lecture «Sarko et Hollande étaient nuls, donc, c’est logique que le Front National monte en puissance», est un peu léger pour un «elder statesman». Son prognostic pour 2017 – «il se peut que Marine Le Pen totalise au deuxième tour 30%, peut être 40% des votes», est assez hasardeux, n’étaient en rien argumenté et valait donc pas beaucoup plus qu’une discussion au bistrot du coin.

Malgré les applaudissements polis à la fin de son exposé, il reste le constat que de telles soirées ne constituent, malheureusement, qu’une perte de temps. L’année dernière, les organisateurs avaient invité la ministre-présidente de la Sarre, Annegret Kramp-Karrenbauer, qui elle, avait effectivement beaucoup de choses à dire. Ce qui ne fut pas vraiment le cas pour le Professeur Docteur Günter Nonnenmacher. Dommage.

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