Des milliers d’Alsaciens ont dit NON à un fusion.

Et maintenant, se pose la question : que va faire le gouvernement ?

Le rouge et blanc a la même valeur que le noir et blanc breton, estime Alain Howiller. Foto: Paralacre / Wikimedia Commons / CC0

(Par Alain Howiller) – Les Alsaciens n’aiment pas manifester et ce n’est pas un hasard si près de 60.000 d’entre eux ont préféré utiliser internet pour adhérer à la proposition de Jean Rottner, le Maire de Mulhouse, de refuser toute fusion avec des voisins pour privilégier un Conseil d’Alsace regroupant les trois collectivités alsaciennes : Conseil Régional, Conseils Généraux du Haut-Rhin et du Bas-Rhin. Dès lors, ce n’est pas un hasard non plus si les milliers d’Alsaciens venus manifester le 11 Octobre à Strasbourg, contre les projets de fusion de l’Alsace avec l’ensemble Champagne-Ardenne-Lorraine voire la Lorraine seule, n’ont pas été aussi nombreux qu’espéré bien que, compte tenu de la traditionnelle retenue alsacienne, le nombre des manifestants (entre 7 et 10.000 selon les comptages) ait été impressionnant.

Il n’y a eu, pour l’essentiel, que trois manifestations à avoir réussi à mobiliser les Alsaciens sur le pavé strasbourgeois : celle du 22 Novembre 1984 qui protestait contre la décision du Premier Ministre Laurent Fabius de transférer à Grenoble un instrument de recherche (le «Synchrotron») pourtant promis à l’Université de Strasbourg, celle (le 14 Septembre 1996) contre la perspective de l’implantation de DHL à l’aéroport de Strasbourg-Entzheim, celle enfin (monstre, parce que nationale) organisée le 29 Mars 1997 contre la tenue à Strasbourg du congrès du FN. Il n’était sans doute pas inutile de situer la démonstration du 11 Octobre dans le contexte d’une rareté «manifestationnelle» marquée à chaque fois par l’absence de ces violences et dégradations trop souvent relevées ailleurs !

La région Alsace n’est pa s seule à protester ! – Ils étaient donc plusieurs milliers à protester, ils sont, aujourd’hui, plus nombreux encore à s’interroger sur ce qui va se passer maintenant : que va devenir le projet de réforme territoriale contre lequel l’Alsace n’est pas seule à protester ? La Région Nord ne souhaite pas que la Picardie lui soit associée. Le département de la Loire Atlantique souhaite quitter la Région Pays de la Loire pour être intégrée à la Bretagne qui veut rester… seule. L’union à trois entre l’Aquitaine, le Limousin et Poitou-Charentes ne satisfait personne. La région Midi-Pyrénées ne veut pas être fusionnée avec Languedoc-Roussillon etc…

Les ambiguités d’une réforme dont on ne connaît finalement que le découpage territorial sans connaître ni les pouvoirs, ni les structures, ni même les ressources, ont exacerbé les oppositions dans une France hexagonale où pourtant 21 régions sur 22 sont dirigées par le parti au pouvoir.

Contrairement à ce que certains veulent faire croire (ou affectent de croire), l’Alsace n’est pas seule à protester contre une réforme qui reste opaque et pourquoi les «autonomistes bretons» qui veulent protéger leur isolement, absorber le «département de la Loire Atlantique», brandir leur drapeau Blanc et Noir «Gwen-ha-Du» et sortir les «bonnets rouges» pour avoir raison, seraient-ils plus convenables («salonfähig») que les alsaciens ?

Le poids des autonomismes ! – Parce que ils continuent à sentir un souffre que leur évolution récente n’a pas pu faire oublier et encore moins pardonner, un souffre né de leur origine sous (et contre) l’Empire allemand de Guillaume II, à leur renaissance séparatiste sous la République d’après 1918, de la compromission, hier, de certains d’entre eux (comme en Bretagne d’ailleurs) avec le régime nazi ou, plus récemment, avec l’extrême droite française.

Pour Robert Hertzog, professeur émérite de l’Université de Strasbourg, «l’autonomisme politique était ici invisible, inaudible, sans assise populaire et sans débouchés électoraux parce que il ne sait ni définir ses fondements, ni dessiner un projet. Voilà qu’on lui administre -(note de la rédaction : à travers l’affrontement pour -ou contre- les diverses formes de fusion)- chaque jour une dose de vitamine et qu’en retour, il alimente la propagande anti-alsacienne par des caricatures provocantes.» (Ami Hebdo, son article du 12 Octobre intitulé : «L’Alsace unie : pour les Alsaciens, pour tous les Français, certainement pas contre les Lorrains !»).

Pourquoi ces caricatures inutiles ? – J’ai été confronté Lundi soir, lors d’une conférence sur la «réforme territoriale» au Centre Culturel Français de Karlsruhe, à l’expression d’une de ces caricatures : «Mais pourquoi la riche Alsace veut-elle rester seule et ne pas partager avec d’autres régions ?» La dame qui m’a posée cette question aurait pu être relayée par ceux qui pensent (non sans arrières-pensées électoralistes) que l’Alsace unie c’est ringard, cela sent le repli identitaire, c’est tourné vers le passé (allemand peut-être ?), cela implique quelques relents d’extrême droite, cela marque même une certaine arrogance méprisante envers les éventuels partenaires de la région fusionnée (à défaut d’être fusionnelle !).

La situation d’aujourd’hui confrontée à une situation économique contre laquelle l’Alsace se bat, l’affirmation de son ouverture culturelle et économique, me dispensent de revenir aux arguments avancés par ceux qui affirment une identité alsacienne moderne, sans laquelle ceux qui prétendent le contraire ne pourraient pas se.. tirer une balle dans le pied !

Et maintenant, que va-t-il se passer ? – Mais que va-t-il se passer maintenant avec la réforme territoriale ? Les défenseurs du «Conseil d’Alsace» devraient être reçus par François Hollande pour faire valoir leurs arguments : le président a promis cet entretien, le 3 Août dernier, en marge du sommet Franco-allemand sur la commémoration dans les Vosges, de la Première Guerre Mondiale.

Cet entretien infléchira-t-il l’approche présidentielle ? Rien n’est moins sûr : peut-être rejoindra-t-il la position de son Premier Ministre qui semble marquer une préférence (prudente !) à une région Lorraine-Alsace, avec comme capitale Strasbourg !

Le projet de loi adopté, à la veille des vacances d’été, par l’Assemblée Nationale et créant une région «Alsace-Lorraine-Champagne Ardenne» doit être débattu, à partir du 28 Octobre, au Sénat. Ce dernier adoptera le projet où l’amendera ? Il se verra saisi, sans doute, de deux projets d’amendements : l’un, d’origine lorraine, proposera qu’on crée une région «Lorraine-Alsace», l’autre, d’origine alsacienne qui proposera un «Conseil d’Alsace», composé des trois collectivités réunies. Le texte amendé partira a à nouveau à l’Assemblée qui l’approuvera (ou non). En cas de désaccord entre les deux assemblées, une commission mixte paritaire sera réunie qui essaiera de préparer un texte de compromis. Un texte (de compromis ou non) sera à nouveau soumis à l’Assemblée qui aura le dernier mot : la «messe» sera dite à moins que le gouvernement, sur injonction du Président de la République, fasse évoluer le projet de loi avant qu’il ne soit définitif.

2 Kommentare zu Des milliers d’Alsaciens ont dit NON à un fusion.

  1. Oui, bon! Une seule question me taraude: qu’est-ce qu’une identité alsacienne Moderne?
    Trop souvent d’accord avec Alain Howiller, aujourd’hui il me fait tiquer.

  2. C’est simple:c’est ce que je défends dans tous mes ouvrages.Est alsacien celui qui vit ici,peu ,importe où il est né et si oui,ou non il oratique le dialecte.Il n’y a pas d’ethnicisme,m bici

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste