Désescalade à l’espagnole

Dans certaines communautés autonomes espagnoles, le 11 Mai 2020 est un jour particulier : le passage à la Phase 1 de la désescalade.

Bercelone, comme une grande partie de la Catalogne, restera encore en "Phase 0". Foto: Chabe01 / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – Plutôt que de déconfinement (desconfinamiento), vocable bien moins souvent employé, il est ici surtout question de désescalade (desescalada), terme signifiant un assouplissement des mesures endiguant l’épidémie de Covid-19, et par conséquent ne laissant en rien imaginer que d’un jour à l’autre tout devient possible, pour tout le monde et partout. Désescalade négociée avec les territoires, comme s’y était engagé le 6 mai 2020 le Premier Ministre Pedro Sánchez devant le Congrès des Députés, lors du vote de prolongation de l’état d’alerte.

Salvador Illa, ministre de la santé, associé à Fernando Simón, le directeur du Centre de Coordination des Alertes et des Urgences Sanitaires (CCAES), l’ont annoncé lors d’une conférence de presse le 8 mai 2020 : la désescalade en quatre temps se poursuit. Ainsi, 51% de la population du pays passe de la Phase 0 à la Phase 1. Une carte interactive disponible sur le site de la RTVE indique la situation de l’ensemble du territoire.

Actuellement, certaines communautés autonomes restent en Phase 0, d’autres passent en Phase 1. Mais, chose intéressante, certaines comportent des territoires restant en Phase 0 et d’autres passant en Phase 1. Ce qui fait toute la différence avec la France et se rapproche de la méthode mise en œuvre en Allemagne. Évidemment, cette désescalade fait débat car les enjeux, tant en terme de santé publique que de reprise économique sont énormes.

Ce plan de désescalade a été activé le 4 mai 2020, faisant passer le pays d’un confinement rigoureux à un assouplissement appelé Phase 0 et dite préparatoire. Ce qui permit alors l’exercice d’activités physiques individuelles et la promenades avec les membres d’un même foyer dans différents créneaux horaires en fonction de l’âge, mais aussi la reprise de l’entraînement des sportifs professionnels. Ceci, toujours en respectant les consignes et les gestes barrières visiblement bien intégrés par une très large partie de la population.

En Phase 1, dite initiale, il y a notamment la réouverture des marchés de plein air avec fréquentation et implantation restreintes, l’assouplissement de l’ouverture des commerces de moins de 400m², maintenant sans rendez-vous préalable, en respectant les normes de sécurité et prévoyant un horaire d’accueil spécifique pour les plus de 65 ans, la réouverture des terrasses des restaurants et cafés avec une capacité d’accueil restreinte, la réouverture des lieux de culte avec une capacité d’accueil restreinte et la possibilité d’assister à des funérailles en petit comité, la réouverture des installations sportives sous condition mais les piscines restent fermées. Les regroupements de 10 personnes sont possibles, et il est autorisé de se déplacer à plusieurs dans un même véhicule lorsqu’on vit sous le même toit. Cependant, les autorités rappellent toujours que les personnes infectées doivent toujours rester isolées et que les masques FFP2 grand public leur sont principalement destinés alors que les masques chirurgicaux sont destinés aux individus non contaminés.

Pour citer quelques exemples de désescalade, Madrid et Barcelone, restent en Phase 0. Pour la capitale, qui disposera pourtant dès le 11 mai 2020 de la moitié des 14 millions de masques FFP2 acquis par le gouvernement autonome, la demande de passer en Phase 1 n’a pas été acceptée par le gouvernement central. Pour la Catalogne, communauté autonome cultivant des ambitions indépendantistes, et donc régulièrement en conflit avec le gouvernement central, c’est le gouvernement autonome qui a demandé le maintien en Phase 0 d’une grande partie du territoire, dont sa capitale. Maintien acceptée par le gouvernement central après examen du dossier. Autre exemple, les îles Baléares et Canaries passent toutes en Phase 1, alors qu’il y a peu, il était envisagé une désescalade différenciée des îles canariennes.

L’exécutif examine les propositions des communautés autonomes au sein d’un Conseil Inter-territorial de Santé. Les décisions sont prises par le Ministère de la Santé, s’appuyant notamment sur 12 fonctionnaires experts dont l’exécutif ne veut pas donner les noms. Une manière peut-être d’éviter que des pressions soient exercées sur eux, mais en tous cas un bon moyen de travailler sans être parasité par des guerre d’egos. Pour le gouvernement central, le but est d’aboutir à des décisions à l’issue de concertations avec les gouvernements autonomes mais, comme dans le cas de Madrid, il se réserve le pouvoir de prendre la décision finale, les critères de santé publique restant ici prioritaires.

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