Deux malheureux chevaux aux JO

Les chevaux Jet Set et Saint Boy, ont fait parler d’eux au JO 2020, et leurs histoires incitent pour le moins à la réflexion.

Lors du saut d’obstacle, cheval et cavalière doivent faire corps, plus qu’à d’autres moments. Foto: Leslie Bleu7 / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – Inscrite au programme des jeux depuis 1900, l’équitation est le seul sport olympique dont le partenaire n’est pas un humain. Les épreuves classiques se déroulent dans trois disciplines : le saut d’obstacles, le dressage et le concours complet, ce dernier associant dressage, cross-country et saut d’obstacles. Toutes se concourent en individuel et par équipe, cavaliers et chevaux formant alors des binômes.

Chevaux à considérer comme de véritables athlètes, avec tout ce que cela implique d’intendance, d’attentions et de fragilités, sachant que les disciplines olympiques font partie de l’ensemble des sports équestres. Le Polo, inclus dans les Jeux Olympiques dès 1900 et présent dans cinq éditions, en a été retiré après les olympiades de 1936 qui s’étaient déroulées à Berlin, dans une Allemagne en pleine nazification.

Les jeux de Tokyo 2020 reportés à 2021, outre les médailles remportées, seront marqués par deux faits importants : l’euthanasie suite à une blessure, de Jet Set, cheval monté par le cavalier suisse Robin Godel, et l’exclusion de l’entraîneure allemande Kim Raisner, pour avoir donné un coup de poing à Saint Boy, alors rétif lors d’une épreuve.

La fin tragique de Jet Set, victime d’une lourde chute lors d’un passage d’obstacle dans une course de cross-country durant le concours complet, a ému non seulement la Suisse, mais l’ensemble du monde des sports équestres, pour ne pas dire du monde du cheval. Pris en charge immédiatement par les services vétérinaires disposant d’un scanner, le diagnostic pour ce malheureux cheval était sans appel : arrachement irréparable des ligaments sur le membre antérieur droit.

Une des pires blessures pouvant toucher un membre fin, supportant environ 125 kg, soit un quart du poids de l’animal. Tenter de le maintenir en vie avec un tel handicap, était synonyme d’épouvantables souffrances, comme ce fut le cas de Barbaro en 2000, qui lui, suite à une fracture au niveau du sabot, a nécessité d’être euthanasié après huit mois de convalescence sans effets et malgré des soins multiples.

Dans ce genre d’épreuves, les cavaliers peuvent aussi perdre la vie, comme ce fut le cas de Maxime Debost en 2017 et Thaïs Meheust en 2019. Cette même année, Thibault Fournier resta six jours dans le coma suite à une chute. En ce qui concerne la chute et le décès de Jet Set, l’organisation « Swiss Olympic » a précisé que « l’accident n’est dû ni à une faute du cavalier, ni à des défauts de terrain du Seaforest Cross Country Course » et la Fédération Internationale Olympique (FEI) a présenté ses condoléances. Ce sont là de bien piètres consolations.

Dans l’affaire du coup de poing donné par Kim Raisner à Saint Boy, c’est la Fédération Internationale de Pentathlon Moderne (UIPM) qui a réagi sans délai en prononçant l’exclusion de l’entraîneure. Cette discipline, entrée dans les Jeux Olympiques en 1912, associe dans l’ordre, tir au pistolet, escrime, natation, saut d’obstacle (équitation) et course à pied. Ces épreuves se déroulant auparavant sur cinq jours, depuis 1996, elles sont réunies en une seule journée. Les chevaux sont tirés au sort par leurs cavaliers et le duo a droit à seulement vingt minutes d’échauffement avant l’épreuve.

La pentathlète allemande Annika Schleu, en tête de la compétition, montait Saint Boy. Peinant à le contrôler, elle lui avait administré sans succès coups de cravache et d’éperons, sur les conseils de son entraîneure, qui est elle-même passée à l’acte, en assenant un coup de poing à l’animal. Des pratiques interrogeant les rapports humains – chevaux, dans cette discipline dont le concept de la partie équine, se trouve carrément à l’opposé de l’esprit olympique dont le respect est une valeur essentielle.

Prononçant l’exclusion de l’entraîneure, la réaction d’Alfons Hörmann, responsable allemand de l’équipe olympique, ne se fit pas attendre. Il pointa la nécessité de changer les règles pour que cavaliers et chevaux soient protégés, mais aussi de mettre au centre des préoccupations le bien-être animal. Par ailleurs, si ce dernier événement suscite à juste titre une polémique, espérons que la décision rapide et sans appel des responsables allemands fera utilement réfléchir ceux en charge d’autres disciplines, et pourquoi pas jurisprudence…

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