Dia do Trabalhador et liberté retrouvée

Retour sur quelques 1er mai historiques : cette année, celui de 1974, à Lisbonne.

Les œillets rouges couvrirent le Portugal les 25 avril et 1er mai 1974. Foto: Swaminathan / Wikimedia Commons / CC-BY 2.0

(Jean-Marc Claus) – Instauré en France pour la première fois en 1889 comme la « Journée Internationale des Travailleurs » et devenu jour férié en 1919, le 1er Mai se célèbre aussi au Portugal, mais sans muguet. La vieille tradition médiévale française, consistant à en offrir ce jour-là un brin en guise de porte-bonheur, n’a pas été reprise de l’autre côté des Pyrénées. Mais en 1974, la Révolution des Œillets (Revolução dos Cravos), a mis une autre fleur à l’honneur.

C’est en effet en 1974, après avoir été privés de manifester depuis l’accession au pouvoir d’António de Oliveira Salazar, que les Portugais ont connu un 1er Mai historique. En 2022, comme le veut le calendrier des fêtes au Portugal, le 1er mai fait se coïncider « Dia do Trabalhador » et « Dia das Mães ». A savoir Fête du Travailleur et Fête des Mères, cette dernière devant toujours tomber, comme en Espagne, le premier dimanche de Mai.

Survivance d’un passé colonialiste, la Fête des Mères est également célébrée le premier dimanche de Mai en Angola, au Cap Vert, au Mozambique, ainsi qu’à São Tomé et Principe. Par contre au Brésil, c’est le deuxième dimanche de Mai. Le choix du Portugal pour le premier dimanche de Mai est en lien avec le Mois de Marie, qui dans ce pays ou la tradition catholique reste forte, a encore de l’importance.

Mais en 1974, le 1er Mai tombant un mercredi, il n’y eut pas de possible confusion des genres et, comme en témoignent de nombreuses photos d’archives, la foule dans la rue. La veille, journaux et radio avaient appelé au calme, car des manifestations de grande ampleur étaient à prévoir, et d’éventuels débordements auraient nuit à la Révolution des Œillets.

Álvaro Barreirinhas Cunhal, leader historique du Parti Communiste Portugais (PCP), revenu depuis peu au pays après treize années d’exil, prononça son premier discours d’homme libre à Lisbonne, debout sur un char, œillet rouge à la boutonnière. Après une matinée étrangement calme, selon les observateurs d’alors, la ville s’est réveillée à midi, explosant de couleurs et de coups de klaxons. Forces armées et centrales syndicales assurèrent conjointement un service d’ordre, garantissant le bon déroulement d’une manifestation historique.

Les slogans tels que « Vive les forces armées » et « Le peuple uni ne sera jamais vaincu », coexistèrent. En fin d’après-midi, au Stade de la très salazariste FNAT (Federação Nacional para a Alegria no Trabalho – Fédération Nationale pour la Joie au Travail), près de 500.000 personnes se réunirent pour un meeting tenu par Álvaro Barreirinhas Cunhal et Mário Soares, leader du parti Socialiste (PS) qui lui aussi, avait été contraint à l’exil.

Le slogan scandé par la foulé était « O fascismo caiu, mas a exploração capitalista permanece » (Le fascisme est tombé, mais l’exploitation capitaliste demeure). Les forces armées furent priées de ne pas séparer le peuple et le stade fut rebaptisé dans la foulée « Stade du 1er Mai ». Des manifestations importantes eurent également lieu dans d’autres villes telles que Barreiro, Beja, Faro, Leiria, Bragance. Au Nord du pays, des Galiciens franchirent la frontière pour célébrer ce grand jour avec leurs voisins portugais, mais ils durent patienter jusqu’en 1976, après la mort de Francisco Franco l’automne précédent, pour vivre ce moment dans leur pays.

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