Dix mille fois merci, Bouli !

En achetant un hectare de terres qu’il laisse à la nature, Bouli Lanners met localement le capitalisme en échec.

Un autre regard. Foto: Linderdimitri / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – Comédien, scénariste et réalisateur plus connu en Belgique qu’en France, Bouli Lanners, pour l’état civil Philippe Lanners, est réputé proche des milieux décroissants. Il milite pour la sortie du nucléaire, et participe à des marches pour le climat. Encore un militant de salons, serait-on tenté de dire, mais il n’en est rien.

Il n’en est rien car vivant à Liège, il y a acquis, avec son épouse Élise Ancio, 10.000 m² de terrain autour de leur maison. Soit 100 ares ou 1 hectare, où rien ne sera construit, au grand dam des promoteurs immobiliers qui ne comprennent absolument pas ce choix. Mieux que cela, son voisin a fait la même chose sur la colline d’en face. Alors évidemment, il faut en avoir les moyens et Bouli Lanners ne cache pas qu’il y a mis toute sa thune, comme il le rapportait lors d’une interview sur Reporterre au printemps 2021.

Soit, mais combien de personnes publiques aussi riches, voire même infiniment plus fortunées que lui, font de même ? Acheter de la terre, concept totalement inconcevables dans certaines cultures dite à tort primitives, pour la livrer à elle même et y observer le développement des espèces naturelles, ça en jette nettement moins qu’un yacht que l’on prête à un président hâbleur fraîchement élu…

Pour Bouli Lanners, il est aujourd’hui plus facile d’intégrer la fin du monde que la fin du capitalisme (sic). Peut-être justement parce que la fin du monde est inscrite dans beaucoup de religions, alors que le capitalisme n’est à tort pas considéré comme une religion. Pourtant, il en faut de la foi pour être capitaliste. Pas tant de la foi en soi, que de la foi en la main invisible censée réguler les marchés ou en le supposé ruissellement qui enrichirait les pauvres sans déposséder les riches.

Lorsqu’il s’insurge contre l’horizon prétendument indépassable du capitalisme, Bouli Lanner a 10.000 fois raison et plus de 10.000 bonnes raisons de le faire ! S’il est indéniable que le capitalisme épuise les ressources de la planète, il n’en est pas moins vrai qu’il paralyse la pensée de nombre de nos contemporains. Comme vidés de tout esprit critique, ils ne peuvent que se soumettre à l’arbitraire des plus riches.

Ben, il faudra bien s’adapter au réchauffement du climat… Comme si le climat ne faisait que se réchauffer, et que cela ne provoquerait pas des turbulences bien plus graves que des épisodes caniculaires ! Ben, nous, on n’aura pas de retraites… Comme si, arrivé à un âge où on ne peut plus travailler pour subvenir à ses besoins, il était possible d’exister sans ressources ou que la retraite par capitalisation était fiable !

La décroissance peut aussi devenir une religion, mais la croissance illimitée n’est plus une solution, car elle procède également de la croyance. L’avenir est dans la préservation de l’environnement et l’activité que cela génère, la consommation responsable et l’économie de laquelle elle procède, le partage du travail et de la richesse qu’il produit. On ne s’en sortira pas autrement et évidemment, rien de cela n’est compatible avec toute forme de capitalisme, quelle qu’elle soit.

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