Droit d’asile – l’Allemagne veut se rendre inattractive

Le gouvernement a décidé en référé d'une nouvelle loi d'asile qui pourrait entrer en vigueur dès le mois d'octobre et qui représente un étrange mélange entre des mesures censées et des mesures dissuasives.

La vie deviendra encore un peu plus dure pour les demandeurs d'asile en Allemagne. Foto: Andreas Bohnenstengel / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(KL) – Les faucons dans le gouvernement allemand semblent s’être imposés vis-à-vis de la chancelière Angela Merkel et sa politique d’ouverture concernant l’accueil des réfugiés en Allemagne. Le conseil des ministres a décidé d’un paquet de mesures qui pourront être votées déjà au mois d’octobre au Bundestag, avant d’être validées par le Bundesrat pour entrer en vigueur au mois de novembre. Certaines des mesures contenues sur les 94 pages de la nouvelle loi visent à effectivement améliorer les procédures de demandes d’asile, d’autres mesures constituent une attaque sur la dignité des personnes qui cherchent l’asile en Allemagne.

La loi prévoit, par exemple, une accélération de la procédure d’asile, ce qui serait bien pour tout le monde. Le demandeurs d’asile seraient plus rapidement fixés sur leur sort, l’Allemagne serait en mesure de traiter un plus grand nombre de demandes d’asile. Toutefois, il faudra être vigilant de ne pas noyer les droits des demandeurs d’asile, car si une procédure pourra être traitée, comme c’est déjà le cas aux aéroports allemands, en 48 heures, il y a de fortes chances à ce que ce laps de temps ne suffisent pas pour apprécier correctement les cas individuels.

Le Kosovo, l’Albanie et le Monténégro seront désormais considérés comme des «pays d’origine sûrs», ce qui anéantit les chances d’obtenir l’asile en Allemagne à zéro pour les ressortissants de ces pays. Pourtant, la situation en Albanie et au Kosovo où une bonne partie des deux pays est gérée par des «Warlords» qui y font valoir leur «droit» criminel, est telle que d’autres pays, comme la Suisse, reconnaissent plus d’un tiers des demandes d’asile de ressortissants de ces pays.

Désormais, les demandeurs d’asile devront rester dans leur première structure d’accueil, le temps que leur demande soit traitée. Cet «internement» vise une expulsion plus rapide des demandeurs d’asile dont la requête a été refusée, surtout dans la mesure où les Länder n’auront plus le droit de suspendre une décision d’expulsion au-delà de 3 mois. Auparavant, les Länder avaient la possibilité de suspendre une expulsion, comme l’avait fait le Schleswig-Holstein qui refusait d’expulser des demandeurs d’asile pendant les mois d’hiver pour des raisons humanitaires.

Une autre mesure qui tenait à cœur au ministre de l’intérieur Thomas de Maizière, concerne l’argent de poche jusqu’ici accordé aux demandeurs d’asile et qui s’élevait en moyenne à 143 € par personne et par mois. Cet argent de poche sera, «dans la mesure du possible», remplacé par des «prestations en nature», ce qui est vivement critiqué par des organisations caritatives et même le Conseil de la Migration du gouvernement, car cette suppression constitue à leurs yeux, une atteinte à la dignité des demandeurs d’asile. Considérant que les demandeurs d’asile n’ont pas le droit de travailler, le temps de leur procédure, ils seront donc condamnés à rester dans leurs centres d’accueil, sans aucune possibilité de participer à la vie de société. De plus, on est en droit de se poser la question si une telle mesure ne constitue pas une «invitation» à des actes criminels – en vivant dans une société axée sur la consommation, il paraît étrange de couper les nouveaux arrivants de ce mode de vie.

D’autres mesures semblent viser plutôt une intégration plus rapide, comme l’octroi d’une carte santé aux demandeurs d’asile considérés comme «ayant de bonnes chances d’être reconnus», ou encore une extension de l’offre de cours de langue et de civilisation.

Mais sur cette nouvelle loi, pèse le soupçon non démenti, de se vouloir «dissuasive». Face à l’afflux de réfugiés en Allemagne, le pays tente de se rendre «inattractif», en espérant ainsi réduire le nombre de demandeurs d’asile qui veulent venir en Allemagne. Une nouvelle fois, on bricole sur les symptômes, au lieu de s’attaquer sur les causes de ce mouvement de migration qui constitue la plus grande vague de migration après la IIe Guerre Mondiale. Ce n’est pas en s’attaquant à la dignité des réfugiés qu’on pourra résoudre les problèmes qui déclenchent ce mouvement de migration – il faut intervenir dans les pays concernés, comme la Syrie, l’Afghanistan, l’Irak et d’autres. Pour ce faire, les états G7 ont annoncé à New York de vouloir débloquer 1,8 milliards d’euros pour les organismes internationaux qui apportent du soutien dans les régions affectées par ces crises. Une partie de cet argent est destinée à la Turquie, à la Jordanie et au Liban, les trois pays ayant accueilli le plus grand nombre de réfugiés syriens, pour, comme l’a exprimé le ministre des affaires étrangères allemand, Frank-Walter Steinmeier, «permettre aux réfugiés de rester dans les pays limitrophes».

Mais tant que la Russie soutient le dictateur syrien al-Assad, la guerre civile en Syrie continuera et avec elle, la vague de migration. Des lois qui rendent l’accès à l’asile plus difficile, n’y changeront rien.

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