Economie : un miracle français ?

Alain Howiller analyse les chiffres du marché de l'emploi et constate que le Président Macron peut encore atteindre ses objectifs. Si tout se passe comme prévu.

Pôle Emploi disponible 7/7, comme ici à Lyon, 7e. Et si ça portait ses fruits ? Foto: Romainbehar / Wikimedia Commons / CC0 1.0

(Par Alain Howiller) – Alors qu’on continue de s’interroger sur la concrétisation ou non d’une récession que tout le monde redoute, le marché du travail ne semble pas encore traduire d’inquiétude majeure. Que ce soit en Allemagne, où pourtant l’augmentation du travail à temps partiel pourrait être un premier signe annonciateur d’un orage qui se précise (1) ou en France qui donne des signes de résistance à la dépression, le marché du travail reste relativement stable.

Au point que le chômage continue de s’éroder : très légèrement en Allemagne (moins 0,1% de taux d’un mois à l’autre), plus fortement en France où le Ministère du Travail vient de publier des chiffres relativement encourageants : le chômage continue de refluer lentement, à telle enseigne qu’ils ne sont plus rares ceux qui, longtemps sceptiques (2), pensent qu’Emmanuel Macron pourrait bien réussir son pari de ramener le taux de chômage à 7% (8,5% en début de cet été) à la fin de son quinquennat !

En un an, le taux de chômage, n’en déplaise à Donald Trump qui avait moqué ce résultat, a diminué de 2,4% (- 0,4% au troisième trimestre) marquant ainsi une tendance qui s’impose pour le quatrième trimestre consécutif ! Si bien qu’en fin d’année, si le recul (- 0,1% par mois) se poursuit au rythme actuel, il pourrait se situer à hauteur de 8,2 à 8,3% ce qui, bien que la France n’aurait pas échappé à son vieux travers – le « chômage de masse » -, constituerait une avancée non négligeable !

Encore les « gilets jaunes » ? – D’autant que le rythme de création d’emplois, malgré les menaces qui pèsent sur la conjoncture mondiale, continue de s’inscrire dans une courbe positive : selon les prévisions de l’INSEE, prés de 100.000 emplois pourraient être créés au cours de ce dernier semestre de 2019, après un premier semestre qui a vu la création de près de 170.000 postes de travail. Ces progrès, bien que peu perçus encore par les Français qu’interrogent les sondeurs, s’expliquent par l’effet des mesures sur le pouvoir d’achat (+ 2,3% attendus cette année, +1,4% prévus pour 2020), nourries par une augmentation moyenne de 2% des salaires, par des dispositions fiscales provoquées par la crise des « gilets jaunes » et par une inflation mesurée (moins de 1%).

Il s’expliquerait aussi, selon nombre d’économistes, par le fait que la France, bien moins exportatrice que par exemple l’Allemagne, serait moins sensible aux effets d’une conjoncture mondiale sur laquelle pèse, selon le FMI mais aussi la Commission Européenne, la perspective d’un repli des échanges et d’une croissance ralentie. Pour le FMI, par exemple, le niveau des échanges est retombé au premier semestre de cette année au niveau enregistré durant la période correspondante de… 2012 !

L’Alsace à la traîne ! – Dans un contexte français qui reste favorable, la situation de l’Alsace se singularise après des mois positifs. Alors que, dans la région, le taux de chômage ne cessait de régresser au point de passer à 8,1% (7,2% dans le Bas-Rhin et 8,7% dans le Haut-Rhin), le marché de l’emploi s’est légèrement dégradé d’après les deniers chiffres qui, donc, soulignaient les bons résultats enregistrés au plan national. Entre juillet et septembre, le taux de chômage a progressé de 1% dans le Bas-Rhin et de 0,6% dans le Haut-Rhin : le bilan annuel reste néanmoins positif puisque le taux de chômage de ce troisième trimestre reste inférieur de 0,3% dans le Bas-Rhin et de 0,8% dans le Haut-Rhin par rapport à la période correspondante de 2018. Ces résultats pourraient être liés à la relative dégradation de la conjoncture en Allemagne.

Peut-on, en voyant la situation française, parler d’une sorte de « miracle » qui aurait inévitablement des effets sur le plan politique ? Il n’est pas inutile de rappeler, à ce propos, que la « science politique » est une « science sociale » qui est loin d’apporter ces « certitudes » sur lesquelles s’appuient les dirigeants. Les estimations sont – comme les sondages – la révélation, au sens propre du terme, de la photo d’un moment. Engagés dans des enjeux économiques et sociaux difficiles à force de vouloir réformer à marche forcée les pouvoirs publics – et partant le pays – nous risquons de devoir affronter, en France, un dernier trimestre 2019 particulièrement délicat. Les semaines qui viennent -il est banal de le dire – risquent d’être décisives pour un quinquennat qui promettait (trop ?). Dans un pays champion du monde du doute permanent, ils ne sont pas nombreux, ceux qui croient à un « miracle français » et pourtant – pour utiliser la formule macronienne du « en même temps » – « le pire n’est pas toujours sûr ! » (Paul Claudel).

En attendant, les sondages montrent que le chômage n’est plus la première préoccupation des Français : « Pourvou qué cela doure », propos que Laetitia, la mère de Napoléon Premier, avait tenu pour commenter la situation de son empereur de fils. Il est vrai qu’aujourd’hui, c’est la santé qui est placée en tête de leurs préoccupations par les Français : pas sûr qu’on vive là un progrès !

(1 et 2) Voir eurojournalist.eu des 7 Juin et 21 Octobre 2019.

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