El Corte Inglés versus Amazon

Une enseigne espagnole presque nonagénaire veut concurrencer le géant Amazon.

Supermarché El Corte Inglés à Éibar, au pays Basque. Foto: Luis García / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0ES

(Jean-Marc Claus) – Présente sur l’ensemble du territoire espagnol, mais aussi à Lisbonne et Porto, la chaîne de magasins « El Corte Inglés » (La Coupe Anglaise) veut concurrencer Amazon. Créée dans les années trente par le tailleur Ramón Areces Rodríguez, c’est-à-dire une soixantaine d’année avant la boutique en ligne de Jeff Bezos, cette enseigne vise un autre public que « Mercadona ». Elle est néanmoins très populaire, car à son offre très diversifiée de produits et de services réputés de qualité moyenne à haute, « El Corte Inglés » associe une garantie « satisfait ou remboursé ».

Société dirigée depuis sa création, essentiellement par les membres d’une même famille, c’est maintenant Marta Álvarez qui en assure la présidence. S’étant énormément diversifiée, la chaîne de magasins a étendu son domaine et son périmètre d’action. Extension partiellement sous l’influence de capitaux qataris, allant un temps jusqu’en Amérique Latine, pour récemment réduire la voilure, notamment en vendant sa filiale informatique (IECISA) au groupe français « Gfi » devenu « Inetum ».

Fin décembre 2020, El Corte Inglés a annoncé la création d’une filiale dédiée à la logistique d’une activité particulière. Il s’agit de s’appuyer sur les infrastructures de la chaîne, pour proposer des services de livraison à des tiers. Ce qui représente dans ce domaine 5.000 salariés travaillant dans 50 entrepôts centraux et régionaux, plus un millier de remorques circulant quotidiennement sur la Péninsule Ibérique et dans les îles espagnoles.

Le système d’approvisionnement des magasins de la chaîne va, en quelque sorte, assurer des prestations de messagerie pour livrer des biens de consommation. La volonté de concurrencer Amazon est clairement affirmée. Évidemment, l’entièreté de ce projet n’est pas encore connue, mais les informations communiquées jusqu’ici donnent tout de même à réfléchir.

Hormis le caractère mercantile inhérent à l’ADN capitaliste de l’affaire, il n’en demeure pas moins que l’idée de s’appuyer sur les infrastructures existantes, pour offrir un service tendant à s’imposer, n’est pas spécialement inepte. « El Corte Inglés » n’aura, pour assurer ce service, pas plus besoin d’artificialiser des terres, que d’augmenter sa flotte de camions.

Reste à savoir si cela va aussi générer des créations d’emplois et comment seront traités les salariés. La première grève de l’histoire de l’enseigne remonte à l’automne 2019, lors du Black Friday et du Cyber Monday, pour dénoncer les conditions de travail inacceptables des personnels du centre d’appel de la « Financeria » à Madrid. Durant des périodes de grèves plus générales, comme en a connu l’Espagne depuis la création de la chaîne, les magasins sont toujours restés ouverts. D’où la question : bon climat social ou oppression patronale ?

A défaut de pouvoir y répondre, il est à noter qu’en 2018, la direction d’El Corte Inglés n’a pas exercé de pressions sur les salarié(e)s qui ont participé à des débrayages à l’occasion du 8M (Journée Internationale des Femmes). Dans cette entreprise où le personnel est majoritairement féminin, a été institué en 2017 un protocole applicable aux situations de harcèlement, et un travail de prévention y est associé. Donc, affaire à suivre pour l’opération de concurrence avec Amazon, entreprise dont par contre, on sait comment sont (mal)traîtés les salariés.

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