Elections régionales en Sarre le 26 Mars…

… la route vers les élections générales allemandes a démarré !

Il n'y a que peu de chances à ce que Annegret Kramp-Karrenbauer ne soit pas réélue en Sarre. Foto: Eurojournalist(e)

(Par Alain Howiller) – C’est donc le Dimanche 26 Mars que les partis politiques allemands subiront leur premier « crash-test » de l’année. Ce jour-là, on votera en Sarre, le plus petit des « Länder » (1 million d’habitants), pour le renouvellement du parlement. Suivront des élections pour le renouvellement des parlements du Schleswig-Holstein (le 7 Mai) et de la Rhénanie du Nord – Westphalie (le 14 Mai).

La Sarre est dirigée par une coalition CDU/SPD, les deux autres « Länder » étant, eux, pilotés par des coalitions SPD/Verts (avec la participation au Schleswig-Holstein d’un petit parti issu de la minorité danoise, le SSW).

Victime de « l’effet Schulz » ? – En cette année dont le point culminant sera le 24 Septembre, date des élections au Bundestag qui ouvriront (ou non) la voie à un quatrième mandat de chancelière à Angela Merkel, les trois consultations régionales à venir prennent une signification particulière et pourraient donner des indications intéressantes sur l’état de l’opinion. La « grande coalition » CDU/SPD tiendra-t-elle ? La ministre-présidente actuelle Annette Kramp-Karrenbauer (CDU) sera-t-elle victime, en Sarre, de l’entrée en lice de Martin Schulz ? Celui-ci veut pousser au remplacement de la coalition actuelle par un gouvernement dirigé par le SPD.

En l’état actuel, les sondages continuent d’être favorables à la ministre-présidente sortante en Sarre et si en Rhénanie du Nord – Westphalie la coalition SPD/Verts semble menacée par une érosion des Verts et une progression de la CDU, au Schleswig-Holstein, la coalition sortante pourrait être reconduite.

Mais les sondages ne sont pas l’élection et les expériences du passé ont montré que la CDU a souvent perdu des élections régionales alors que, sur un plan national, Angela Merkel l’emportait !

Le grand retour d’une « campagne de gauche » ! – Pourtant cette fois, il semble bien que « l’effet Schulz » perdure et que le candidat du SPD peut s’appuyer sur un certain nombre d’éléments positifs : il mène une campagne dynamique, assez largement ouverte à gauche qui lui vaut l’appui des syndicats et une nouvelle écoute du parti « Die Linke » jusqu’ici assez réticent à envisager l’hypothèse d’une participation à un gouvernement SPD/Verts.

Ce gouvernement éventuel pourrait s’appuyer, d’après les sondages, sur 45% d’intentions de vote, un taux jamais atteint jusqu’ici.

D’après un institut de sondages, si les citoyens de la République Fédérale pouvaient élire directement leur chancelier(e), Merkel bénéficierait de 41% des suffrages, tandis que Schulz recueillerait 38% des votes ! Les écarts se resserrent et un institut de sondage a même placé Schulz en tête des Intentions de vote !

Il est vrai que le candidat social-démocrate tient un langage auquel les électeurs n’étaient plus habitués Outre-Rhin ! Même s’il s’est bien entendu avec Merkel lorsqu’il a été Président du Parlement Européen, on ne le suspecte pas de proximité avec la CDU/CSU. D’ailleurs, il souligne le fait qu’il ne faisait pas partie du gouvernement de « Grande Coalition », affirmant qu’il est un « homme neuf » sur une scène politique nationale où il n’a jamais exercé de responsabilité (à part des fonctions de maire d’une commune de taille moyenne, Würselen près d’Aix-la-Chapelle).

Ce que Schulz propose, pour le moment ! – Il annonce qu’il reverra un certain nombre de mesures prises par Gerhard Schroeder dans le cadre de son fameux « Agenda 2010 ». Il annonce une révision des bas salaires, une augmentation des rentes, une révision en hausse des allocations chômage dont la durée de versement devrait augmenter. Il laisse entendre qu’il pourrait abaisser l’âge de la retraite. Pour l’heure, Schulz a mené une campagne active qui semble payer, du moins pour l’instant.

Du côté de la CDU, embarrassée pour réagir car le parti et le SPD sont toujours dans le même bateau gouvernemental et qu’il faut continuer à diriger le pays dans le cadre de la « Grande Coalition », la stratégie n’est pas définie.

La « pique » de Wolfgang Schäuble ! – Il y a bien quelques missiles tirés depuis les bastions de la CDU/CSU : Wolfgang Schäuble n’a-t-il pas reproché à Schulz de mener une campagne populiste et d’introduire en Allemagne une approche « à la Trump ». Le candidat du SPD, en campagne en Sarre, a renvoyé le missile à son expéditeur en plaidant, à son tour, pour une « campagne électorale propre reposant sur un échange d’arguments et non sur du dénigrement et des vilenies ». Ministre (SPD) des Affaires Etrangères, Sigmar Gabriel a reproché à son… « collègue CDU » Schäuble d’avoir illustré avec ses propos, ce qu’une campagne électorale ne devrait pas être !

En fait, les partisans de Merkel, tout en espérant que « l’effet Schulz » s’essoufflera, comptent sur le fait que, pour l’heure, le bilan de la chancelière fera campagne pour eux ! Ils font valoir que la bonne santé de l’économie a permis à l’Etat d’engranger des rentrées fiscales exceptionnelles qu’on n’attendait pas. Globalement, l’Etat, les Länder, les communes et les assurances sociales ont enregistré un surplus de rentrées dépassant de 23 milliards les dépenses (4,5 milliards d’euros de plus que ce à quoi on s’attendait). Le chômage est toujours au plus bas (6,3%), la demande intérieure est venue soutenir la croissance : elle a compensé le léger tassement des exportations.

Quand la croissance reste soutenue… – La croissance reste soutenue. Il en sera ainsi pendant cette année 2017, estiment les prévisionnistes : même si la consommation intérieure devait fléchir, une reprise du commerce extérieur devrait compenser ce fléchissement. Les milieux économiques redoutent néanmoins un éventuel effet des mesures protectionnistes prônées par Donald Trump et ils espèrent que le programme Schulz n’aura pas l’occasion de s’appliquer !

Quant à Angela Merkel, qui s’affirme de plus en plus (sans la France) comme leader de l’Europe, elle essaye de compléter les aspects positifs de la situation intérieure par des succès à l’extérieur : relance d’une Europe à géométrie variable après la rencontre provoquée à Versailles par François Hollande, accords conclus avec des pays susceptibles d’aider à ralentir l’arrivée des immigrés et de contribuer à lutter contre la montée du terrorisme (Egypte, Tunisie, envoi de troupes au Mali).

L’armée allemande en Lituanie ! – Pour montrer qu’elle ne se laisse pas (ou plus ?) impressionner par Poutine, elle a rendu visite à la Pologne tout en envoyant des troupes (dont des blindés) en Lituanie. Elle est restée ferme face à Erdogan, pour contrer les critiques formulées après l’accord avec la Turquie pour freiner l’arrivée des migrants. Du coup, pour ne pas se laisser (trop) distancer (campagne oblige), le Ministre (SPD) des Affaires Etrangères s’est, à son tour, rendu en Pologne avant de se rendre à… Moscou !

Parallèlement, à l’intérieur, pour corriger les effets de sa politique d’ouverture envers les migrants, elle a laissé Thomas de Maizière, son Ministre de l’Intérieur, multiplier les contrôles et intensifier les expulsions. Et bien que le nombre d’actes hostiles aux immigrés provoqués par l’extrême-droite aient sensiblement augmenté (notamment en 2016), le parti « Alternative für Deutschland » (AfD) est en léger repli dans les derniers sondages (1).

Le budget de la défense : une pomme de discorde. – Dans l’espoir d’améliorer les relations avec Trump (les Etats-Unis sont le premier partenaire commercial de l’Allemagne), elle a prôné une augmentation du budget de la défense. Elle a même laissé s’installer une polémique entre ses partenaires du SPD, hostiles à une révision en hausse du budget de la défense et sa Ministre de la Défense, Ursula von der Leyen. Cette dernière est favorable au respect des critères définis, depuis 2014, dans le cadre de l’OTAN. Elle entend consacrer 2% du PIB à la défense et dépasser progressivement le budget actuel qui évolue autour de 1,2 et 1,4 % du PIB (1,7% en France).

Les critères de l’OTAN devraient être respectés par l’Allemagne d’ici à 2024, ce qui représenterait une augmentation -jugée irréaliste et irresponsable par Sigmar Gabriel- de l’ordre de 25 à 30 milliards par an du budget de la défense. « Est-ce qu’on imagine ce que signifie réellement qu’au centre de l’Europe, il y aurait un état qui dépenserait 60 milliards d’euros pour des dépenses liées à la défense ? », prévient Gabriel qui ajoute, songeur : « Avons-nous bien réfléchi à ce que nous voulons ? Voulons-nous réellement l’émergence, au cœur de l’Europe, d’une grande puissance militaire (l’Allemagne) ? En avons-nous réellement besoin ? »

Finalement, la campagne a, mine de rien, démarré. Les premières escarmouches ont eu lieu. Que donnera la suite ? Premier constat, le 26 Mars en Sarre !

(1) En 2016, l’Allemagne a enregistré 12.100 personnes (+300 par rapport à l’année précédente) ayant participé à des actions anti-immigrés. Parmi les partis d’extrême-droite, c’est le NPD, avec un peu plus de 5.000 membres, qui est le plus actif : la Cour Constitutionnelle de Karlsruhe, devant laquelle le Bundesrat avait réclamé l’interdiction du parti néo-nazi, avait estimé que certes le NPD défendait et prônait des « mesures anticonstitutionnelles et nazies », mais que son importance relative n’incitait pas encore à l’interdire. Si toutefois la situation de dangerosité devait évoluer, la Cour reviendrait sur son jugement et interdirait le parti.

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