Elles (et ils) en ont marre…
En Allemagne, de milliers d’infirmières, de soignants et de personnel auxiliaire jette l’éponge et cherchent d’autres perspectives professionnelles. Il fallait s’y attendre.
(KL) – L’été dernier, tous les soirs à 20 heures, nous sommes allés sur le balcon pour applaudir le personnel soignant. Nous avions compris que c’étaient eux qui tenaient le pays à bout de bras et ce, dans des conditions extrêmement difficiles, avec des heures pas possibles, exposés aux risques pandémiques, sous-payés. On avait alors promis revaloriser ces métiers, de les respecter, de faire en sorte à ce que les conditions de travail soient, enfin !, améliorées. En Allemagne, on avait fait les mêmes promesses. Mais ces promesses n’ont été que partiellement tenues et maintenant, il arrive ce qu’il devait arriver – de milliers de soignants, d’infirmières et de personnel auxiliaire jettent l’éponge.
C’est l’Agence pour l’Emploi qui tire la sonnette d’alarme. Selon une étude réalisée par l’agence à la demande du groupe « Die Linke » au Bundestag, ce sont les hôpitaux qui sont le plus touchés par la démission du personnel soignant. S’exposer à de grands risques, s’épuiser physiquement et nerveusement et ce, pour un salaire faible – les soignants en ont marre. Et nous disposons des chiffres : Tous les 16 Länder sont concernés par ces démissions dans le milieu hospitalier. Depuis le début de la pandémie, Brême enregistre la démission de 1,7% des soignants, au niveau des soins aux personnes âgées, c’est le Land de Hesse qui annonce le plus fort taux de démissions avec 1,6%.
Autre domaine particulièrement touché – les soins à domicile aux personnes âgées. Souvent effectués par des organisations caritatives, le personnel de ces structures ne bénéficie même pas de conventions collectives et doit également faire face à des heures interminables et une forte pression de la part de leurs employeurs. Résultat : les soignants cherchent d’autres perspectives professionnelles.
Si en France, le président Emmanuel Macron vient d’annoncer un « plan de soutien » au monde médical à hauteur de 19 milliards € pour les 10 ans à venir, en Allemagne, nous en sommes encore loin.
L’un des enseignements que l’on peut, que l’on doit déjà tirer de cette pandémie, c’est la nécessité de changer l’attitude de la société vis-à-vis des métiers peu considérés jusqu’alors. Tant que les structures hospitalières réalisent leur chiffre d’affaires en faisant des économies sur le dos du personnel, on assistera à un d’autres démissions du personnel soignant et c’est compréhensible.
Des infirmières qui doivent travailler en étant testées positives, du personnel manquant et remplacé par des personnes non qualifiées, des horaires inhumains, un manque de suivi psychologique du personnel confronté à toute sorte de souffrances humaines, des patients et familles de patients méprisants et parfois agressifs, une administration qui ne tient pas toujours compte des besoins fondamentaux des soignants – et après, on s’étonne que le personnel soignant raccroche ?
Ce ne sont pas nos applaudissements, ce ne sont pas les belles annonces qui rendront les métiers des soins plus attractifs. Avant de penser comment attirer des jeunes dans ces métiers, il conviendrait peut-être de faire déjà en sort à ce que le personnel en place trouve des conditions de travail respectueuses, positives, professionnellement satisfaisantes. Autrement, nos systèmes de santé risquent de connaître de nouveaux problèmes qui seront très difficiles à gérer.
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