En politique, rien ne vaut l’effet d’annonce…

Au début de son mandat, le vice-chancelier, ministre de économie allemand et chef du SPD Sigmar Gabriel, voulait réduire et mieux contrôler les exportations d’armes. Pourtant…

Sigmar Gabriel voulait combattre le "commerce de la mort" - maintenant, il en est devenu l'un des acteurs principaux. Foto: Michael Thaidigsmann / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0

(KL) – En arrivant sur un nouveau poste, les hommes et femmes politiques sont pleins de bonne volonté. Ils veulent améliorer la vie de leurs concitoyens, ils veulent semer la paix dans le monde, ils veulent faire participer tout le monde aux richesses de la société, mais vite, ils se plient aux tristes réalités. Ainsi, le chef du SPD Sigmar Gabriel, avait annoncé pendant la dernière campagne législative en 2013, de vouloir réduire les exportations d’armes. Et de mieux les contrôler. Pour que la paix puisse régner. Amen. En cette année 2015, les exportations d’armes battent les records.

Il voulait regarder de très près, avant de signer des autorisations d’exportation d’armes, avait annoncé Sigmar Gabriel, et ne plus livrer des armes dans des zones à conflit. Mais ces zones non menacées par des conflits, commence à se faire rares sur cette planète. Ce qui implique pour Sigmar Gabriel qu’il ferme les yeux avant de signer. Comme pour les pays du monde arabe – en 2015, les exportations d’armes allemandes vers les pays du monde arabe sont doublé par rapport à l’année précédente. Est-ce que la stabilité politique dans les pays du monde arabe auraient également doublé ?

Tanks, avions, sous-marins, équipements de toute sorte, l’industrie de l’armement allemande se porte bien, un peu trop même. Pour préserver des emplois, on accepte que des gens dans le monde entier, se fassent tuer par des armes allemandes. Les traités (dont notre éditorialiste Alain Howiller avait parlé mercredi dernier) résonnent comme une mauvaise blague. On essaye de conclure des traités qui tournent autour de l’expression de la «bonne utilisation des armes». Comme si les armes servaient à autre chose que d’intimider de potentiels ennemis et, in fine, à tuer autrui.

La social-démocratie allemande, vieille de plus de 150 ans, a toujours été un parti profondément pacifiste. De grands social-démocrates allemands sont morts pour leurs convictions, par exemple après la prise du pouvoir par Hitler. Votant contre la loi sur les pleins pouvoirs du «Führer» («Ermächtigungsgesetz»), les députés SPD s’opposaient ouvertement contre les nazis et ils étaient nombreux à payer leur courage avec leurs vies. Cette tradition pacifiste, à laquelle il convient d’ajouter les mérites d’un autre grand social-démocrate, Willy Brandt, dans la normalisation des relations entre l’Ouest et l’Est, constitue une mission pour les héritiers des August Bebel, Otto Wels ou Willy Brandt. Une mission de mener une politique qui accepte que des armes allemandes tuent partout dans le monde, en échange d’emplois en Allemagne.

Sigmar Gabriel sait distinguer entre «le bien» et «le mal». C’est pour cela qu’il avait exprimé son indignation à une attribution un peu trop facile des autorisations pour les exportations d’armes allemandes pratiquée par ses prédécesseurs. Oui, disait Sigmar Gabriel en devenant ministre de l’économie et vice-chancelier, «il faut mieux contrôler les exportations d‘armes et mieux vérifier que les armes exportées n‘arrivent pas dans les zones de guerre dans le monde». Il est fort probable qu’il y croyait à ce moment-là.

Mais depuis, Sigmar Gabriel a du subir une transformation radicale. Car par rapport à l’année précédente, Sigmar Gabriel a signé deux fois plus d’autorisations qu’en 2014 – et les exportations d’armes «made in Germany» fleurissent.

S’opposer à ce commerce d’armes, cela a toujours été une position politique «gauche». Mais si un ministre SPD n’arrive pas à faire mieux que de doubler les exportations d’armes, il est difficile de qualifier cette politique comme une politique de «gauche». On continue à sacrifier des valeurs humaines au détriment de l’emploi, d’une prétendue «réussite économique», et d’une compétitivité qui semble aujourd’hui primer sur tout le reste. Et la différence entre les positions du SPD et celles de la CDU ? Difficile à apercevoir. Mais ce n’est pas avec cette politique qui doit agacer l’électorat traditionnel du SPD, que le parti sera un challenger sérieux de la CDU en 2017.

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