Entreprises et Covid : un impact moins dramatique qu’on ne le pense ?

Télétravail et crise économique – où allons-nous ces prochains temps ? Généralement, un certain optimisme est de mise, explique Alain Howiller.

Le télétravail sera à l'honneur en ce 1er Mai... Foto: Mike Thompson / Wikimedia Commons / PD

(Alain Howiller) – Lorsqu’il y a un peu plus de un an, le 28 Mars -qui s’en souvient ?- Edouard Philippe, alors Premier Ministre, invitait les salariés français, alors engagés dans leur premier confinement, à continuer à travailler autant que possible chez eux, à domicile, personne ne pensait sérieusement qu’il officialisait, en quelque sorte, un télétravail généralisé pour une durée indéterminée ! Jusque-là, près de 8 millions de Français travaillaient, déjà, totalement ou à temps partiel, depuis chez eux, mais cette fois, avec la crise sanitaire, l’objectif du travail à domicile prenait une autre dimension.

Et le 1er Mai qui suivra, sera une journée chômée, sans les traditionnels défilés et sous le signe d’un muguet rare ! Cette année, le muguet sera abondant et si la crise sanitaire continue à faire des ravages, des perspectives d’amélioration -timides et mesurées encore- se dessinent enfin !

Economie : un spectaculaire effondrement ! – « Un an après le début de la pandémie », constate, à Paris, la Direction Générale du Trésor depuis son siège au Ministère de l’Economie et des Finances : « après un recul sans précédent (-3,4%) de l’activité mondiale depuis la 2ème Guerre Mondiale, l’activité rebondira nettement en 2021 (+5,3%)… cela appelle une vision optimiste de la reprise économique qui restera néanmoins conditionnée à l’évolution de la vaccination et aux nouvelles mutations du virus… »(1) Rien donc n’est définitivement joué et si le premier trimestre de cette année, après un spectaculaire effondrement en 2020, a marqué un redressement qui, à 74% de la normale, ne la mène pas encore au niveau d’avant la crise, cette dernière a marqué pour de nombreuses entreprises un tournant qui pourrait bien être pérenne.

Certes, la crise a détruit et détruira encore des entreprises et des emplois : les statistiques du chômage, on ne le dira jamais assez, affichent des mises en garde pour des données en trompe-œil, ne reflètent que très imparfaitement la réalité du marché du travail. Cela génère de légitimes angoisses, tout particulièrement maintenant que les pouvoirs publics commencent, timidement, à évoquer une sortie de crise et une levée progressive des mesures d’aides dont bénéficient les entreprises en difficultés pour leur permettre de survivre et éviter des pertes d’emplois générateurs d’une crise sociale particulièrement délétère. La situation participe aussi, on le sait, à une progression de la pauvreté.

Le développement des outils digitaux. – Cela étant, la crise que nous traversons (encore) aura, aussi, eu des conséquences dont il ne faut pas ni sous-estimer ni mésestimer certains aspects qui s’avèreront positifs à terme. Jerôme Barhelemy et Radu Vranceanu, professeurs de stratégie-management et d’économie à la prestigieuse « Ecole Supérieure des Sciences Economiques et Commerciales-ESSEC-Business School » de Cergy, ont pu constater en interrogeant un panel d’entrepreneurs que ces derniers se sont efforcés de s’adapter à la criser : 70% d’entre eux ont adapté leur stratégie pour se renouveler et développer de nouveaux services ou produits. En très large majorité, ils ont développé leurs outils digitaux pour « interagir avec leurs clients » : du coup, ils ont augmenté leurs investissements dans la digitalisation et la formation de leur personnel. Un quart des entreprises n’ont pas eu de baisse d’activité durant la crise et si plus de 70% ont vu leur chiffre d’affaires baisser, ils ont tout de même été 15% à le voir progresser.

Si, pour faire référence, cette fois, à une autre étude (« Vistaprint ») portant sur les « TPE » (plus de 3 millions d’entreprises employant moins de 10 salariés, soit tout de même un peu plus de 20% du salariat), 77% d’entre elles ont ajouté de nouveaux produits ou services à leur activité, un quart ont réinventé leur société en ciblant une nouvelle clientèle, ont commencé à vendre des produits et des services totalement différents de ce qu’ils proposaient jusqu’ici, 4 entreprises sur dix disent avoir effectué au moins un changement important pour s’adapter à la pandémie tels que ajout d’une e-shop, création d’un service de livraison voire un « click and collect ».

Quel impact aujourd’hui de la crise ? – Pourra-t-on, dès lors, adhérer à ce propos des auteurs de l’étude de l’ESSEC qui concluent en évoquant les effets positifs de la crise : « Il est donc probable que l’impact de la crise due au Covid-19 sur les entreprises françaises sera moins dramatique qu’on ne le pense. » Cela dépendra évidemment aussi de la manière dont se pérenniseront les nouvelles habitudes des consommateurs : un pari dans lequel ils sont déjà nombreux à s’être engagés.

La réaction à la pandémie a développé les centres de stockage et les unités de logistique pour répondre aux commandes sur internet, les sociétés de livraison à domicile se multiplient, les restaurants comptent persévérer dans le « click and collect » à côté de leur activité traditionnelle enfin retrouvée, le commerce de proximité veut asseoir sa relance dans les centre-ville en intégrant -notamment- des points de vente de produis « second hand », les exploitants agricoles adhèrent aux ventes directes etc… Et si, selon certaines analyses, une entreprise sur deux compte embaucher dans la foulée des nouvelles mesures de « déconfinement progressif » entrepreneurs et salariés s’interrogent sur le développement du télétravail.

1er Mai : la fête du… télétravail. – Avec la reprise des discussions patronat-syndicats sur l’application de l’accord de Novembre dernier et, tout particulièrement, de l’annonce par Emmanuel Macron d’en assouplir les modalités à partir du 9 Juin, le télétravail a vu activer son actualité. Le 1er Mai de cette année mériterait d’être rebaptisé : « Fête du Télétravail » ! D’après le Ministère du Travail, 43% des salariés pratiquaient le télétravail, alternant présence à domicile et en entreprise, mais d’après une étude « Dynata », ce sont 41,2% des Français qui continueraient de ne se rendre que sur leur lieu de travail. S’ils avaient le choix, 36% préfèreraient continuer de se rendre sur leur lieu de travail, pourcentage qui monte même jusqu’à 47,3% dans la tranche d’âge des 55/64 ans. L’unanimité n’est pas assurée, mais il ne surprendra pas que les tranches d’âge les plus favorables au télétravail sont les plus « jeunes ». D’ailleurs, toujours selon « Dynata », 42,7% des jeunes de 18/24 ans sont persuadés que le télétravail va devenir la nouvelle norme, tandis que seuls 21,2% des 55/64 ans partagent cette conviction.

Reste, devant les incertitudes qui continuent à s’imposer à nous, à espérer qu’avec la vaccination le retour des jours heureux se précisera malgré cette épée de Damoclès qui reste brandie au-dessus de nos têtes : « Peut-être », soulignait Emmanuel Macron devant les confrères de la presse régionale, « aurons-nous à vivre avec le virus pendant des années et à nous refaire vacciner chaque année ! »

(1) Voir eurojournalist.eu 19.04.21.

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