Est-ce que gratuit veut dire gratuit ?

Combien dois-je payer pour les services digitaux gratuits – Est-ce que l’Union Européenne met finalement fin à ce mystère?

Nous payons déjà certains services avec nos données personnelles. Sans trop savoir comment cela se passe... Foto: Eandertonallen / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Par Ben Borsche) – Des milliards d’internautes utilisent chaque jour les services appelés gratuits en ligne, c’est-à-dire Google, Facebook, des journaux, boîtes de courrier électronique, des dictionnaires etc. Il est de notoriété publique que l’on paie quand même avec ses données personnelles ou anonymes. Mais pourquoi les consommateurs sont-ils condamnés à payer sans savoir combien? La Commission européenne a proposé une mesure pour changer ceci. Mais va-t-elle y parvenir ?

L’internet seul apparait comme un bienfait, alors qu’il est en fait un hypermarché avec tous ses avantages et inconvénients. Selon un modèle commercial, les opérateurs de sites gratuits autorisent les entreprises tierces à collecter des informations sur les habitudes de navigation d’internautes qui fréquentent leurs sites. Par exemple, Google a installé des milliers de cookies tiers sur différents sites gratuits. Cela lui permet de suivre des internautes à travers l’internet pour créer des profils personnels et vendre des publicités personnalisées – Plus précis ces profils sont, plus précieux ils s’avèrent.

Les internautes savent qu’ils paient, mais ils ne savent pas combien. D’un côté on est inondé par des informations. D’un autre côté, on ne trouve ni dans les bandeaux et déclarations des cookies ni dans les déclarations pour la protection des données des informations sur ce que l’on paie. En effet, on conclut un contrat d’échange avec des commerçants : mes données pour votre service. Mais il manque des informations claires sur les composants essentiels de ce contrat. Puisque l’on paie avec ses données, il serait essentiel de savoir combien cela vaut. La valeur des données se reflète dans le prix que les opérateurs des sites reçoivent pour vendre des publicités personnalisées ou pour laisser des parties tierces récolter les données de leurs utilisateurs.

Demander aux internautes de s’informer d’une façon indépendante serait trop exiger des internautes. Il est très difficile de savoir la valeur de ces données. Elle diffère d’un site à un autre. Facebook, par exemple gagnait en moyenne 20.21 dollar américain par utilisateur en 2017, selon un « official Facebook rapport pour la Securities and Exchange Commission » des Etats-Unis. Par contre, la plupart des entreprises en ligne n’est pas obligée de publier de tels chiffres – et presque aucune d’entre elles ne le fait. Le Financial Times a publié un calculateur qui permet à toutes et tous de calculer en gros la valeur de leurs données (dernière mise à jour: juillet 2017). Mais cet outil ne semble pas précis en considérant la diversité des sites.

La Commission européenne a initié un projet de loi, qui pourrait éclairer cette zone d’ombre. Il a été inclus dans la « nouvelle donne pour les consommateurs » présentée en avril 2018. Il amenderait la Directive relative aux droits de consommateur (Directive 2011/83/UE) de même qu’il inclut aussi les services en ligne qui sont fournis en échange des données. Correctement, il est argumenté que dans le monde virtuel il ne fait aucune différence si l’on paie avec de l’argent ou avec ses données. Actuellement, cette Directive règle seulement les conditions sous lesquelles les commerçants sont autorisés à approvisionner leurs services payants avec de l’argent en ligne. Elle demande aux commerçants d’informer les consommateurs d’une façon claire et compréhensible des composants essentiels de contrat incluant – naturellement – le prix, avant que le contrat soit conclu.

Après l’entrée en vigueur de cette mesure, le contrat de service en échange des données tomberait aussi sous cette Directive. Si les consommateurs paient avec leurs données, la valeur des données reflète le prix et, donc, devrait être mentionnée d’une façon claire et compréhensible avant l’utilisation de service et la transaction des données à une entreprise tierce. Puisque la valeur va différer par rapport à chaque utilisateur, la valeur moyenne devrait être indiquée. Cette interprétation est contraignante si l’on veut – comme prononcé explicitement par la Commission – aligner les deux modèles commerciaux.

Cette mesure procurerait beaucoup d’avantages aux consommateurs. Premièrement, c’est un impératif de justice et une exigence de transparence que l’internaute sache ce que et combien il paie quand il conclut un contrat.

Deuxièmement: actuellement les consommateurs sont inondés par des informations sur l’utilisation de leurs données et l’application de cookies dans les bandeaux cookies, les déclarations des cookies et celles de la protection des données, mais il manque une information claire et systématique sur les essentiels du traitement des données. Par conséquent, les bandeaux cookies sont acceptés non lus et les déclarations ignorées (comme les conditions générales des contrats). Entre autres, la valeur des données est essentielle autant que leur transmission à des parties tierces. Le premier est un intérêt économique et le deuxième un intérêt de sécurité. Obliger les commerçants à fournir l’information sur la valeur des données d’une façon claire et compréhensible avant la conclusion d’un contrat en ligne, protégerait l’intérêt économique des consommateurs.

Troisièmement, une information obligatoire sur la valeur serait aussi intéressante par rapport au droit de concurrence. Il y a de plus et plus de commerçants qui offrent des services payants en ligne en assurant une meilleure protection des données à leurs clients. La compétition serait plus juste, si les clients des services gratuits apprenaient d’une façon claire qu’ils paient aussi, mais avec une autre monnaie.

En même temps, la mesure aboutirait à un changement de paradigme par rapport à l’évaluation de services appelés gratuits. Le tribunal de Grande instance de Berlin (Landgericht Berlin) avait encore jugé en début de 2018 que Facebook était autorisé à appeler ses services « gratuits ». Tenant compte du fait que la loi européenne traiterait le paiement avec des données comme le paiement avec de l’argent, nommer ces services gratuits, serait en contradiction avec l’esprit du droit européen.

Jusqu’ à présent ce projet de loi est sur les tablettes du Parlement européen et attend le vote du comité responsable. Il est à souhaiter, que sous la présidence de la Roumanie, les institutions européennes réussiront à adapter cette loi avant la constitution du nouveau Parlement européen en mai 2019. Sinon, le procès législatif devrait être redémarré et il ne serait pas sûr que ce projet représenterait une priorité de la prochaine Commission européenne.

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