Estonie : attention, les voilà !

Les démons dans la soupière des sociaux-démocrates

Kersti Kaljulaid, la Présidente estonienne, avec... avec... Foto: The Presidential Press & Information Office /Wikimédia Commons/CC-BY-SA 4.0Int

(Marc Chaudeur) – On en prend d’autres et on recommence : le centre gauche s‘allie à un parti d’extrême-droite pour garder le pouvoir ! M’en diras-tu tant ! Mais peut-être la meilleure manière de « re-dé-banaliser » l’extrême-droite serait-elle de l’installer pendant un an ou deux ou pouvoir ?

Dans ce pays pas très grand (1 million 300 000 habitants) entré dans l’Union Européenne en 2004, les dernières législatives ont commencé par une tragi-comédie, et ont fini par une hideuse sarabande de diablotins. L’ERE ou Parti de la Réforme, une formation de centre-droit, remporte les élections législatives de mars dernier (29 % des voix). La Présidente de la République, Kersti Kaljulaid, donne le poste de premier ministre à la dirigeante de ce Parti, Kaja Kallas. Et l’ERE s’allie avec KESK, le Parti du centre (qu’on peut qualifier de centre-gauche), 23 % des suffrages, pour pouvoir gouverner convenablement. Mais voilà : le premier ministre sortant,chef du Parti du Centre, Jüri Ratas, refuse cet accord, essentiellement parce qu’il ne veut pas quitter son poste douillet…

…Et Ratas forme alors son propre gouvernement en s’alliant avec 2 petits partis, après que Kaja Kallas a échoué à former une coalition avec les sociaux-démocrates. Le Parti du centre, formé par un ancien maire de Tallinn, a connu un infléchissement social ces tout derniers mois – avant les élections. C’est le parti qui fait entendre la voix des Russophones (environ 25 % des Estoniens) sur le pan national et qui peu ou prou, défend les intérêts de cette fraction de la population.

Pour pouvoir lui-même gouverner et garder son poste au coin du feu, Ratas s’est donc allié avec ce qui restait dans le magasin d’accessoires grand-guignolesques : à savoir deux partis très à droite, l’ EKRE (« Parti populaire conservateur ») et l’ISAMAA, plus littéralement conservateur que le précédent qui lui, montre de nettes tendances fascisantes.

L’ EKRE, c’est le parti du copain de Marine Le Pen, Rupen Kaalep, qui entretient des liens étroits avec des nazis dans plusieurs pays européens. Antisémite, négationniste, il s’est notamment interrogé publiquement, voici quelques mois, sur les origines juives d’Arvo Pärt… En bon névrosé phobique, il semble obnubilé par le sujet. Début avril, il a fait à plusieurs reprises le fameux signe des suprémacistes blancs, dont Marine Le Pen prétend qu’elle l’ignorait jusqu’à ces jours tout récents où elle a rendu visite à Rupen, son petit camarade fasciste. Ce geste répugnant, deux ministres l’ont réitéré lors de leur prestation de serment, fin avril : Mart Helm, le ministre de l’Intérieur et dirigeant de l’ EKRE, et Martin Helm, son fils, le Ministre des Finances ! Hop, à la poubelle !

Certains membres du Parti du centre ont réagi vivement, en un premier temps, à l’idée même d’une coalition avec l’extrême-droite fasciste. Mais ces derniers jours, un seul membre important du Parti a démissionné : c’est Raimund Kaljulaid, le frère de la Présidente. Tendances nazifiantes, programme économique débile, craintes inspirées aux investisseurs étrangers : le pronostic est vite dressé ! Il est le même qu’en toutes les occurrences où un/des partis(s) de cette « obédience » ont été aux affaires.

L’émail de la bonne réputation de l’Estonie en matière économique est sérieusement rayée par ces derniers événements préoccupants – pas plus préoccupants cependant que dans l’ensemble de l’Union Européenne, certes. En tout cas, il va falloir s’attaquer aux vrais problèmes, aux problèmes les plus graves : la fracture sociale entre la classe supérieure et le « reste », et celle entre Tallinn et la campagne. Et celui de l’exode vers un monde meilleur : les jeunes partent en masse, comme d’ailleurs dans presque tous les pays du centre et de l’Est de l’Europe.Et cet exode est aggravé par une natalité déficiente : manifestations d’une même cause…

Reste un espoir concret, tangible, qu’on peut suivre à la trace afin de pré-voir ce qui se passera le jour peut-être proche où le RN sera au pouvoir en France. C’est que de tels partis fassent très vite la preuve de leur incompétence en matière d’économie et de gestion des affaires, dans tous les domaines – sauf dans celui de la démagogie.

Pour une analyse très détaillée : https://courrierdeuropecentrale.fr/

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