Et maintenant ?

Le bateau de sauvetage « Ocean Viking » de l’ONG « SOS Méditerranée » est à nouveau en mer. Pour sauver immédiatement 85 personnes, dont 5 femmes et 25 mineurs. L’horreur de la Méditerranée continue.

85 personnes sauvées d'une mort certaine - d'autres n'avaient pas cette chance-là. La honte de l'Europe. Foto: www.seawatch.org

(KL) – Evidemment que les sauveteurs de l’ONG « SOS Méditerranée » ne cessent pas leurs opérations, qui consistent à sauver des vies humaines, là où l’Union Européenne les condamne à mort. Souvent, la question de vie ou de mort tient à peu de choses. Après avoir gagné une position à proximité des côtes libyennes, l’équipage de l’« Ocean Viking » a été informé, par un avion portugais de l’opération « Sophia », que deux embarcations de fortune venaient de quitter les eaux libyennes. Les malheureux à bord d’une de ces embarcations avaient de la chance, les autres, non. Chaque jour qui passe, l’Europe se comporte de plus en plus comme une association de malfaiteurs qui n’hésite pas à coopérer avec des criminels et des tortionnaires. En dehors de la question : pourquoi l’Union Européenne affiche un tel comportement cynique et meurtrier, une autre question plus brûlante doit être réglée – où les personnes sauvées par la « Ocean Viking » peuvent-elles mettre pied à terre ?

Les deux embarcations avaient donc quitté la Libye jeudi dernier, en soirée, dans l’espoir de pouvoir se faufiler à travers le filet des bandes criminelles qui agissent sous l’étiquette des « garde-côtes libyens » pendant la nuit. Mais au bout de 48h de dérive sur la mer, dans une embarcation pneumatique totalement surchargée et qui commençait à se dégonfler, l’ « Ocean Viking » pouvait repérer cette embarcation à la dérive et sauver in extremis les 85 rescapés.

Pendant ce temps, la deuxième embarcation aurait été interceptée par les garde-côtes libyens et ramenée en Libye, au détriment du droit maritime et des conventions internationales. Personne ne sera surpris d’apprendre que les réfugiés ainsi forcés à retourner sur le sol libyen y subiront le même sort que de milliers de réfugiés avant eux – ils seront enfermés dans des espèces de camps de concentration, torturés, violés, vendus aux marchés d’esclaves. Ces conditions ont été vérifiées et dénoncées à de nombreuses reprises et plus personne n’ose contester la véracité de ces rapports.

Et maintenant ? Tout recommencera à nouveau. Aucun pays n’acceptera que les réfugiés soient amenés dans un port : en Italie, les sauveteurs risquent maintenant la confiscation du bateau, une amende allant jusqu’à un million d’euros et jusqu’à 10 ans de prison (!) et les autres pays, qui ont pris l’habitude de pointer l’Italie du doigt, interdisent tout autant l’accès à leurs ports.

Depuis ce premier sauvetage en fin de la semaine dernière, l’« Ocean Viking » a pris, dans le cas de plusieurs opérations de sauvetage, 356 personnes à bord. Le bateau, aménagé pour accueillir entre 200 et 250, doit maintenant trouver d’urgence un port en Europe. Pour l’instant, aucun pays ne s’est déclaré prêt à autoriser l’amarrage du bateau.

Alors, l’Union Européenne, on est fier ? Fier que ce soient des criminels et des warlords libyens qui exécutent la peine de mort que tu infliges à ces malheureux ? Quel cynisme ! Deux bateaux qui partent, les passagers d’un des deux peuvent être sauvés et ceux de l’autre risquent de disparaître à tout jamais dans des conditions atroces. La mission de l’Union Européenne devrait consister à soutenir par tous les moyens le travail de ceux qui respectent les valeurs de notre continent et le Droit maritime – mais nos responsables politiques préfèrent condamner ces malheureux à la mort et à des souffrances indicibles, tout en finançant des structures criminelles. L’Union Européenne est en train de perdre son âme sur la Méditerranée. Il faut immédiatement stopper la criminalisation des sauveteurs, les soutenir et commencer à combattre les structures criminelles en Libye. Les warlords et marchands d’esclaves ne peuvent être les partenaires de l’Union Européenne. Ouvrez les ports, aidez les ONG à sauver des vies. C’est aussi simple que cela.

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