Et maintenant – à table

Suite au discours d'Emmanuel Macron, la France devra choisir : soit on se met à négocier, soit on s'adonne à une guerre civile. Les propositions sont sur la table.

Il a mis des propositions sur la table, maintenant, il s'agit de les négocier et de les réaliser. Foto: ScS EJ

(KL) – Evidemment, on pourrait maintenant critiquer. On pourrait disséquer le discours du président, son ouverture, son pathos, mais tout cela n’a aucune importance. Ce qui devrait importer maintenant, ce sont les progrès sociaux et le rétablissement du fonctionnement de la France, la fin de la haine et de la violence qui s’installe dans la rue comme dans toutes les sociétés ayant viré vers le totalitarisme un jour. Désormais, des propositions sont sur la table, d’autres volets sociaux pourront être ouverts et c’est le moment de se comporter de manière adulte et constructive.

Les mesures principales ont du coûter à Emmanuel Macron et devraient être considérées comme telles – des mesures qui constituent un signe qu’il a compris les doléances des « gilets jaunes ». Certes, il y a toujours moyen d’améliorer des plans pondus à la va-vite, bien sûr, il convient de peaufiner ces mesures pour qu’elles puissent avoir de l’effet là où c’est nécessaire, mais force est de constater que le gouvernement a adressé les revendications concernant le social. Les mesures proposés ne sont pas un « dernier mot », mais le début d’un dialogue sociétal qu’Emmanuel Macron a également annoncé et auquel il ne pourra en aucun cas échapper – mais prendre ces mesures n’était pas chose facile non plus.

Pour financer ces mesures qui pourront effectivement améliorer les conditions de vie d’une frange de la population, Emmanuel Macron doit dépasser les 2,8% d’endettement prévus par le pacte de la stabilité européen ; et ainsi, il doit faire exactement la même chose que l’Italie avec son budget rejeté il y a trois semaines, aussi par la France – on finance des mesures sociales à crédit. Si Macron propose quand même ces mesures, il serait recommandé d’en discuter.

Les mesures annoncées comprennent la hausse du SMIC de 100 € par mois à partir du mois prochain, l’annulation de la hausse de la CSG pour le retraites inférieures à 2000 €, la défiscalisation et la désocialisation des heures supplémentaires, une prime de fin d’année (une bonne intention, mais sous forme d’un projet très mal ficelé), la taxation des grands groupes multinationaux sur les bénéfices réalisés en France, la convocation des « riches » pour discuter avec eux leur contribution aux dépenses sociales augmentées du pays et l’ouverture d’un dialogue national à travers les maires des villes et communes. Et le premier postulat des « gilets jaunes », l’abandon de la hausse sur les carburants, a été obtenu. Ne pas considérer ceci comme une main tendue relève de la mauvaise foi.

La France est en crise, et dans une telle situation, l’intégralité du pays doit faire des efforts pour éviter des dégâts, autant matériels qu’immatériels. Déjà, la population se polarise autour de la question, les disputes éclatent dans les familles, dans les foyers, parmi les amis. Le ton se durcit, la violence s’installe de plus en plus dans les rues du pays. Maintenant, il s’agit de se comporter de manière raisonnable.

Pendant ce temps, les incendiaires habituels appellent déjà à l’Acte V samedi prochain à Paris et en province, appel qui n’est autre qu’un appel à la violence, au saccage, à l’affrontement. Ceux qui jouent avec le feu en invitant à cet Acte V, porteront la responsabilité de tout ce qui se passera à cette occasion. Maintenant, c’est aux « gilets jaunes » de décider si ce mouvement veut réaliser des progrès sociaux qui seront, bien entendu, leur narratif mérité à tout jamais, ou bien si ce mouvement persiste à ne pas vouloir s’organiser pour pouvoir réaliser ces progrès en maintenant la violence dans la rue. Mais on ne soigne pas un pays en le détruisant.

Désormais, tout un chacun doit prendre ses responsabilités. Nous ne sommes pas en 1789, mais en 2018 ; il y a des injustices sociales que les « gilets jaunes » ont le potentiel de changer, et pour le reste, il faut cesser de porter des attaques à la démocratie et à la paix interne du pays.

Quelles alternatives proposent les « gilets jaunes » ? L’Acte V ? L’Acte VI ? L’Acte VII ? Et après ? Le postulat de la dissolution de l’Assemblée Nationale n’est que la proposition d’extrémistes dans les rangs des « gilets jaunes » qui souhaitent, par ce biais, « corriger » les résultats des dernières élections en leur faveur. Emmanuel Macron avait parfaitement raison de ne pas répondre à la revendication de remplacer la République par une « dictature référendaire » – le débat doit tourner autour des revendications sociales et non pas autour de la mise à mort de la démocratie par des extrémistes néo-nationalistes qui, comme dans d’autres pays, arborent maintenant du jaune.

En principe, ce qui doit se passer maintenant, c’est une négociation, comme pour une convention collective. Une telle négociation implique la soumission de propositions et la négociation d’un compromis qui peut être porté par les deux parties. Dans le cas présent, ce sera une partie de plaisir, car les deux parties devraient vouloir la même chose – l’amélioration de la situation sociale d’une partie de la population et la paix interne, une économie qui fonctionne au lieu de produire encore plus de précarité en étant paralysée, la ré-instauration du respect dans les échanges. Ceci nécessite que les « gilets jaunes » se structurent, qu’ils définissent des interlocuteurs mandatés pour négocier et s’exprimer au nom des « gilets jaunes », et qu’ils participent de façon constructive à des solutions. L’alternative est la guerre civile et/ou un régime totalitaire. Personne ne peut souhaiter une telle évolution des choses.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste