Et si on laissait tomber la réforme territoriale ?

Maintenant que la décision politique du découpage des régions a été prise, plusieurs régions font leur possible pour l’éviter. Quelles en seraient les avantages ?

"Elise" n'est pas contente. Préfère-t-elle garder son "mille-feuilles institutionnel" ? Foto: Paralacre / Wikimedia Commons / CC0

(KL) – Il existe un terme dans la langue française qu’on ne peut traduire dans aucune autre langue – «le millefeuille administratif». La raison pour laquelle cette expression n’existe pas ailleurs, est simple – aucun autre pays ne se paye le luxe d’une telle foulitude d’administrations, de sous-administrations, de délégations régionales, de compétences, de semi-compétences demandant un tel nombre de fonctionnaires que la France. La réforme territoriale prévue par le gouvernement vise à changer cet état de choses pour créer une administration plus efficace, moins onéreuses et plus en phase avec le 21e siècle. Etrangement, on n’entend que peu de voix qui remettent cette réforme en bloc en question et il reste un faible «bien, la réforme, mais surtout pas chez nous.» Mais quelles en seraient les alternatives ?

Un autre aspect de cette réforme n’a pas encore été débattu – le fait que le découpage des régions prévu constitue des régions beaucoup plus puissantes qu’auparavant, d’une taille comparable aux Länder allemands et qui, par ce biais, constitue une sorte de phase préliminaire à la mise en oeuvre d’un état fédéral – le début de la VIe République. Cette réforme, il faut l’avouer, a été très mal communiquée dès le début, et le fait que la population ait été exclue de ce débat constitue également une erreur de la France centraliste. Mais serait-il vraiment mieux de laisser tout comme avant au lieu de sauter sur l’occasion pour réformer un système administratif totalement dépassé par les réalités du monde d’aujourd’hui ?

Les potentats locaux et régionaux qui craignent avant tout que leurs postes en soient rendus obsolètes, prêchent pour leur propre paroisse. Pour cela, ils stimulent des craintes d’une potentielle et diffuse «perte de l’identité régionale» pour inciter les population à défendre leurs intérêts souvent personnels. Est-ce que les Français souhaitent réellement le maintien d’un système administratif datant de l’époque napoléonienne ou est-ce qu’il ne serait pas temps d’ouvrir la voie vers le présent et l’avenir ?

Bien sûr, on peut reprocher au gouvernement le côté non participatif de la démarche. Mais cette démarche, elle découle directement de l’organisation de l’état français d’aujourd’hui. Pour changer cette organisation toujours totalement centrée sur la capitale et le pouvoir central, la réforme constitue une formidable occasion de revoir le fonctionnement de l’état, le comportement des fonctionnaires tout puissants et d’instaurer un état moderne, efficace et capable de travailler au service des citoyens.

L’Alsace aura suivi avec grand intérêt l’évolution en Corse, où on prévoit de proposer au gouvernement une administration unique, remplaçant le Conseil Régional et les deux Conseils Généraux. L’Alsace, pour rappel, avait réfusé exactement ce schéma par voie référendaire le 7 avril 2013. Si le gouvernement devait accepter la proposition corse, le sujet reviendra à l’actualité aussi en Alsace. Et après ? Mais les Alsaciens doivent aussi se poser la question s’ils préfèrent garder l’expression «mille-feuille institutionnel» dans leur vocabulaire.

2 Kommentare zu Et si on laissait tomber la réforme territoriale ?

  1. Les seuls transferts de compétences envisagés vont du département à la région, mais aucun transfert de l’État vers les Régions…Comme le dit Romain Pasquier (directeur de recherche au CNRS et expert associé à l’institut de la gouvernance territoriale et de la décentralisation) : “L’exécutif a voulu faire une opération de communication politique. Ce redécoupage jacobin va créer des régions gigantesques sans moyens, des colosses aux pieds d’argile”.

    Il faut peut-être effectivement laisser faire le gouvernement et espérer que dans 3 ans le prochain gouvernement osera entreprendre un vraie réforme, avec un vrai débat dans le pays, surtout avec le desastre éléctoral et politique qui se profile (FN à la tête de 2~3 régions dont ALCA…). Une telle réforme mérite plus que le travail hâtif et bâclé fait isolement par un seul parti en pleine crise de légitimité.

  2. Les nouvelles régions prévues ont une taille comparable aux Länder allemands – et si cette réforme n’était que le prélude de la VIe République, fédéraliste, permettant enfin ce transfert de compétences de l’état vers les régions. Ce serait l’occasion d’en finir avec l’état centralisé…

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